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Publié le 16 septembre 2014 Mis à jour le 16 septembre 2014

Qui se soucie de nous dans la formation à distance?

Apprendre en autonomie ne signifie pas apprendre seul

Est-il possible d'apprendre seul ? De n'avoir besoin de personne pour progresser dans ses apprentissages ? 

La réponse à cette question n'est pas aussi évidente qu'on le penserait au premier abord. Les tenants du "oui, évidemment" pensent sans doute à certaines expériences d'apprentissage autonome réussies, débouchant sur la profonde satisfaction d'avoir vaincu seul les obstacles. De leur côté, les tenants du "bien sûr que non" évoquent déjà le réconfort immense apporté par la présence d'un éducateur bienveillant alors qu'ils étaient placés devant une dfficulté semblant insurmontable.

 

Les clés du sentiment d'auto-efficacité

En fait, la question est mal posée. Disons plutôt : quelles conditions doivent être remplies pour que je puisse apprendre de manière autonome ?

Sur le site Hybrid Pedagogy, dédié aux relations entre formation, éducation et technologies, on lira avec intérêt le long article de Keith Brennan qui répond à cette question. Selon lui, c'est Albert Bandura qui, avec sa théorie de l'auto-efficacité, a identifié les conditions nécessaires à la réussite d'un apprenant débutant dans un domaine : environnement clair et rassurant, présence d'éducateurs légitimes (qu'il s'agiissent d'enseignants ou de pairs), activités permettant d'éprouver sa maîtrise d'un sujet, immersion dans un groupe d'apprenants de niveau et d'habileté relativement homogènes, encouragements réguliers. 

Avec humour, Brennan dresse également la courte liste de ce qui peut faire échouer à coup sûr un apprenant débutant :

  • Des pairs qui sembent réussir avec aisance, alors que vous-mêmes ne parvenez pas à faire ce qui est demandé;
  • Une charge cognitive trop élevée (car trop d'éléments nouveaux en même temps) et pas d'éléments rassurants;
  • Un espace et un processus d'apprentissage éclatés, requérant de votre part des habiletés dont vous ne disposez pas;
  • Des tâches trop difficiles et non encadrées.

Les critiques de Brennan s'adressent aux "intégristes du connectivisme", théorie de l'apprentissage développée par Les Canadiens Downes et Siemens, ayant donné lieu à la création des cMOOC (MOOC connectivistes) qui valorisent précisément l'autonomie des participants, l'apprentissage entre pairs et la fonction de chacun comme "noeud" et point de connexion entre les informations.

 

Profs et animateurs, montrez que vous êtes là !

Mais au-delà de ce cas particulier, nombre de praticiens de l'e-learning sous toutes ses formes insistent sur l'importance de pouvoir compter sur un soutien humain sans faille lorsqu'on se forme à distance. C'est par exemple le cas d'Alastair Creelman qui tient le blog "The corridor of uncertainty", lui aussi consacré aux technologies et à l'éducation. Creelman insiste sur l'effet profondément motivant de la présence d'un tiers sur l'apprenant : le prof que l'on ne veut pas décevoir, le collègue du groupe de travail qui aura deux fois plus de travail si on abandonne, le peloton des apprenants par lequel on ne veut pas se laisser distancer... Peu importe, dit Creelman, que la relation avec ces personnes s'établisse en présence ou à distance; l'essentiel est qu'elle existe : "Le facteur le plus important est que quelqu'un souhaite que je réussisse et regarde comment je progresse. Quelqu'un qui veille sur moi". 

La synthèse la plus convaincante récemment publiée sur les caractéristiques d'un produit de formation à distance de qualité n'a pas été réalisée par un éducateur mais... par une personne qui a "essayé une trentaine de MOOC (et en a terminé 23)". Matthieu Bonne, développeur informatique de profession, a en effet pris la peine de dresser la liste des caractéristiques du Mooc idéal sur son matthy blog. Inutile de vous préciser que ces caractéristiques devraient être présentes sur l'ensemble des cours en ligne. 

Plusieurs de ces caractéristiques touchent directement à la présence humaine dans les cours à distance: 

- Présence d'enseignants "performants", c'est à dire : 

  • "compétents et crédibles (oui, le CV compte) ;
  • capables de communiquer leur passion du sujet abordé (de l’enthousiasme, que diable !) ;
  • dotés d’une diction convenable et d’un minimum de talent oratoire (pitié, ne lisez pas votre texte, messieurs-dames…) ;
  • prêts à s’impliquer tout au long du MOOC et à se remettre en question".

- Existence d'une communauté d'apprenants, mobilisée comme source de motivation, de découvertes, d'évaluation (par les pairs), de travail de groupe... 

- Cette communauté doit être animée par des professionnels et les enseignants ne doivent pas hsiter à mettre la main à la pâte :

"Le travail à fournir pour canaliser toute cette énergie, éviter les frustrations, pallier aux incompréhensions, désamorcer les conflits, prévenir le découragement et écarter les éléments nocifs est considérable. Si tu es familier du community management, ce que je dis ne te surprend pas… Les MOOC qui font l’objet d’un accompagnement professionnel anticipent cette mission et constituent une équipe compétente et disponible pour encadrer et accompagner la communauté ; cela se passe généralement très bien. (...)

En bref, cet aspect social est souvent ce qui différencie un « petit MOOC sympa » d’un « super MOOC bien ficelé ». Lorsque tu vois professeurs et assistants s’impliquer personnellement dans l’animation d’une page Facebook ou Google+, tu ne peux qu’être motivé pour t’investir toi aussi".

Je vous recommande vivement la lecture de l'article complet, qui vous confortera probablement dans l'idée qu'il est extrêmement intéressant d'écouter les apprenants pour améliorer ses cours. 

On voit avec l'exemple des MOOCs que l'enseignement à distance même massif peut ne pas tomber dans l'anonymat qui fait le lit de la démotivation et de l'abandon. En tant qu'apprenant, si vous savez que quelqu'un se préoccupe de ce que vous faites dans le cours, vous aurez plus de scrupules à filer à l'anglaise dès que vous aurez un petit coup de mou; en tant qu'éducateur, vous apprendrez beaucoup des échanges avec les inscrits, de ce qui les fait vibrer ou les laisse de glace. Et vous vous améliorerez.

Références :

Brennan, Keith. "In Connectivism, No One Can Hear You Scream: a Guide to Understanding the MOOC Novice." Hybrid Pedagogy. 24 juillet 2013. http://www.hybridpedagogy.com/journal/in-connectivism-no-one-can-hear-you-scream-a-guide-to-understanding-the-mooc-novice/.

Creelman, Alastair. "Someone to watch over me." The corridor of uncertainty. Last modified 26 août 2014. http://acreelman.blogspot.fr/2014/08/someone-to-watch-over-me.html.

Bonne, Matthieu. "Le MOOC idéal." matthy bLog. 25 août 2014. http://blog.matthy.net/2014/08/mooc-ideal/.

Illustration : Jirsak, Shutterstock.com


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