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Publié le 14 mai 2011 Mis à jour le 14 mai 2011

À l'heure des réseaux sociaux, à quoi servent les conférences et les colloques ?

Est-il réellement utile d'organiser des rassemblements en présence, alors que leurs participants sont déjà hyperconnectés sur la toile ?

Quelques semaines après avoir assisté à la conférence internationale 21st Century Learning, organisée à Hong Kong en février 2011, Jabiz Raisdana, enseignant en Indonésie, a écrit un billet de blogue rageur, dans lequel il exprime son agacement devant ces conférences internationales organisées à grands frais, qui ne lui apportent pas grand chose, en dehors du plaisir de rencontrer en face à face les personnes avec lesquelles il échange réguièrement sur la toile.

Les conférences sur les Tice : d'éternelles introductions

Selon J. Raisdana, ces conférences dédiées à l'utilisation des nouvelles technologies en enseignement et formation creusent toujours le même sillon : celui de l'introduction, de la réflexion de base, et s'adressent avant tout à ceux qui n'utilisent pas encore les Tice. Rien d'innovant, rien de stimulant là-dedans, lorsqu'on est déjà un praticien convaincu, se plaint-il. Et, plus de 20 ans après l'introduction des Tice dans les classes poursuit-il, en est-on encore à essayer de persuader les enseignants de les utliser ? N'avons-nous pas parcouru du chemin ?

"Je suis préoccupé par le fait qu'en 2011 nous soyons toujours en train d'essayer de convaincre les enseignants et les administrations qui gèrent les écoles qu'il faut utiliser les technologies dans les classes, comme si nous avions le choix. Je ne peux même pas imaginer la frustration des éducateurs qui sont investis dans l'utilisation des technologies depuis plus longtemps que moi. Comment pouvez-vous écouter, ou pire encore, présenter une communication de plus expliquant que l'apprentissage change et que l'Internet peut être un puissant outil d'apprentissage ? Je suis gêné par le fait que nous soyons encore en train de débattre sur comment et pourquoi utiliser des ordinateurs en classe, que nous ayons encore des sessions pour débutants sur les blogs, ou que nous devions encore réfléchir à la nécessité d'enseigner différemment". 

On reconnait là la frustration de ceux qui dépensent beaucoup d'énergie à changer leurs façons de faire professionnelles sans reconnaissance institutionnelle. On reconnaît aussi le dépit de se déplacer, parfois fort loin, et de perdre son temps, en découvrant un peu trop tard que la conférence ne tient pas ses promesses. 

Les réseaux sociaux numériques plus efficaces que les conférences pour s'informer et se former

J. Raisdana va plus loin et pose la question qui fâche : à quoi servent ces conférences aujourd'hui, alors que nous pouvons obtenir autant et même bien davantage d'informations par le biais des réseaux ? "A l'époque des réseaux d'apprentissage professionnel, que pouvons-nous apprendre d'une conférence que nous ne pourrions apprendre de Twitter ou de notre fil RSS ?". Car ceux qui ne se contentent pas de débattre et de réflechir, ceux qui intègrent les technologies en classe n'attendent pas après les conférences pour faire le point sur leurs pratiques et échanger. Ils créent des communautés de pratiques en ligne et sont en contact permanent les uns avec les autres. Ils n'assistent aux conférences que pour se rencontrer en face à face et renforcer ainsi leurs liens, et pour sortir de leur environnement routinier de travail. Coment pourraient-ils faire davantage, alors que les conférences, année après année, reprennent toujours l'antienne du chagement "à venir" alors qu'il est déjà là et qu'il suffit juste d'en prendre sa part ? J. Raisdana fait des suggestions assez radicales et peu réalistes pour changer es choses : dans les pays où les chefs d'établissements ont la maîtrise du recrutement des enseignants, ils devraient imposer l'usage des Tice et refuser les candidatures de ceux qui ne veulent pas s'y mettre. Ce qui ne règle en rien la question de la qualité des conférences.

L'urgence de repenser les rassemblements en présence

Les très nombreux commentaires à ce billet en revanche s'attaquent à ce problème : plutôt que de supprimer les conférences, améliorons-les. Réduisons drastiquement le nombre de présentations agrémentées ou pas de diaporamas, qui laissent les gens dormir sur leur chaise ou vivre leur vraie vie sur les réseaux grâce à la connexion wifi; organisons des ateliers pratiques dans lesquels les plus avancés aideraient les débutants plutôt que des présentations animées par des conférenciers arrogants qui veulent montrer qu'ils ont tout compris; prenons modèle sur les barcamps, généralisons la pratique de l'educamp; donnons les textes des communications à l'avance aux participants, et réservons le temps de présence aux débats; limitons le nombre d'ateliers et de communications, pour laisser aux participants le temps de se rencontrer, de participer à des ateliers long, de débattre, plutôt que de courir d'un événement à l'autre.

Car tous les commentateurs reconnaissent les deux points suivants.

- Telles qu'elles se présentent dans la grande majorité des cas, les colloques et conférences ont perdu leur légitimité et leur organisation même est contradictoire avec les contenus qui y sont distribués : comment peut-on en effet affirmer que les informations et les savoirs sont accessibles toujours et partout par le biais d'Internet, que l'apprenant est de plus en plus autonome dans la construction de ses apprentissages et que l'institution n'est plus l'unique source des savoirs, et en même temps distribuer le savoir via des rencontres en face à face, peu ou pas interactives, en réunissant des centaines de personnes en un lieu unique ? Comment défendre la dynamique de formation tout au long de la vie et continuer à évangéliser le bon peuple avec des interventions pour débutants, comme si les participants n'étaient pas capables, entre deux conférences, de progresser ?

- Mais les conférences restent des lieux de rencontre irremplaçables. Elles permettent aux participants de mieux se connaître, stimulant en cela la motivation et l'envie de faire ensemble, ou au moins de poursuivre dans une même direction. A contrario, le participant à une conférence qui n'y rencontre personne de connaissance a souvent l'impression d'arriver dans une nouvelle école le jour de la rentrée, pour reprendre la jolie métaphore d'un autre billet de J. Raisdana.

Il convient donc de reconnaître l'intérêt des conférences en termes de socialisation et de renforcement des réseaux professionnels, et de renouveler profondément les modes de distribution des contenus. Nous connaissons bien ce défi : c'est celui que l'enseignement et la formation doivent relever.

Et si on organisait une conférence pour en parler ?

21st Century Learning Conference in Hong Kong. Jabiz Raisdana, Intrepid Teacher, 22 février 2011

Une conférence qui tient ses promesses, à laquelle J. Raisdana a assisté un peu plus tard : Learning 2.011 Are You Coming ?

Illustration : Conference Hall / Phil Whitehouse / CC BY 2.0

 

 

 

 

 



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