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Publié le 14 février 2012 Mis à jour le 14 février 2012

Care ou soin, que choisir ?

Prendre soin les uns des autres, tout le monde est d'accord. Pourtant, nous vivons dans des sociétés de soin, qui médicalisent tout ce qui pourrait faire obstacle à notre bien-être.

Depuis quelques années, on parle beaucoup de la "société du care" dans l'espace francophone. Mais de quoi s'agit-il ?

Alors que les soins sont délivrés par des professionnels et font l'objet de marchandisation, le care (verbe anglais intraduisible en français, qui a à voir avec le souci de l'autre) en revanche est une fonction assumée par l'ensemble de la société. Ce qui a à la fois des avantages et des inconvénients  : d'un côté, mettre l'accent sur le care met en lumière les innombrables sans-voix qui contribuent au bien-être des plus faibles et des plus puissants dans nos sociétés : nounous, auxiliaires de vie, infirmiers, femmes de ménage... De l'autre, dire que c'est à la société d'assurer le bien-être des plus fragiles, c'est dire aussi que ce n'est pas aux pouvoirs publics de le faire, et donc préparer l'opinion à des coupes budgétaires. 

Cette politisation de la notion n'a pas échappé à Sandra Laugier, philosophe, Pascale Molinier, psychologue, et Patricia Paperman, sociologue, lorsqu'ils ont publié une tribune dans Mediapart pour critiquer une vision électoraliste et conformiste du care. Cette tribune intervenait peu de temps après qu'une femme politique française ait remis la notion de care sur le devant de la scène. Mais au-delà de l'anecdote, l'article met en évidence les détournements dont peut être l'objet la notion de care.

Qu'est-ce que le care ?

Care est un mot anglais qu'on pourrait traduire en français par "soin" mais il va au-delà de cette notion pour désigner l'attention accordée aux besoins des autres, la responsabilité, la prévenance, ...

Toujours en anglais, la notion de "care" est souvent opposée à celle de "cure" pour désigner des soins coutumiers et habituels liés aux fonctions d'entretien, de continuité de la vie. Tandis que le cure est employé pour les soins de réparation de ce qui fait obstacle à la vie.

Le care est donc une activité sociale mais aussi un mode de pensée autour duquel s'organisent une politique, une économie, une éthique, etc. D'un point de vue politique, il s'agit de garantir les droits des personnes vulnérables : se soucier des personnes telles qu'elles sont et non telles qu'elles devaient être. Economiquement parlant se pose la question de priorisation d'un service qui s'adresse à des bénéficaires a priori peu productifs.

On ajoutera que la politique du soin (cure) a depuis longtemps largement débordé de son cadre initial : nos sociétés développées confient volontiers aux professionnels de santé la tâche de nous rendre conformes à un idéal, de ne plus être, justement, tels que nous sommes mais plutôt tels que nous devrions être. Chirurgie plastique, orthodontie de confort, coaching en tous genres... relèvent bien du cure, et non du care. Mais que soigne donc cette médecine sans maladie ? 

Care ou soin ?

Ceci pose globalement une question de choix entre le care et le soin. Qu'on le veuille ou non, l'accent sera mis sur l'un ou sur l'autre. Et plus couramment, le care est le maillon faible des politiques sociales d'où l'aggravation observable des situations de vulnérabilité. Les politiques ne s'en sortiront pas en appelant à la "générosité" ou à l'éthique des populations : "Il ne s'agit pas de préconiser une idée d'un "soin mutuel" mais plutôt de questionner qui fait quoi et comment", disent les auteurs de l'article, pour qui toute politique du care digne de ce nom doit agir en faveur de la revalorisation des fonctions invisibles qui donne de la réalité à notre société du bien-être. 

En Afrique, on peut se réjouir de ce que le care est encore l'affaire des communautés, s'il en existe, des familles et d'autres intervenants sociaux. Mais ceci ne doit pas masquer la réalité d'une plus grande orientation des politiques publiques vers les soins. A la question : care ou soin, que choisir ? La réponse est évidente mais c'est à l'aune des faits qu'on appréciera...

Voir :

Politique du care contre société de soin. Sandra Laugier, Pascale Molinier et Patricia Paperman, 21 avril 2010.


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