Les systèmes d’éducation ont bien des cadavres dans leurs placards.
Au delà de la prise de conscience des torts, excuses et réparations sont
nécessaires.
En Amérique, on a évidemment les pensionnats
autochtones. La formule était connue, des institutions équivalentes
existaient ailleurs et la même logique a été appliquée. France, Angleterre, Espagne, Portugal, toutes les nations coloniales se sont servi de l'école dans leurs entreprises de domination. Elles avaient déjà raffiné la procédure sur leurs propres populations bien avant.
Le système éducatif traine toujours comme
un boulet cette mentalité de régime carcéral où tout est décidé pour les
étudiants. Bien sur on tente de s'en éloigner, mais il faudra bien un
jour sortir tous les cadavres des placards. Même aujourd'hui, on en
ajoute encore quelques uns de temps à autre. Les enseignants qui n'ont
pas voulu participer à ces entreprises d’assimilation ont souvent été
les premiers sanctionnés. À eux aussi on doit des excuses et des
réparations, dont les plus intéressantes concernent la transformation de
l'école.
La réhabilitation consiste essentiellement à rétablir
la confiance. Pour y parvenir, il faut en faire beaucoup plus que si on
avait bien fait les choses en commençant.
L’aveuglement collectif
s'appuie sur des responsabilités niées. L’école n’est pas la seule
institution en cause; la responsabilité des politiciens au service
d’intérêts cachés est courante et celle des individus à qui les abus
profitent est rarement reconnue. Les scandales apparaissent à la suite
d’aveuglements répétés. Pillage environnemental, fiscalité tordue,
exploitation sexuelle, opioïdes, pauvreté abjecte…, toutes ces
situations ont une raison d’être qui peut être sapée.
Reconnaître
l'inavouable n'est pas une affaire facile. Ne pas le faire ne fait que
faire perdurer le problème. Avant d'être massacrés, les Arméniens ont
massacré des siècles avant... Globalement, les nations arabes ont
importé plus d’esclaves africains que les nations européennes. Les
Africains eux-mêmes ont participé à la traite. L’Asie n’est pas en reste
et compte ses propres entreprises d’acculturation, certaines sont même
en cours. Comme ailleurs, on préfère taire sa propre histoire et nier
son rôle. Mais commençons donc par nos propres histoires, personne n’est
en position de donner de leçons.
Pour sortir de nos dérives irrationnelles et de nos justifications, la reconnaissance de l’abus est le premier pas.
Denys Lamontagne - [email protected]