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Publié le 03 novembre 2014 Mis à jour le 07 avril 2021

L’égalité : facteur majeur de réussite et de persévérance scolaire

Ce n’est pas la moyenne qui compte le plus, mais l’écart entre les premiers et la moyenne

Inégalités de revenus / succès scolaires

On se doute bien que plus les inégalités dans la répartition de ressources limitées sont grandes, moins les chances de réussite sont bonnes; l’équation est simple : s'il y a 10 000 € à répartir entre 100 individus et que cing d'entre eux en accaparent 1 000 € chacun, il reste 5 000 € pour les 95 autres. Au lieu de recevoir 100 € chacun, ils en recevront plutôt 52,63 €.  Ces euros auraient servi à acheter des livres, à payer des professeurs, à entretenir les locaux... ce qui finalement se traduit par des chances de succès moindres pour la majorité.

On peut remplacer les euros par des processus de sélection, des avantages particuliers, par tout ce qui concentre les ressources que ce soit les meilleurs élèves, les équipements, les compétences.

Les chances de succès se réduisent d’autant plus vite qu’il y a d’écarts. On peut évidemment augmenter les ressources disponibles, mais si les règles de partage sont faussées, cela ne fera qu'augmenter les écarts.

On le savait au moment de la révolution française et on le savait aussi lors de bien des révolutions précédentes; quand les inégalités vont jusqu’à oblitérer tout espoir d’amélioration chez la majorité des gens, on a le ferment de problèmes à grande échelle.

Plusieurs recherches le démontrent sans qu’il soit maintenant possible d’en douter : un bon système éducatif est un élément positif, mais le facteur le plus important dans la réussite scolaire est… la qualité du milieu familial. Dans un milieu favorable, on profite du système scolaire et on profite des avantages de l’éducation. Dans le cas contraire, les ressources sont de moins en moins mises à profit et les changements peu significatifs, même si on ajoute des ressources sans s’attaquer aux inégalités.

Égalité de revenus = meilleure éducation pour tous.

Que ce soit à l’échelle internationale, à l’intérieur d’un pays ou d’une région, plus les écarts de revenus sont grands, plus les performances scolaires de l’ensemble sont faibles et plus le taux de décrochage est élevé.

Mais ce qui est le plus surprenant est que cela est beaucoup moins lié au niveau de revenu qu’à celui des écarts entre les revenus. Autrement dit, une région riche avec de grands écarts de revenus fait systématiquement moins bien au niveau scolaire qu’une région moins riche mais avec moins d’écarts entre les revenus.  Bien sûr, un pays riche avec moins d’écarts fait mieux qu’un pays moins riche, mais la différence est statistiquement bien moins importante, voire marginale.

La mobilité sociale

On vante la valeur de l’éducation comme tremplin social : on peut changer son statut avec l’éducation. Ceci est d’autant plus vrai que les inégalités entre les riches et les pauvres sont faibles. Dans les pays où les écarts sont grands, la mobilité sociale s’en trouve réduite en proportion, enfant ou adulte.  Encore ici, cela a moins à voir avec le niveau de revenus qu’avec l’écart entre les moins et les mieux nantis.

Pourquoi ?

On peut expliquer ce phénomène de plusieurs façons, mais le meilleure synthèse tourne autour de la communauté et du sens des responsabilités.  Plus les écarts sont grands, plus la communauté s’effrite, plus les clôtures s'élèvent et l’insécurité règne. L’espoir de changement se réduit, le futur s’estompe au profit d’un présent de survie et d’une idéalisation du passé. Au contraire, avec des écarts moindres, le futur est riche, les possibilités nombreuses et la communauté vivante.

Les inégalités au sein d’un groupe sont un facteur de déstabilisation et ce, pour tout genre de groupe et toute forme d’inégalité.  Mélanger différents niveaux de compétences peut s’avérer intéressant à condition que les écarts puissent se combler; si les écarts sont trop grands, une ségrégation se produira nécessairement. Pire encore, comme le jugement social est l'un des plus puissants, l’anxiété de tout le monde augmentera dans les mêmes proportions que les inégalités, y compris à l’école.

Comment réduire les inégalités

Dans cette courte conférence Ted, Richard Wilkinson explique clairement pourquoi l’égalité est mieux pour tout le monde et propose aussi quelques moyens pour la favoriser.


Sans surprise, ces moyens touchent évidemment au partage des revenus et plus généralement à une meilleure répartition des responsabilités via une démocratisation de la haute direction, via les coopératives ou l’actionnariat des employés. D’un autre coté, ils concernent la disparition des privilèges comme les crédits de taxe, les échappatoires fiscaux (qu'on peut assimilier à un détournement de l'argent public) et leurs équivalents dans différents milieux.

La reproduction d’un système à l’université

Pas besoin d’aller très loin pour trouver des exemples, les universités offrent un bon portrait de la dynamique du phénomène. Les écarts entre les revenus des mieux payés (doyens, administrateurs, professeurs émérites) et des moins bien rémunérés (employés de soutien, d’entretien, chargés de cours) illustrent bien leur situation compétitive dans une logique économique : dans les pays libéraux, ces écarts ne font qu’augmenter année après année et annoncent une ère de contestation à la mesure de ces écarts.

Les universités qui prônent une politique de réduction des écarts entre le salaire moyen et les salaires les plus élevés sont rares ! Encore plus si elles sont en compétition au niveau international. Il ne faut pas compter sur leurs administrateurs les mieux payés pour la défendre. Mieux vaut privilégier alors une démocratisation de la direction.

Le premier indicateur

Si on revient à l’idée de départ d'un meilleur système d’éducation, celui-ci s’établira en parallèle avec la diminution des écarts de revenus dans la population et ceci constitue le meilleur indicateur de progrès. Ça peut très bien s'enseigner.

Références

Social Mobility and Education - Equality Trust - Juillet 2014
http://www.equalitytrust.org.uk/about-inequality/impacts/social-mobility-and-education

The price of inequality - Chart - 2012 - Newstatesman
http://www.newstatesman.com/economics/economics/2012/10/chart-day-price-inequality

Les enfants réussissent mieux à l'école dans les sociétés plus égalitaires. - Equality Trust
http://www.equalitytrust.org.uk/research/l%E2%80%99%C3%A9ducation
«une analyse des 50 états des États-Unis d'Amérique montre que les scores enregistrés en mathématiques et lecture sont liés à l'inégalité.»

Pay ratios point to massive inequality - David Matthews - Times Higher Education - 2013
http://www.timeshighereducation.co.uk/news/pay-ratios-point-to-massive-inequality/2008207.article

Equality, not education, is the key to individual transformation - Lynsey Hanley - The Guardian, 2009
http://www.theguardian.com/commentisfree/2009/oct/22/schools-reform-equality-failure

How economic inequality harms societies - Richard Wilkinson - Conférence TED - 2011
http://www.ted.com/talks/richard_wilkinson
 

Illustration : Equality Trust


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