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Publié le 11 mai 2010 Mis à jour le 11 mai 2010

Vigie-Nature, tous ensemble pour la connaissance de la biodiversité

Observation de la nature et participation

Nous en parlions ici-même, les sciences participatives sont en vogue. En France, le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) est en pointe, avec son projet Vigie-Nature piloté par le département Ecologie et gestion de la biodiversité. Nous avons rencontré Marine Legrand, chargée de mission et responsable des relations avec les régions pour ce projet.

Décrivez-nous Vigie-Nature...

Vigie-Nature est une initiative d’observatoire de la nature qui fait participer le grand public. Ce projet permet de connaitre la dynamique des communautés végétales et animales, c’est-à-dire l’évolution du nombre d’espèces vivant au même endroit, à l’échelle nationale. Ce projet est coordonné par des chercheurs du MNHN en partenariat avec des associations naturalistes. Il est né il y a 20 ans avec le programme de Suivi temporel des oiseaux communs (STOC). Romain Julliard, le coordinateur scientifique, a ensuite étendu Vigie-nature à d’autres groupes d’animaux comme les chauves-souris, les papillons, les escargots, les bourdons, les insectes pollinisateurs ainsi qu’à des végétaux et surtout à un plus large public d’observateurs.

Mobilisation sur la sauvegarde de la biodiversité : tout le monde est concerné

Quel est ce plus large public d'observateurs ?

Une partie de nos programmes s’adresse à des naturalistes qui ont des connaissances poussées en observation de la faune ou de la flore. Par exemple, STOC s’adresse à des ornithologues confirmés, qui savent reconnaître des oiseaux à leur chant ou en vol. L’Observatoire de la biodiversité des jardins s’adresse à un plus large public de bénévoles, qui récoltent des données près de chez eux. Cet observatoire est une composante originale, puisqu'il s'agit d'une initiative participative nationale, coordonnée par une équipe de recherche, qui vise une surveillance de long terme. Pour les papillons, nous comptons 3 500 jardins observés (soit environ 200 000 papillons comptés chaque année) et pour les chauves-souris, 300 sites suivis. Pour la flore, 2009 était la première année avec 70 sites, un chiffre en augmentation cette année. Troisième profil d’observateurs : les gestionnaires d’espaces verts (parcs, jardins en ville, milieux forestiers) qui peuvent ainsi comparer leurs données avec celles de leur région et connaître l’impact de la gestion de ces sites.

Qu'apportent ces observations ?

Elles ont d’abord un but scientifique : faire de la recherche en écologie sur l’évolution de la biodiversité en fonction du changement climatique ou des pratiques humaines comme l’agriculture. Le grand nombre d’observateurs permet de collecter des données sur de nombreux sites pour un suivi quantitatif chaque année. Mais Vigie-Nature a un deuxième objectif, tout aussi important, qui est de mobiliser le public sur les questions de biodiversité. En participant à ces observatoires, les bénévoles enrichissent leurs connaissances sur la biodiversité, se forment à l’observation naturaliste et la mettent en relation avec leur pratique du jardinage. En prenant compte des contraintes des uns et des autres et en construisant des projets ludiques et avec un intérêt scientifique, on crée un dialogue entre la communauté scientifique et les acteurs de la société.

Concrètement, comment se tissent ces relations ?

A chaque projet, nous mettons en place un tandem entre un coordinateur qui fait partie de notre équipe de recherche et une ou plusieurs associations qui assurent l’animation des réseaux d’observateurs. Parmi ces dernières : Association Noé pour la biodiversité des jardins, Tela Botanica pour Vigie-Flore, l’Office pour les insectes et leur environnement (OPIE) pour le suivi photographique des insectes pollinisateurs (Spipoll), la LPO et des associations ornithologiques régionales pour STOC, l’association des Lépidoptéristes de France (ALF) pour le Suivi temporel des Rhopalocères de France (STERF)… Avec ces associations, nous accompagnons les particuliers et les collectivités (communes, villes, régions) dans leurs projets. Celles-ci souhaitent monter des observatoires pour suivre la biodiversité sur leur territoire et mobiliser leur population sur ces enjeux.

Que font les observateurs sur le terrain ?

Pour STOC, les observations consistent, deux fois par printemps, à aller sur des sites précis pour dénombrer tous les oiseaux vus et entendus dans des carrés de 2 km de côté. Dans le cas des papillons, on fournit aux observateurs des outils pour identifier dans leur jardin 28 espèces ou groupes d’espèces facilement reconnaissables. Pour les chauves-souris, nous organisons des stages de formation entre observateurs, afin d’apprendre à utiliser un matériel d’enregistrement des ultrasons et à décrypter les sonagrammes. Un peu plus technique mais très facile à maîtriser.

Des protocoles d'observation simples, des résultats concrets

Est-ce que le recours aux amateurs ne fausse pas les observations ?

Dans le cas de STOC, les observateurs connaissent très bien les espèces, on a donc très peu d’erreurs. Dans le cas des observatoires grand public, nous construisons nos protocoles avec les observateurs, pour que les questions soient simples et adaptées à leur niveau. En fin de compte, nous avons un taux d’erreurs de seulement 5 %. Et il est facile d’éliminer certaines erreurs évidentes. Par exemple, connaissant la phénologie des espèces, c’est-à-dire les moments de l’année où elles sont présentes, on peut mettre de côté des identifications qui ne collent pas avec la saison.

Ce projet a-t-il des résultats concrets ?

Depuis 20 ans, le programme STOC donne des résultats très intéressants sur la réponse des communautés d’oiseaux au changement climatique, aux pratiques agricoles, etc (voir par exemple les bilans nationaux). Les autres projets commencent à porter leurs fruits. Nous produisons régulièrement des bilans à destination des observateurs, pour qu’ils sachent à quoi leurs données ont servi. Nous communiquons également ces informations aux collectivités locales pour appuyer leur politique environnementale. Et nos résultats sont mis en commun avec ceux d’autres pays, pour construire des indicateurs européens. Pour les oiseaux, il s’agit du European Bird Census Council et pour les papillons du Butterfly Conservation Europe.

Quelle est la place d’internet dans vos activités ?

Nous utilisons internet pour transmettre les données d’observation, soit avec des outils de saisie en ligne soit avec des logiciels qui génèrent des fichiers que les utilisateurs envoient par mail. En 2008, nous avons proposé de prendre en photo un couple fleur/papillon et nous l’envoyer tout en donnant les noms. Nous avons eu 5 000 photos. Dans cette lignée, nous lançons le Spipoll à la fin du mois.  Les photographes se posteront devant un massif de fleurs de leur choix et prendront en photo tous les insectes pollinisateurs qui se posent dessus, pendant au moins 20 minutes. Ensuite, ils identifieront les insectes à l’aide d’un outil en ligne ludique. Les photos seront téléchargées sur un site internet communautaire où il sera possible de les comparer avec celles des gens qui habitent la même commune par exemple. Des experts aideront pour les identifications difficiles.

Quels sont vos futurs projets ?

Nous allons bientôt nous intéresser aux zones humides, avec des observations d’amphibiens (crapauds, grenouilles, tritons, salamandres), d’odonates (libellules) et de la flore de ces milieux. En parallèle du suivi des chauves-souris, nous souhaitons également lancer celui des orthoptères (sauterelles, cigales, criquets) détectables par les ultrasons qu’ils émettent. Pour étendre le STOC et le Suivi hivernal des oiseaux des champs (SHOC) au grand public, nous voulons également mettre en place un observatoire des oiseaux de jardin accessible à tous.

Lescteurs naturalistes habitant en France, n'hésitez pas à consulter le site de Vigie-Nature et à participer aux observations !

 


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