De prime abord, les organisations non gouvernementales ont tout pour susciter la confiance. Elles sont libres de toute attache politique, elles aident des populations en détresse et améliorent les conditions de vie partout sur la planète. Hélas, la confiance envers les ONG s'effrite.
En 2011, un sondage effectué auprès des Français montrait que moins de la moitié d'entre eux font encore confiance aux ONG. À peine 4 % des sondés sont pleinement confiants! Que s'est-il passé pour que des organismes comme l'UNICEF ou Médecins sans frontières obtiennent un si faible taux de satisfaction?
Des aveux qui ébranlent la confiance
Déjà le nouveau millénaire s'amorçait fort mal avec le scandale Crozemarie. En effet, les Français apprenaient en 1999 que Jacques Crozemarie, qui était à l'époque à la tête de l'ARC (Association pour la recherche sur le cancer), détournait des centaines de millions pour financer des villas avec piscine, des déplacements, des vêtements somptueux, etc. Un coup dur qui obligea les ONG à faire preuve d'une transparence totale. Certaines finiront par admettre qu'à certains moments, l'argent du public n'allait pas nécessairement à l'aide humanitaire.
Encore en 2013, l'UNICEF avouait qu'il y avait eu une énorme fraude dans son bureau de Nairobi au Kenya. Au début des années 90, années chargées pour les organismes non gouvernementals en Afrique, certains membres auraient versé des sommes à des centaines d'ONG bidons. Ils auraient commis pour 1 million de dollars de fraudes et auraient occasionné 9 millions de pertes pour UNICEF.
Autre cas désastreux pour l'image des ONG : la situation haïtienne. Près de 4 ans après le terrible séisme en Haïti, il semble que les dons, pourtant massifs, n'aient pas permis de sortir de la précarité des centaines de milliers de personnes.
Les imperfections des ONG
L'émission de radio suisse « En ligne directe », que l'on peut écouter en ligne, s'est intéressé à ce sujet épineux à la lumière d'un livre et d'un film qui mettent en relief « l'incompétence » des ONG, entre autres, dans la situation du tremblement de terre de 2010 à Haïti. Les intervenants de ce débat ont noté quelques problèmes importants des ONG d'aujourd'hui.
Premièrement, l'attitude sur le terrain. Il semble que les organisations n'essaient pas de se coordonner avec les instances déjà en place. Ils imposent plutôt leur manière de faire. Une méthode qui choque, d'autant plus quand la majorité des échanges se font en anglais, ce qui peut être problématique et insultant pour les habitants d'un pays en crise.
Deuxièmement, avec la médiatisation massive des crises, il y a une tendance à créer des attentes irréalisables. En voulant ramasser un maximum de dons des citoyens et gouvernements, les organisations promettent trop de choses et finissent par décevoir tout le monde. Par exemple, en 2010, Bill Clinton affirmait sans rougir que l'aide internationale allait aider à rebâtir une Haïti forte rapidement...
Enfin, il y a un manque de communication entre les ONG et le public. Aujourd'hui, le donateur veut savoir que le montant qu'il offre à une cause a des effets concrets sur le terrain. Qu'est-ce que le dollar ou l'euro investi change à la situation dans les camps de réfugiés ou pour les malades du SIDA ? Or, les grandes organisations n'ont pas nécessairement créé des outils de transparence rassurants, ce qui provoque une hésitation chez bien des personnes qui pensaient donner. Certaines optent alors pour des plus petites ONG parce qu'elles ont l'impression de savoir où va leur argent. Or, même cette corrélation (petite organisation = probité absolue) n'est pas toujours vraie.
Le « marché » de l'aide humanitaire brasse une cagnotte annuelle de 20 milliards de dollars. Un chiffre énorme qui suppose une grande responsabilité. Ayons toujours en tête que la majorité des ONG sont de bonne foi et travaillent véritablement à améliorer les choses. N'oublions pas non plus que la crise de confiance touche tous les acteurs institutionnels, comme le montre l'enquête annuelle internationale réalisée à ce sujet. Cependant, il est important que cessent les fausses promesses et que se mettent en place des mécanismes permettant de suivre plus concrètement l'effet des dons sur le terrain. La communication elle-même ne siffit pas, tant elle ressemble dans bien des cas à de la publicité. C'est évidemment plus facile à dire qu'à faire, particulièrement dans les situations d'urgence, mais il sera nécessaire pour l'avenir des ONG qu'un tel travail soit fait pour regagner la confiance des gens.
Illustration : ReSurge International via photopin cc
Références :
En Ligne Directe. "Avez-vous toujours confiance en l’aide humanitaire?" rts.ch. Dernière mise à jour : 25 septembre 2013. http://www.rts.ch/audio/la-1ere/programmes/en-ligne-directe/5220469-avez-vous-toujours-confiance-en-l-aide-humanitaire-25-09-2013.html.
Ioannidis, Emmanuel. "Les scandales des ONG sont plus tristes que les autres." Contre-Feux. Dernière mise à jour : 19 mars 2013. http://www.contre-feux.com/les-scandales-des-ong-sont-plus-tristes-que-les-autres/.
Kalmann, Marco. "Crozemarie: une piscine avec l’argent du cancer." Largeur.com. Dernière mise à jour : 25 mai 1999. http://www.largeur.com/?p=83.
Tual, Morgane. "Dons: peut-on faire confiance aux ONG?" Youphil. Dernière mise à jour : 15 décembre 2011. http://www.youphil.com/fr/article/04644-dons-peut-on-faire-confiance-aux-ong?ypcli=ano.
Le blog du Communicant. "Baromètre Edelman Trust 2012 : Confiance, vous avez dit confiance ?" 7 mars 2012. http://www.leblogducommunicant2-0.com/2012/03/07/barometre-edelman-trust-2012-confiance-vous-avez-dit-confiance/.
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