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Publié le 05 mars 2013 Mis à jour le 05 mars 2013

L'incroyable productivité des cMOOCs

Deux cMOOCs qui ont pris fin récemment montrent à quel point ce mode de construction des connaissances agit sur la productivité et la créativité des participants

Si vous vous intéressez à l'actualité des MOOCs et lisez les articles réguièrement publiés sur Thot Cursus sur ce sujet, vous devez maintenant savoir qu'on distingue habituellement deux catégories de MOOCs :

- Les xMOOCs, qui sont des cours académiques massivement distribués; les contenus sont préparés par l'institution distribuant le cours, et les apprenants doivent assimiler ces contenus. Des tests réguliers et un examen final (qui peut prendre diverses formes) permettent de vérifier le niveau de rétention et de compréhension des contenus, et d'attribuer un certificat de réussite à ceux qui ont obtenu le niveau minimal exigé.

- Les cMOOCs, qui sont des espaces de co-construction des savoirs et savoir-faire par les apprenants eux-mêmes. Les animateurs du cours établissent une liste de sujets qui sont abordés dans le cadre d'une progression, fournissent des ressources favorisant la réflexion et facilitent les interactions. Ces MOOCs peuvent faire l'objet d'une validation ou pas. Quand il en existe une, elle prend généralement la forme d'une production ordiginale individuelle ou collective.

Le MOOC ITyPA s'affichait comme un MOOC connectiviste, directement inspiré des cMOOCs réalisés par S. Downes et G. Siemens entre 2008 et 2012 autour de l'apprentissage connecté et du connectivisme. Aucune évaluation formelle des apprentissages n'a été organisée dans le cadre de ce MOOC, et aucune production finale n'a été exigée des participants,dans la mesure où les organisateurs n'avaient pas, pour cette expérimentation, prévu de certificat de réussite.

Sur la plateforme Coursera, on trouve une majorité de MOOCs académiques (xMOOCs), mais aussi quelques MOOCs connectivistes (cMOOCs). C'est le cas du cours E-Learning et Digital Culture (EDC MOOC), distribué par l'Université d'Edimbourg entre le 28 janvier et le 3 mars 2013. Pour valider leur parcours de formation, les participants ont du créer un objet numérique (digital artefact) en relation étroite avec les sujets abordés pendant le cours. Cette production a été évaluée par les pairs en fonction de critères pré-déterminés. Un niveau de 1,5 sur 2 permettait d'obtenir la certification. 

Dans les deux cas et de manières fort différentes, ces MOOCs se sont montrés incroyablement productifs. Et ces productions originales sont à disposition de tous sur le web. Dans les deux cas, les participants à un cMOOC ont fait la preuve de ce qu'ils étaient capables d'apporter à la communauté. 

ITyPA : de la réflexion individuelle au grand oeuvre collectif

 

Sur ITyPA, tout avait commencé normalement, par un appel des animateurs à la production individuelle. Le MOOC portant sur la mise en place d'un environnement personnel d'apprentissage, les particpants (plus de 1 300 inscrits, mais moins de la moitié de personnes qui ont dépassé la première semaine) étaient invités à en signaler les composants et à donner du sens à l'ensemble au travers d'une réflexion personnelle partagée, par le biais d'un blog par exemple. Plus de 100 blogs et autres espaces librement accessibles ont ainsi été créés; plus de 200 personnes ont préféré s'exprimer et interagir avec leurs pairs sur les forums du cours, certains combinant les deux démarches. 

Dans la majorité des cas, ces productions témoignent avant tout du parcours de formation des personnes qui les ont créés et les alimentent. Peu d'espaces, en définitive, ont survécu à la date de fin du cours. Il est d'autant plus intéressant de signaler ceux qui perdurent : une proportion importante des espaces créés sur Scoop It, les blogs qui existaient avant ITyPA et qui continuent leur vie après.

Mais à côté de cette production individuelle, très tôt dans ITyPA sont apparues des productions collectives, et des appels directs au travail collaboratif. Parmi les objets créés, on remarquait les comptes-rendus de chacune des réunions en direct et un "glossaire des mots barbares" très tôt mis en chantier. Certains échanges à propos des outils se sont transformés en tutoriels; des fils Storify ont été alimentés par les twitts témoignant de conversations... Cette belle énergie collective allait-elle disparaître à la fin d'ITyPA ?

Eh bien non ! Une vingtaine de participants particulièrement motivés et organisés ont pris l'intiative de regrouper toutes ces productions, de les finaliser, de les compléter des pièces qui manquanient encore et de créer CAPITyPA, le site de capitalisation du MOOC ITyPA, premier MOOC francophone, très, très connectiviste.

 

Le contenu de CAPITyPA est présenté sur sa page d'accueil : 

Nous avons voulu :

Ce menu déjà fort appétissant incite à explorer le site. Et sur chaque page ou presque, des surprises nous attendent. 

La partie consacrée au déroulement du cours est la plus liée au cours lui-même. Il s'agit d'un enrichissement considérable de la matière initiale, le résultat étant infiniment plus important et meilleur que ce qui l'a provoqué. Les infographies, en particulier, sont très largement réutilisables dans d'autres contextes. Pour chaque thème, des productions de participants sont citées et un lien permet de les consulter.

La carte des compétences pour suivre un MOOC mérite de figurer parmi tous les aides-mémoires des concepteurs de MOOCs, surtout s'ils souhaitent  favoriser la productivité des apprenants (et après avoir vu ce site de capitalisation, comment pourraient-ils ne pas le vouloir ?).

Le gossaire des mots barbares est une aide inestimable pour tous ceux qui débutent dans l'utilisation d'Internet pour apprendre et dans le e-learning. Ils y retrouveront la traduction dans un langage simple de tous les termes dont raffolent les pédagogues et les technophiles (blended learning, CMS, folksonomie, gravatar, linker, mashup... Respirez, nous sommes entre nous !).

Après avoir visionné les interviews des animateurs d'ITyPA, vous en saurez sans doute un peu plus sur les caractéristiques des cMOOCs et sur ce qui peut pousser quatre individus normalement constitués à se lancer dans la construction et l'animation d'un tel cours, sans autre support que la bienveillance de leurs employeurs habitués à les voir s'engager dans des entreprises étranges et démesurées. 

Enfin, une promenade dans les différentes communautés nées d'ITyPA vous convaincront du fait que des personnalités impressionnantes se sont rencontrées là et continuent de réfléchir ensemble. 

Le site de CAPITyPA est mille fois plus beau et mieux organisé que celui d'ITyPA. On dirait qu'une chenille a donné naissance à un papillon... Et tout est sous licence Creative Commons, comme il se doit.

EDC MOOC : mille et un talents s'affirment autour du monde

 

Près de 45 000 personnes se sont inscrites pour suivre le MOOC e-learning and digital culture, conçu et animé par une équipe de l'université d'Edimbourg en Ecosse, et distribué sur Coursera. Ce chiffre est extrêmement impressionnant, mais seuls 17 000 participants ont effectivement engagé les travaux la première semaine. Après 3 semaines de cours, il restait environ 7 000 personnes actives. 

7 000 personnes qui interagissent sur des dizaines de forums, cela fait une belle pagaille. Le "noyage" cher à Dave Cormier était à son comble dans ce MOOC connectiviste, personne ne pouvant suivre les conversations. Le phénomène de dispersion et de désorientation était encore accentué par le fait que sur Coursera, il est impossible d'effectuer une recherche de personne. On peut juste entrer des mots-clés et obtenir une sélection de messages. Impossible donc de se regrouper par affinités, objets de recherche ou nationalités. Même en ne s'abonnant qu'à deux ou trois fils de discussion, ce sont plus de 100 messages qui arrivaient dans la boîte de courriel, chaque jour... 

L'écosystème courserien s'avérant assez défavorable au travail collectif, des milliers de particpants se sont retrouvés sur les réseaux sociaux pour discuter d'une manière plus suivie et mettre en commun leurs ressources. Et quand vint le temps de réaliser le travail final, on constata que le MOOC EDC était d'une productivité extraordinaire.  

Pour valider son parcours de formation, chaque participant devait en effet créer un objet numérique et le soumettre à l'évaluation anonyme de trois de ses pairs. Les productions devaient impérativement être librement accessibles sur la toile. 

Quelques jours avant la date limite de remise des productions, on a donc vu apparaître des centaines d'objets multimédias, annoncés sur Twitter, dans les forums du cours, sur Google +, Facebook et surtout présentés un mur Padlet (ex Wallwisher) : 

 

 

Il suffit de cliquer sur les objets accumulés pour les voir s'ouvrir, et prendre la mesure des talents qui se sont exprimés ici. Les propos diffèrent, les outils utilisés aussi. Mais partout, on note la préoccupation de se faire comprendre, de nouer un contact, et de rendre compte de l'expérience vécue. Un diaporama, hébergé sur Vimeo, rend parfaitement compte de cette expérience : 

 

The Edunauts: Educational Explorers for the Digital Age from Wayne Barry on Vimeo.

Ce diaporama est en anglais. A t-il été réalisé par un anglophone ? Sans doute. Mais une importante proportion de participants à ce MOOC n'avait pas l'anglais pour langue maternelle. Ils ont néanmoins lu, écouté, produit dans cette langue, y compris leur objet final. Il faut rendre hommage à l'effort déployé par les participants aux MOOCs anglophones, et sans doute également se dépêcher de proposer une offre d'aussi bonne qualité dans d'autres langues car après avoir suivi un MOOC en anglais, on se dit que finalement, on pourrait bien continuer dans la même langue... 

Les cMOOCs sont infiniment moins nombreux que les xMOOCs. Ces derniers correspondent sans doute mieux à l'idée que la majorité des personnes désireuses d'accroître leurs compétences se fait d'un enseignement en ligne. Néanmoins, les cMOOCs disposent d'incontestables atouts pour répondre aux défis posés par les mutations contemporaines. Fondés sur un juste dosage de guidance et de confiance, ils offrent de riches espaces d'échange et d'expression aux participants, stimulent la créativité et invitent à la production originale. N'est-ce pas justement cela que l'enseignement académique classique ne parvient pas à faire, comme le souligne Sir Ken Robinson dans des interventions qui ont fait le tour du monde ? N'est-ce pas de cela dont nos sociétés ont le plus grand besoin ? 

ITyPA

CAPITyPA

EDC MOOC

Padlet EDC MOOC 

 



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