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Publié le 09 novembre 2010 Mis à jour le 09 novembre 2010

Les communautés informatiques virtuelles, un exemple d'apprentissage mutuel à suivre

Les mordus d'informatique seraient-ils plus altruistes que la moyenne des gens ? On peut le croire, tant leur propension au partage est grande. Nous n'aurons pas la naïveté de penser que tout chef de projet dans une grosse entreprise d'informatique est prêt à faire don à la communauté des dernières trouvailles de son laboratoire de création; néanmoins, il existe un immense réseau de formation mutuelle et de partage des savoir-faire en informatique, dont la partie visible est constituée des communautés en ligne accessibles au grand public.

L'absence de formation académique pousse à la mutualisation

Les geeks, comme on les appelle, n'ont pas vraiment le choix : pour eux, c'est partager ou mourir. Leur domaine d'activité évolue si vite, la concurrence est si rude, les projets sont d'une telle ampleur, qu'ils ne peuvent attendre la création de cursus de formation spécialisés et dûment homologués pour apprendre. Ils doivent impérativement faire appel à leurs pairs pour progresser. On ne compte plus les parcours de réussite d'informaticiens formés sur le tas, c'est à dire souvent sur le web, en-dehors de toute structure académique. De plus, la complexité et la surface des projets est telle que leurs responsables doivent impérativement s'appuyer sur une communauté fournie de développeurs pour rester à flot, c'est à dire coder, débugger, tester... en permanence. En la matière, le modèle de l'open source est exemplaire. Le site Framasoft par exemple, associe systématiquement un forum aux logiciels libres présentés dans son annuaire (voir l'exemple de Notepad++) . Ce modèle a été repris par de nombreuses entreprises commerciales, à commencer par l'une des plus grosses d'entre elle, Microsoft, qui désormais confie une large part de son assistance à utilisateurs aux communautés spécialisées.

Partager un document, un savoir-faire, un cours complet...

Les étudiants en informatique partagent volontiers leur documentation, comme on peut le voir sur le site Doc étudiant.fr . En guise de test, rendons-nous sur la page consacrée aux réseaux informatiques : Ce n'est pas une, ce ne sont pas dix, ni trente pages de documents mis librement à disposition qui nous attendent mais... 132. Cent-trente-deux pages de documents : cours, exposés, mémoires, rapports et articles divers. Encore ce domaine n'est-il que l'un des dix que compte la grande thématique informatique.

Ceux qui ont des questions précises à poser à la communauté des informaticiens pourront se rendre sur Evalu.it. Là, plus de 10 pages de questions-réponses montrent l'ampleur de la dynamique. Les questions sont classées en une dizaine de catégories; on peut aussi accéder directement aux questions résolues (sorte de FAQ géante), et à la liste de ses propres questions. Vodeclic n'est pas une organisation philanthropique, mais une entreprise commerciale, qui vend de la formation informatique à distance. Mais elle propose malgré tout 522 vidéos-formations gratuites, en guise de produit d'appel, et a parfaitement utilisé la logique de partage développée dans le secteur informatique pour faire sa promotion.

A un niveau encore supérieur, on trouve les incontournables cours du Site du Zéro. Près de 800 cours sont actuellement proposés, en accès gratuit, la majorité d'entre eux étant en outre disponible sous licence Creative Commons. La communauté compte plus de 200 000 membres, dont une poignée de passionnés alimente le site en nouvelles et en cours. Créé par Mathieu Nebra en 1999 alors qu'il n'avait que 13 ans, Le Site du Zéro a conservé son esprit initial de mise à portée de tous des aspects techniques de l'informatique, de manière à ce que tout un chacun puisse produire et pas seulement utiliser. L'organisation communautaire est impressionnante. 13 administrateurs, 12 modérateurs, 6 rédacteurs (newsers) et 22 validateurs se partagent la tâche énorme d'animer le site, de vérifier ce qui y est déposé par les membres et de guider les échanges. Le résultat est là : des cours par centaines, tous organisés de la même façon, une remarquable unité de ton, et un forum associé à chaque grande thématique de cours. Il y a fort à parier que, quel que soit votre problème avec Linux, le langage C ou le PHP, vous trouverez une réponse sur le Site du Zéro. Le succès est tel que les créateurs du site lui ont adjoint une société commerciale qui édite les cours les plus populaires et fournit de la formation aux entreprises, sans pour cela renier leur philosophie de base qui est de rendre les savoirs informatiques accessibles au plus grand nombre, gratuitement. Le Site du Zéro proposera très bientôt des cours de maths et de physique-chimie. Parions que le succès sera aussi grand qu'avec les cours d'informatique.

Impossible d'achever ce très rapide tour des communautés informatiques accessibles au grand public sans évoquer Comment ça marche, initialement forum d'entr'aide informatique, qui a décliné le principe de base dans différents domaines (médecine, droit et finances, cuisine...) et s'affirme désormais comme un média polyvalent tout en conservant sa fonction première de forum.

Des cours appuyés sur des communautés, dans tous les domaines d'éducation ?

Ces quelques exemples sont porteurs d'enseignements pour le domaine de l'éducation :

  • La communauté est d'autant plus active que rien à l'extérieur ne répond exactement à son besoin;
  • Elle fonctionne en auto-régulation, sans instance tierce, et fixe ses propres règles;
  • Les cours proposés sont toujours associés à des forums qui permettent de personnaliser les relations et les apprentissages.
  • Il n'y a pas d'incompatibilité entre le fait de fournir un service de qualité gratuitement et et de vendre des prestations dérivées, les secondes s'appuyant sur la notoriété et la légitimité du premier pour trouver leur clientèle.
  • Le temps joue en faveur des communautés : celles-ci ne se sont pas créées en un jour, et le maintien d'un haut niveau de qualité (et donc, l'investissement des membres les plus actifs) incite de nouveaux membres à la rejoindre.
  • La convivialité s'accommode parfaitement de la distance.

Nous avions, voici quelques semaines, rendu compte d'un rapport européen traitant des communautés virtuelles d'apprentissage et de ce que ce modèle peut apporter aux systèmes éducatifs formels. Les communautés informatiques confirment l'intérêt de l'apprentissage mutuel et auto-régulé. Certes, les informaticiens et autres geeks disposent d'un avantage de taille par rapport aux spécialistes d'autres domaines : leur outil de communication est bien souvent aussi leur objet de travail. Mais aujourd'hui, à l'heure de l'Internet généralisé, on ne voit pas pourquoi tous les domaines d'enseignement ne pourraient s'inspirer de leur expérience.

Photo :
1 : Lawrence Berkeley National Laboratory, Flickr, licence CC;

 


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