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Publié le 03 octobre 2011 Mis à jour le 03 octobre 2011

Concilier parcours d'études et entraînement sportif de haut niveau

La réussite est un objectif global pour les sportifs de haut niveau qui s'entraînent à l'INSEP. Pas question de laisser les études de côté !

Les athlètes de haut niveau sacrifient-ils leurs études et une partie de leur avenir à l'entraînement intensif et à la compétition ? Pas tous. A l'INSEP (Institut National du Sport, de l'Excellence et de la Performance, établissement placé sous la tutelle du Ministère des Sports, France), la quasi-totalité des 650 athlètes s'y entraînant sont engagés dans un cursus scolaire, universitaire ou de formation professionnelle.

Ces athlètes suivent des cours en classe, et font également largement appel aux cours à distance. Thierry Kinderstuth, membre de l'Unité de Développement Numérique (UDN) de l'INSEP et administrateur de la plateforme SportEEF, nous décrit les dispositifs mis en place pour ces étudiants particuliers.

Thierry Kinderstuth, pourquoi avoir créé une plateforme d'e-learning pour les athlètes s'entraînant à l'INSEP ?

Parce que nous accordons à l'INSEP une grande importance au parcours scolaire, universitaire et de qualification professionnelle des athlètes, qui devront interrompre leur carrière sportive après une dizaine d'années seulement. Or, les contraintes de l’entrainement moderne rendent ces athlètes de moins en moins disponibles pour les études : voici 10 ou 15 ans, un sportif de haut niveau était mobilisé pour les compétitions, stages de préparation, etc. environ 50 jours par an. Actuellement, on arrive selon les disciplines à un nombre compris entre 100 et 200 jours d'absence. Ce constat nous a conduits à d'importants aménagements des horaires et des modalités de suivi d'études.

Les athlètes accueillis à l'INSEP suivent des cours en classe ou à l'université, comme la plupart des jeunes de leur âge ?

Oui, ils ont 4 heures de cours réparties en deux plages sur 5 jours par semaine, alternant avec les plages d'entraînement. Mais quand ils sont hors du Campus ou doivent s'entraîner plus intensivement (c'est le cas actuellement, car nous sommes en période pré-olympique et nos meilleurs athlètes sont particulièrement mobilisés par les épreuves de qualification, leurs entraînements), nous aménageons leurs horaires d'études et surtout, nous leur proposons des cours à distance qu'ils peuvent suivre le soir, pendant leurs brèves périodes de repos ou même pendant leurs échauffements. Ils peuvent par exemple écouter les cours sur leur lecteur MP3 s’ils le souhaitent...

En somme, vos athlètes sont soumis aux mêmes contraintes que les étudiants adultes qui doivent concilier leur formation avec leurs obligations sociales et professionnelles...

Non, c'est bien pire ! La préparation des grandes compétitions les mobilise totalement. Mais nos athlètes ont une volonté, une motivation que je n'ai rencontrée chez aucun public, même quand je travaillais pour des entreprises du privé telles que HFM (Groupe Hachette) ou Comptanoo.

Comment tiennent-ils ce rythme effréné ? Comment parviennent-ils à se motiver pour étudier l'économie, l'anglais... à la veille d'un championnat d'Europe ou du monde ?

Leur motivation est énorme et elle est soutenue par toute l'équipe qui les encadre. Pour arriver au niveau de performance qui est le leur, les sportifs que nous accueillons ont appris une chose essentielle : ils font confiance. Ils font confiance à leur entraîneur, à leur préparateur physique, ils travaillent en parfaite collaboration avec eux, car ils savent que cela les mènera à donner le meilleur d'eux-mêmes. Je retrouve chez eux le même investissement dans les personnes qui les accompagnent dans leurs études. C'est un phénomène rare, exceptionnel, même. 

Mais ne sont-ils pas tentés parfois de mettre leur scolarité entre parenthèse, pour profiter au mieux de ce qu'ils préfèrent finalement, à savoir l'entraînement et la compétition ?

Cela leur arrive, bien sûr. Mais mes collègues sont là pour faire le point avec eux et leur redonner confiance quand ils flanchent. Et les sportifs s'aperçoivent eux-mêmes que la réussite est une notion globale : s'ils ont de bons résultats sportifs, alors ils ont toutes les chances de réussir dans leurs études. L'inverse est vrai également. Par exemple, on en voit certains qui compensent une blessure physique qui les empêchent de s'entraîner pendant un certain temps par un investissement plus fort dans les études. Ils ne lâchent jamais. Ces jeunes ont un mental exceptionnel, ils se mettent vraiment en position de réussite, dans tous les aspects de leur vie.

Et les résultats sont au rendez-vous ?

Oui. En 2011, par exemple, 38 sur 39 candidats ont  réussi au Bac. Les trois-quarts d'entre eux réussissent brillamment leurs études universitaires et leurs examens professionnels. J'ai encore en mémoire l'exemple de cette jeune femme qui, la même année, a été consacrée championne du monde de pentathlon moderne et est arrivée – de mémoire – 15ème au CAPEPS.

Et même quand certains athlètes abandonnent leurs études, nous essayons de les récupérer par la formation professionnelle continue, à la fin de leur carrière sportive. Nous nous efforçons de les suivre jusqu'au bout.

Parlons maintenant de SportEEF. C'est une plateforme de e-learning ?

Oui, mais pas seulement. La plateforme est à la base le LMS proposé par Futurskill mais grandement adapté à nos besoins, notamment de mutualisation des contenus. Celle-ci est intégrée dans une suite Sharepoint, qui propose des ressources et des espaces d'échanges non seulement aux athlètes en cursus, mais aussi aux encadrants de l'INSEP et des fédérations sportives, aux cadres du Ministère des Sports et plus globalement à tous les membres de notre réseau élargi, ce qui inclut notamment les instituts sportifs de 6 pays membres de la CONFEJES. Nous avons également une solution de visio-formation pour les classes synchrones et l’accompagnement à distance (Elluminate Live ! repris depuis peu par Blackboard). Nous utilisons également Readspeaker comme générateur de sons pour d’une par nos athlètes déficient visuels, nos cours de langues, et d’autre part la sonorisation des contenus de cours médiatisés. Nous avons également Canal-Sport (Libcast), notre outil de vidéocasting qui propose des chaînes thématique à vocation pédagogique aux enseignants et demain à chacun de nos athlètes via un blog vidéo.

Tous ces outils sont mis à disposition des fédérations sportives et des CREPS (Centres régionaux d'éducation physique et sprotive, voir par exemple ici le CREPS Ile-de-France) qui entraînent les jeunes athlètes en régions. SportEEF est un dispositif ouvert aux membres de notre réseau quelle que soit leur origine du moment que leur activité est liée au sport. Nous encourageons la mutualisation des contenus. Les formateurs peuvent déposer leurs contenus sur la plateforme et les partager à leur guise : avec leur seule fédération, avec l'ensemble du monde sportif... ou même les conserver pour leur seul usage. Nous avons présenté ce dispositif lors de la Nuit de la Formation professionnelle et nous avons gagné le prix de la meilleure stratégie 2011.

Quels cours sont accessibles aux athlètes accueillis à l'INSEP ?

La quasi-totalité des cours dispensés en présence est accessible sur la plateforme. C'est indispensable car les sportifs ne suivent pas tous le même calendrier, celui-ci est évidemment tributaire de leur discipline : le cycliste n'a pas le même calendrier que le tennisman, etc. Les classes ne sont donc jamais complètes et chacun doit pouvoir rattraper ses cours. Selon les délais, les enseignants, nous réalisons des captations vidéos des cours, nous sonorisons les textes (pour qu'ils puissent être écoutés). La plate-forme offre aux enseignants des outils intégrés ou non de rapid learning pour médiatiser leurs cours.

Nous avons également de vrais dispositifs hybrides de formation, en particulier pour le supérieur. Certains modules transversaux ne sont accessibles qu'à distance. Et enfin, nous offrons quelques formations tout à distance. Mais ces dernières sont plutôt faites pour les sportifs en fin de carrière qui sont dispersés sur le territoire national, dans une perspective de reconversion. Dans ces formations, nous aménageons quand même une ou deux périodes de regroupement par an, pour créer une cohésion de groupe.

Qui sont les enseignants qui assurent ces cours et ces formations ?

Le SFAE – Service de Formation et d’Accès à l’Emploi est constitué d’une équipe d’enseignants  à laquelle s’ajoute des intervenants selon nos besoins et les enseignants des lycées avec lesquels nous sommes en convention pour dispenser des cours dans nos locaux. L’INSEP signe des conventions avec les établissements du supérieur pour les formations STAPS, Management des organisations sportives, tout en dispensant les cours afférents. Enfin nous proposons les titres relevant du Ministère des Sports comme les BP JEPS, les DE JEPS et DES JEPS. Et j'insiste sur le fait que s'il y a bien une adaptation du rythme et des modalités d'apprentissage, les programmes de l'éducation nationale et des formations supérieures sont strictement respectés. 

Concevez-vous tous vos contenus ?

Nous avons d'importants moyens techniques, et une équipe de 8 personnes dans l'unité de développement numérique, ce qui nous permet de créer de nombreux contenus. Par exemple, nous travaillons beaucoup à partir des vidéos de matchs ou de compétitions. Nous pouvons monter les vidéos et indexer les moments les plus intéressants, qui seront réutilisés dans les cursus d'études sportives et lors des entraînements. Mais nous achetons aussi du contenu sur étagère et travaillons en partenariat pour des produits très médiatisés. Nous réalisons un serious game sur la communication des sportifs avec les médias, en partenariat avec Onlineformapro . Nous sommes pilote sur un projet européen pour concevoir des cours de langues (anglais) spécifiques aux activités sportives – Projet TESS.

Pour finir, vous diriez que vous êtes parvenus, à l'INSEP, à assurer une bonne complémentarité entre parcours sportif et parcours d'études ?

Les sportifs qui entrent à l’INSEP sont présentés par leurs fédérations respectives et s’engagent dans un double projet entrainement et formation. Alors oui. Comme je vous le disais, le sportif de haut niveau entretient un état d'esprit qui lui permet d'être bon dans différents domaines. A nous d'accompagner ceux qui connaissent des moments de doute. Tous savent parfaitement que la carrière sportive est courte, qu'après surviendront les questions d'emploi, d'usure physique, qui impliquent de penser très tôt à la reconversion. En s'y préparant de bonne heure, les athlètes ont toutes les chances d'accéder à des métiers qui leur plairont, dans lesquels ils pourront utiliser toutes les qualités qu'ils ont développées pendant leur carrière sportive, et en développer de nouvelles.

 

A consulter :

Le site de l'INSEP  

Présentation de l’UDN, unité de développement numérique

SporEEF, la plateforme de l'INSEP. Page d'accueil, accès réservé.

Canal-insep, le portail vidéo de l'INSEP 

SportEEF sur Twitter et sur Facebook

 

Photo : Thierry Kinderstuth, avec son aimable autorisation

 

 

 

 


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