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Publié le 14 janvier 2013 Mis à jour le 14 janvier 2013

France : vers un service national de l'enseignement supérieur en ligne

Pour retenir les étudiants dans les universités françaises, associer des cours en ligne à des enseignements de proximité en présence

Le 17 décembre 2012, Vincent Berger a remis au Président de la République française le rapport contenant les 136 propositions issues des Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche, visant à transformer en profondeur l'enseignement supérieur national. Les Assises dont sont issues ces propositions se sont déruolées entre les mois de juillet et de novembre 2012, période pendant laquelle tous les acteurs de l'enseignement supérieur ont été auditionnés.

136 propositions pour réformer l'enseignement supérieur

 

Les 136 propositions sont organisées en 5 sections :

  • Agir pour la réussite de tous les étudiants
  • Donner une nouvelle ambition pour la recherche
  • Redéfinir l'organisation nationale et territoriale de l'enseignement supérieur et de la recherche
  • Mieux reconnaître l'activité des femmes et des hommes
  • Affirmer l'engagement de la France dans l'enseignement supérieur et la recherche.

 

Quatre propositions pour donner une place au numérique dans l'enseignement supérieur

 

Quatre propositions, intégrées à la première section, concenrnent directement l'enseignement en ligne :

 

36 : mettre en ligne une initiative ambitieuse de l'enseignement en ligne, véritable service public d'enseignement suérieur en ligne et piur tous.

37 : développer l'usage des inovations pédagogiques utilisant les moyens numériques pour les enseignants de niveau supérieur, secondaire, primaire - notamment grâce à des formations spécifiques au sein des ESPE (ESPE : futures écoles supérieures du professorat et de l'enseignement)

38 : Développer l'accès aux archives numériques à l'échelle nationale, favoriser la diffusion des thèses et des travaux en ligne en général. Développer la formation des étudiants à la méthodologie documentaire. Développer les services documentaires personnalisés pour les chercheurs et les enseignants chercheurs (veille scientifique, bibliométrie...).

39 : Privilégier les enseignements en petits groupes et l'échange direct entre l'enseignant et l'étudiant, diminuer progressivement les enseignements en amphithéâtre, anticiper ces bouleversements dans les programmes de constructions immobilières des universités. 

Ces quatres propositions sont précédées d'un développement de moins de deux pages, qui donne quelques précisions sur les cnstats qui ont présidé à l'élaboration des propositions.

Organiser la riposte à l'attaque américaine

 

Manifestement, les responsables de l'enseignement supérieur français ont pris conscience du danger que représente l'offre de cours en ligne gratuits des universités américaines, qui risque de se traduire à brève échéance par une désaffection des étudiants français, préférant fort légitimement tenter d'obtenir grâce aux MOOC un diplôme de Harvard ou de Berkeley plutôt que son équivalent émanant de son université locale. La réponse française, telle qu'elle est brièvement présentée dans ce rapport, conjugue les enseignements en présence en petit groupe d'une part, et les cours en ligne d'autre part, qui remplaceraient les cours en amphi. 

L'offre de cours en ligne se doit d'être "nationale" et coordonnée à ce niveau. Ce sont en revanche les universités elles-mêmes qui fourniront les ressources qui, une fois mutualisées, formeront les bases de l'offre. Ceci, pour créer un service public de cours librement accessibles à tous, en France et au-delà, certains cours pouvant être intégrés aux crusus académiques classiques. On reconnaît là encore l'inspiration du modèle nord-américain, à l'exception de la dimension du service public, bien entendu.

Des précédents peu convaincants

 

Si la volonté de créer un service public de la formation en ligne peut être saluée pour sa générosité, sa faisabilité ne laisse pas de poser des questions, surotut lorsqu'on se réfère aux précédentes tentatives de mutualisation des ressources numériques pour l'enseignement supérieur. Et il faut bien ici reparler des UNT, ces vastes espaces de dépôt de ressources hétérogènes de premier niveau (des "grains", dans la terminologie de la formation à distance), trop rarement organisées en parcours. Quant au portail général des UNT, il symbolise à lui seul ce à quoi peut aboutir une initiative politique centralisée réalisée dans la précipitation. S'agira t-il cette fois encore de tout balayer pour tout recommencer ? Sur quelles bases, pour ne pas reproduire les erreurs passées ?

Présence = Proximité

 

Une fois réglée la question de l'accès aux savoirs objectifs par le biais de la distance, il reste à redonner de la légitimité aux cours en présence. Les propositions privilégient donc la proximité entre étudiants et enseignants, l'enseignement en petits groupes générant les débats et l'accompagnement individualisé. Nombre d'enseignants connaissent déjà cette modalité d'enseignement, largement pratiquée en cycle Master et en école doctorale. Les autres devront se former avant d'abandonner les amphis. La pédagogie universitaire, curieusement, n'est abordée que dans deux des recommandations de ce rapport, et exclusivement pour les jeunes enseignants-chercheurs qui pourraient bénéficier d'une décharge partielle d'enseignement les deux premières années afin de se consacrer à leur projet de recherche... et éventuellement à la formation pédagogique. 

Voilà donc, concrètement, comment risque de s'opérer le rééquilibrage espéré entre la recherche et l'enseignement dans les emplois du temps des enseignants du supérieur : par une modification progressive des conditions d'enseignement (passage de l'amphithéâtre aux cours en petits groupes) et éventuellement un peu de formation professionnelle. Ceci, alors même que l'augmentation du taux de réussite dans le premier cycle des études universitaires a été annoncé comme une priorité.

Si 20 % seulement des étudiants quittent l'enseignement supérieur sans diplôme, les autres mettent beaucoup plus longtemps que prévu à achever leurs études, augmentant du même coup le coût supporté par la collectivité et ne contribuant pas pendant cette période à la richesse nationale. Certes, l'amélioration de la qualité de l'orientation des jeunes à la sortie des études secondaires est nécessaire, comme le souligne ce rapport. Mais il est malgré tout étonnant de ne pas voir mieux articulés réussite des études, outils numériques et renouveau pédagogique. Car l'enseignement en ligne ne doit pas seulement être considéré comme une "menace" venue de l'étranger à laquelle il faut riposter au plus vite, mais aussi comme un ensemble supplémentaire de modalités de formation, pas exclusivement dédiées à la formation des masses, qui peut améliorer la réussite des jeunes. 

* Mise à jour du 15 janvier 2013 :

Dans Le Figaro daté du 13 janvier, nous lisons que Geneviève Fioraso, ministre de l'enseignement supérieur, vient d'annoncer la création de FUN, France Université Numérique, un service public d'ingénierie pédagogique chargé d'accompagner les universités dans la mise en ligne de leurs cours et, surtout, dans la mise en place de "nouvelles façons d'enseigner", comme le dit Cecilia Gabizon, auteure de l'article. L'objectif est d'atteindre 20 % des cours universitaires en ligne en 2017. L'enjeu est donc modeste par sa taille, mais en étant optimiste on peut espérer qu'après ce début plutôt lent, les universités auront acquis les compétences et établi les routines nécessaires à une utilisation plus systématique de l'enseignement en ligne, couplé au présentiel qui demeure indispensable car "les étudiants ne sont pas mûrs pour le tout en ligne", selon les dires de la ministre. 

 

Vincent Berger, rapporteur général : Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche - Rapport au Président de la République - 17 décembre 2012 

 



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