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Publié le 20 novembre 2012 Mis à jour le 13 janvier 2021

Se mettre au focus pour étudier

Apprendre à se concentrer, nouvelle priorité éducative

Une enquête de Pew Internet & American Life Project auprès de 2 462 enseignants du secondaire public, dont les résultats sont publiés sous le titre «How Teens Do Research in the Digital World», conclut qu’une large majorité de professeurs est d’accord avec les assertions suivantes :

  • les technologies numériques actuelles sont en train de créer une génération d’étudiants faciles à distraire et avec un courte durée d’attention (87 %);
  • les étudiants d’aujourd’hui sont trop connectés et auraient besoin de passer plus de temps éloignés des outils numériques (86 %).


Les deux tiers des répondants sont d’avis que les technologies numériques distraient plus les étudiants qu’elles ne les aident académiquement. D’un autre coté, 77 % considèrent que les technologies ont un impact positif sur leurs habitudes de recherche, plus approfondies et complexes, mais en même temps qu'elles diminuent leur capacité de concentration et de gestion de leur temps, ce qui devient un enjeu de plus en plus important.

Ces données, par le nombre de répondants, vont au delà des impressions des enseignants et commencent à ressembler à des constatations plus objectives. Mais qu’en est-il vraiment en termes d’effets sur les apprentissages ?

Une recherche menée par Larry Rosen, professeur de psychologie de l’Université d’état de Californie auprès de 263 étudiants du secondaire et d’université consistait à les observer pendant une quinzaine de minutes alors qu'ils étudiaient chez eux, dans le but de savoir s’ils étaient capables de rester concentrés et si ce n’était pas le cas, de savoir ce qui pouvait les distraire. Chaque minute, l'observateur notait exactement ce qu’ils faisaient : étudier, envoyer un texto, écouter de la musique, regarder la télévision restée allumée ou, s’ils étaient devant leur écran d’ordinateur, quel site était visité.

Même si les étudiants savaient que leurs habitudes d’étude étaient observées, ils n’étaient capables de rester concentrés en moyenne qu’entre 3 et 5 minutes avant de commencer à se disperser. Pour tous, les distractions proviennent :

  1. des différents appareils présents dans leur environnement : lecteurs MP3, ordinateurs portables, téléphones intelligents;
  2. des messages textes (textos)
  3. de Facebook

Ces distractions sont constatées, mais ont-elles un effet sur l’étude ?

Sans surprise, ceux qui demeurent concentrés et ont des stratégies d’étude maîtrisées ont de meilleurs résultats scolaires. Les pires sont ceux qui consomment le plus de médias chaque jour et ont pris l'habitude de mener plusieurs tâches simultanément. En d’autres termes, la capacité de concentration ou de distraction est un excellent indicateur du taux de succès à venir dans les tâches académiques.

Une seule suffit

Un résultat étonnant s’est révélé : si un étudiant va, ne serait-ce qu’une seule fois, sur Facebook durant cette période de 15 minutes, il a des résultats scolaires nettement moindres que ceui qui n'y va pas et ce, qu'il le fasse une ou plusieurs fois dans ce laps de temps. L’effet est perceptible non seulement sur sa concentration momentanée, mais aussi sur ses performances scolaires globales.

Intrigués par ces résultats, les chercheurs ont demandé à plusieurs milliers d’étudiants d'expliquer pourquoi ils se laissaient distraire aussi facilement. La plupart affirment que, avertis par un bip, une vibration ou un clignotement, ils se sentent obligés ou saisissent l'occasion d'aller voir ce qu'il en est. Plus intéressant encore, même sans ces signaux, les étudiants sont constamment dérangés par leurs propres pensées telles que «Je me demande si quelqu’un a commenté mon billet sur Facebook», «Je me demande si mon ami a répondu au message que je viens de lui envoyer» et autres réflexions du même genre.

Juste la possibilité même

Dans une autre expérience, on a projeté un vidéo à un groupe d’étudiants, en leur précisant que leur compréhension du sujet serait ensuite évaluée. On a également dit à tous qu'ils recevraient des textos et devraient y répondre, sans toutefois préciser le nombre de textos à traiter et à quel moment ils les recevraient. Dans les faits, un tiers du groupe a reçu 4 messages, à une autre tiers a reçu 8 messages et le dernier tiers n'en a reçu aucun.

Ceux qui ont reçu les 8 messages ont eu les pires résultats en matière de compréhension du vidéo, «D» en moyenne. Et les deux autres groupes (ceux qui avaient reçu 4 messages et ceux qui n'en ont reçu aucun) ont obtenu le même résultat, soit «C». La possibilité d’être dérangé semble être aussi néfaste que le fait de l’être vraiment. Les étudiants qui ont eu les meilleurs résultats sont ceux qui ont choisi de ne pas répondre immédiatement aux messages et ont attendu le meilleur moment pour le faire. Ce qui montre que le contrôle de son attention constitue un point clé dans la réussite de l'apprentissage ou de la mémorisation.

On signalera encore que 75 % des adolescents et des jeunes adultes vérifient leurs appareils tous les 15 minutes ou encore plus souvent. S’il ne leur est pas possible de le faire, ils deviennent anxieux; et l'on sait que l’anxiété inhibe l'apprentissage...

Gérer les distractions

Les technologies de communication ne sont pas près de disparaître. On se demande alors comment aider les étudiants à se concentrer en classe ou en ligne. On a beau développer des enseignements de grande qualité, si l’environnement le dégrade en dispersant l’attention des apprenants, le résultat sera inévitablement mauvais.

On suggère aux professeurs d’instituer des «pauses techno» afin que tous réalisent cette opération simultanément. Ces pauses pourront intervenir toutes les 15 minutes pour commencer, puis s'espaceront progressivement. Il semble que la période maximale tolérable pour un groupe de jeunes connectés soit de 30 minutes.

Pour les étudiants en ligne, on parle d’auto-discipline, de qualité d’environnement d’étude et de qualité des supports pédagogiques. Le défi de bien des webinaires ou d’enregistrements vidéos est de se montrer plus intéressants que les appareils et services qui, plaisants, profiteront de la moindre baisse d'intérêt... 


Références :

How Teens Do Research in the Digital World

Driven to distraction: How to help wired students learn to focus (.pdf)


Photo : Sanctuary photography sur Foter


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