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Publié le 08 janvier 2012 Mis à jour le 08 janvier 2012

Apprendre à plusieurs en jouant : une voie stimulante mais exigeante

Les serious games collaboratifs, l'avenir du jeu sérieux à condition que la participation sociale soit encouragée.

Thélème, jeu multijoueurs pour apprendre le français.

Si un internaute entre « MMORPG » (Massively Multiplayer Online Role Playing Games soit, en français, jeux de rôle en ligne massivement multijoueurs) dans un moteur de recherche, ce dernier lui retournera des centaines de titres. Gratuits ou non, ces mondes virtuels persistants prennent des formes variées : futuristes, fantastiques, sportifs, etc. Même l’univers de Star Wars est entré dans la danse ! Et tous ces jeux attirent des millions de personnes qui s’y adonnent régulièrement et créent des liens par le biais de guildes et de communautés.

Pas étonnant que les MMORPG soient devenus la référence en matière de collaboration pour les développeurs de jeux sérieux. Mais peut-on véritablement apprendre en groupe par le jeu?

Stimulateurs de collaboration et d’apprentissage


Le MMORPG peut-il véritablement servir d’outil de formation? Certains y croient depuis longtemps. L'exemple le plus convaincant est le projet Thélème d’Almédia où, dans un univers de cape et d’épée, des non-francophones peuvent améliorer leurs connaissances du français en multipliant les échanges avec des pairs en apprentissage, mais aussi avec des francophones. [edit : voir depuis l'interview d'Almedia la société qui a réalisé ce jeu]

Récemment, l’Agence nationale des usages des TICE publiait un article sur l’utilisation des MMORPG en éducation. Le texte met en lumière quelques études ayant démontré un accroissement de la collaboration entre les apprenants et d’autres effets bénéfiques obtenus en utilisant des jeux sérieux collaboratifs.

Par exemple, dans un cours d’anglais langue seconde, des élèves du primaire de la Corée du Sud ont joué à un jeu de rôle multijoueur éducatif appelé Nori School. Les chercheurs ont vérifié l’efficacité de cet outil par rapport à ceux ne s'adonnant pas au jeu. Ils ont noté non seulement une augmentation de l'entraide et de la motivation chez les enfants, mais ceux-ci avaient aussi des notes plus élevées en écoute, en lecture et en écriture que le groupe témoin ayant suivi un cours magistral.

D’autres recherches effectuées à différents niveaux d’étude (secondaire et universitaire) ont mené à des conclusions similaires. Il n’est donc pas étonnant que certains spécialistes de l’éducation souhaitent que la formation adoptent quelques mécanismes propres aux jeux de collaboration comme les MMORPG. Des observateurs ont d’ailleurs remarqué que la coopération sur Internet, par exemple avec le crowdsourcing, était plus importante lorsqu’elle se présentait sous une forme ludique.

Les limites du jeu collaboratif


Pourtant, l'utilisation en classe des jeux sérieux collaboratifs reste assez faible. Cela s’explique par différents facteurs. Tout d’abord, il y a ceux qui sont liés au matériel. En effet, ces jeux demandent une bande passante assez élevée pour pouvoir afficher l'univers ainsi que les avatars des autres joueurs. Il faut donc pouvoir fournir une connexion à haut débit aux apprenants et s’assurer que tous disposent d'un débit de même qualité hors de l'enceinte scolaire.

Les manipulations dans les mondes persistants sont également problématiques. Si les joueurs réguliers sont habitués à leurs interfaces regorgeant d'informations et connaissent par coeur les fonctions associées aux touches, ce n’est pas le cas de tous les apprenants et enseignants. Utiliser de tels programmes en classe demande conséquemment la mise en place d'une formation pour les néophytes.

Dans ce mémoire écrit par Marc Cheruette (en PDF), quelques titres de serious games collaboratifs sont cités. Par exemple, Simuland qui est une simulation d’entreprise. Ce jeu dont la réussite est largement basée sur la collaboration ne parvient pas vraiment à créer un climat d’entraide. Moins d'un insctit sur cinq répond aux messages. Autant dire que c’est le désert absolu en matière de communication. L’auteur du mémoire signale d’ailleurs qu’il a demandé plusieurs fois de l’aide sans aucune rétroaction de la communauté. Voilà donc un des pièges des jeux collaboratifs : sans une participation active et volontaire des joueurs, leur aspect communautaire s’effondre rapidement. Les MMORPG commerciaux ont remédié à cela en rendant la participation obligatoire. Par exemple, en proposant des quêtes qui ne peuvent être complétées qu’en groupe ou en sollicitant la participation de tous les joueurs d’une région du monde lors d’événements aléatoires. Cela étant suivi bien sûr de récompenses pour les participants.

Dans d’autres cas, la collaboration ne peut se faire que dans un contexte précis. MetaVals est un jeu collaboratif sur la finance où les joueurs doivent individuellement répondre à des questions à choix multiples pour ensuite débattre de 12 items ou phrases entre coéquipiers. ce jeu requiert la présence physique des joueurs ou au moins un environnement de travail en ligne tel que Moodle ou Blackboard. Ceci n’est pas une mauvaise chose en soi, mais le terrain de jeu étant passablement réduit, l’implication des joueurs ne sera pas la même que pour un jeu accessible partout.

Le serious game collaboratif est donc une option viable de solution d'apprentissage, mais il faut s’assurer que les mécanismes de jeu utilisés encouragent les participants à collaborer. Sinon, le jeu reste essentiellement solitaire avec quelques fonctions de communication entre joueurs. Le MMORPG constitue bien un modèle à ce niveau puisqu’il intègre totalement les relations sociales dans l'expérience de jeu.

« Apprendre avec les jeux multi-joueurs, c’est possible », Julien Bugmann pour l’Agence nationale des Usages des TICE, 14 décembre 2011.

Illustration : capture d'écran de Thélème.


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