Des images ou des modèles inédits peuvent influencer des millions de personnes. En 2020 on nous a montré l’image floue d’un trou noir, ce qui en principe était assez improbable. En 1989, IBM a écrit son nom avec 35 atomes; la photo parlait par elle-même. La photo de la terre entière vue de l’espace prise en 1972 a constitué une prise de conscience de l’humanité entière quant à sa position dans l’univers. Au début du vingtième siècle, les photographies des microbes dans le sang et de tout l’univers microscopique ont provoqué une profonde transformation des mentalités. Mais avant ?
Les représentations de l’art rupestre avaient un rôle cérémonial. L’art asiatique, perse, grec, romain, africain, indien, qui se sont développés au travers de la sculpture, de la peinture, de l’architecture avaient aussi ce rôle, mais également social, pour informer, éduquer, rallier, décorer, plaire, faire rire ou même exciter. Les représentations sophistiquées montraient autant la puissance, la richesse et la maîtrise technique que l’idéologie ou les croyances. Avec l’arrivée de l’imprimerie, l’exposition aux images a commencé à être plus fréquente. La photographie l’a amplifiée et la numérisation l’a amené à une autre échelle.
Comme vous le découvrirez dans ce dossier, les usages se sont déplacés. Autrefois on montrait des visions de l’esprit et de l’imagination et aussi ce qui était perçu directement par les sens. À mesure que nous avons accumulé des données, de nouvelles illustrations sont apparues. Les premières cartes du monde ont guidé les explorateurs; plus elles devenaient précises, moins elles comportaient de monstres marins. Aujourd’hui, à partir de données, on peut illustrer la propagation d’une épidémie aussi bien que le virus qui en est responsable. La visualisation devient dynamique, on peut voir les futurs édifices avant qu’ils soient construits, on peut même y circuler virtuellement. On ramène à la vie virtuelle des personnes décédées et on peut réussir à tromper nos sens de bien des façons. La visualisation
et les artisans qui la supportent n’ont pas fini de nous en mettre plein la vue et de remettre en question
notre réalité.
Denys Lamontagne - [email protected]
