Publié le 10 octobre 2011 Mis à jour le 10 octobre 2011
L'information de proximité est une denrée rare en Afrique. C'est le moins qu'on puisse dire au regard de l'offre en la matière. En effet, depuis la libéralisation du paysage médiatique dans les années 1990, à la faveur du mouvement de démocratisation, ce sont les radios et télévisions commerciales à vocation nationale qui tiennent le haut du pavé à côté de la nébuleuse que constituent les radios communautaires, dont les radios rurales. Pareil constat s'applique aussi à la presse écrite dont la zone de couverture et le lectorat potentiel dépassent rarement les grands centres urbains.
Face à cette carence, le journaliste ivoirien Israël Yoroba Guébo a initié en février 2009 Avenue Afrique, une plate-forme d'information citoyenne ouverte à des blogueurs qui traitent de leur quotidien, par des articles, photos et podcasts. Avec le slogan "non loin de chez vous", cette plateforme est déclinée en des versions nationales avec l'indicatif téléphonique des pays : Avenue 225, pour la Côte d'Ivoire, Avenue 228 pour le Togo, entre autres.
En 2010, il récidive dans le domaine de l'information de proximité avec Ouest Afrika Blog, un projet qui vise à "faire découvrir les outils (et utilités) du blogging à des journalistes des radios communautaires. Ceux-là même qui sont (parmi les médias classiques) les plus proches de la population." Ce projet a débouché sur une plate-forme de blogging alimenté par treize journalistes officiant dans des radios communautaires du Burkina-Faso, du Mali, du Sénégal et du Togo.
Le résultat est fort intéressant : des informations locales en forme d'articles, de photos et de podcasts sont publiées sur le site. Ainsi l'attention de l'opinion publique est-elle, par exemple, attirée sur les victimes des inondations de 2009 au Burkina-Faso, notamment celles qui sont relogées à Yagma à une vingtaine de kilomètres de la capitale. On y trouve aussi un portrait saisissant du meunier Mathias dont le métier "lui permet de se nourrir et de s’occuper de son épouse et de son enfant qui sont restés en Côte d’Ivoire", un reportage sur le marché secondaire de Hedzranawé et son célèbre commerce du "prêt-à-porter d'occasion" (friperies). Bref des sujets qui ne trouveront pas forcément de place dans les médias nationaux.
L'association du blogging et de la radiodiffusion communautaire a ceci d'avantageux qu'il renouvelle le journalisme sous plusieurs angles. Nous empruntons cette approche du renouvellement à Philippe Couve, journaliste et expert nouveaux médias qui aborde le sujet dans une présentation.
D'une part, on assiste à un décloisonnement de l'information de proximité qui gagne une audience qu'elle n'aurait jamais atteinte avec le seul support des médias classiques, les radios communautaires, en l'espèce - ce que Couve appelle "l'amplification des signaux faibles".
D'autre part, les journalistes engagés dans cet exercice apprennent à écrire autrement et facilement, loin des contraintes habituelles des formats radios. Ils ont le privilège de converser avec leur lectorat, de disposer des moyens d'insertion de leurs productions journalistiques dans la communauté des blogueurs et s'obligent, après tout, à plus de transparence dans le traitement de l'information.
Autre avantage enfin, et non des moindres, sur les radios communautaires les paroles s'envolent, alors que le blogging fixe les mêmes paroles par des écrits qui restent.
Voir :
Ouest Afrika Blog, l'actualité vue par les radios communautaires
Avenue Afrique, non loin de chez vous.
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