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Publié le 18 octobre 2011 Mis à jour le 18 octobre 2011

La certification des parcours d'apprentissage libres : une source de revenus pour les universités

L'apprentissage et la certification ne sont pas automatiquement liés. Les universités pourraient aussi certifier ceux qui ont appris par eux-mêmes.

Les systèmes éducatifs modernes sont pris entre deux missions en tension : d'un côté, il leur faut favoriser l'accès du plus grand nombre à la connaissance; d'un autre, ils remplissent une importante fonction de sélection en délivrant à certains seulement des titres et diplômes qui sont censés apporter une plus-value importante sur le marché de l'emploi. 

Le sens commun veut que, depuis la généralisation de l'accès à Internet dans la plus grande partie du monde, l'accès aux informations et aux savoirs ait beaucoup perdu de sa valeur monétaire. En revanche, les titres et diplômes voient la leur augmenter. Les prix exorbitants demandés par certains établissements pour suivre leurs cursus se justifient moins par les contenus des enseignements que par la valeur marchande de leurs diplômes sur le marché du travail. Cette mise en marché de l'éducation, et de l'enseignement supérieur en particulier, engendre de puissantes frustrations chez les perdants du système, c'est à dire chez ceux qui ont beaucoup investi personnellement et financièrement pour s'offrir des études supérieures et se retrouvent ensuite sur le marché du travail avec un diplôme sans valeur marchande. Il n'est que de voir les témoignages des étudiants et anciens étudiants ayant rallié le mouvement Occupy Wall Street (We are the 99 percent) pour réaliser à quel point les promesses des institutions éducatives peuvent s'avérer fausses, car impitoyablement dépendantes de l'état du marché du travail.

D'où la tentation très forte, pour certains apprenants, de faire l'impasse sur l'inscription dans un établissement d'enseignement supérieur et d'exploiter les Ressources Educatives Libres (REL) qui fleurissent sur la toile. Cette tendance est particulièrement marquée chez les adultes en cours d'emploi, qui sont beaucoup plus autonomes dans leurs apprentissages que les étudiants en formation initiale. 

Mais l'utilisation de ces REL (OER en anglais) présente un défaut majeur : elle ne débouche généralement pas sur la possibilité d'obtenir un titre ou diplôme universitaire. Certes, plusieurs universités de renom ont mis à disposition du public sur la toile des ressources de grande qualité; certaines, comme l'Université de Stanford, proposent même des parcours de formation tout en ligne incluant le contrôle continu et l'examen final. Mais dans le cas de Stanford, il est bien précisé que le titre obtenu en cas de succès aux examens sera "une déclaration d'accomplissement", et pas un diplôme de la prestigieuse université... Or, la plupart des adultes en formation continue tient au titre ou diplôme qui lui permettra de progresser dans on métier ou sa carrière. L'utilisation des REL serait-elle donc cantonnée aux apprentissages détachés de tout objectif de certification ?

Ce n'est pas ce que pense Bernd Remmele, professeur d'économie de l'éducation dans une école supérieure allemande, qui publie sur le site elearningpapers un article intitulé "Degrees for Open Learning ?" (résumé en français). Il estime même que les établissements d'enseignement supérieur peuvent gagner de l'argent avec les REL, en permettant aux apprenants de se présenter aux examens après avoir réalisé un parcours libre d'apprentissage avec les REL.

Bien entendu, Bernd Remmele n'est pas naïf et sait qu'il faudra résoudre un certain nombre de problèmes avant de parvenir à cette situation. Mais il estime que c'est tout à fait à la portée des établissements d'enseignement supérieur, qui pourraient proposer un certain nombre de services payants associés aux REL, à l'image de ce que font les entreprises assurant des services autour des logiciels libres. B. Remmele s'appuie sur cet exemple pour affirmer que les valeurs et le mode de production des ressources et produits libres ne sont pas incompatibles avec le secteur marchand. Les producteurs de REL doivent selon lui adopter une démarche orientée client, qui leur permettra tout à la fois d'offrir des ressources plus homogènes, globalement de meilleure qualité, et autorisant un accès plus aisé qu'aujourd'hui à des titres et diplômes.

Son article propose des pistes d'action très concrètes pour les producteurs de REL et les établissements d'enseignement supérieur qui voudraient se lancer dans l'aventure de la certification des parcours libres. Parmi les services marchands à développer autour des REL, on retiendra :

- La description des contenus et modalités d'obtention des diplômes délivrés, et une sélection de REL adaptées (dans le fond et dans la présentation) à ces objectifs;

- Une analyse des REL et leur évaluation collaborative par des enseignants et des apprenants, par le biais d'outils tels que le tagging (adjonction de mots-clés descripteurs des contenus), l'attribution de notes, et la mention de ce qui manque dans les ressources ainsi évaluées, toujours en référence au diplôme visé. Les producteurs de REL pourraient alors tirer profit d'un effet de réputation pour mieux mettre leurs ressources en avant, et améliorer la qualité de celles qui ont été estimées trop faibles par les utilisateurs et les professionnels académiques. 

- La centralisation de REL produites en interne, les ressources étant encore trop souvent dispersées sur plusieurs sites, dont les sites des enseignants par exemple.

- L'autorisation accordée aux apprenants en parcours libres de se présenter aux examens (formation universitaire initiale) et/ou aux certifications professionnelles (formation professionnelle continue et validation des acquis), en se soumettant à des épreuves identiques à celles des étudiants en cursus classique, ou en respectant les procédures de validation des compétences professionnelles déjà fixées dans nombre de pays (France, Grande-Bretagne, Finlande en particulier).

Toutes ces recommandations prennent acte de la mise en marché de l'éducation et de la nécessité pour les établissements d'enseignement supérieur à la fois de trouver de nouvelles sources de revenus et d'assurer, mieux qu'ils ne le font actuellement, l'accès élargi à des ressources d'apprentissage de qualité et à leurs certifications.

Peut-on valider la démarche Open Learning par des certifications ? Résumé en français et accès à l'article original, téléchargeable en .pdf. Elearningpapers, avril 2011.

 


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