Laure Endrizzi, chargée d’études et de recherche à la cellule Veille scientifique et technologique de l’INRP à Lyon, publie une excellente étude portant sur le fonctionnement d’une communauté virtuelle.
« La communauté comme auteur et éditeur : l’exemple de Wikipédia» présente les principes de fonctionnement et éventuellement de succès de la plus connue de ces communautés.
À ce stade-ci de son évolution, on constate que l’expertise éditoriale de Wikipedia et l’essentiel de son activité consistent en la normalisation, la dynamisation, l’arbitrage et la validation des contenus.
Quelques extraits :
Un objectif commun et des principes fondateurs
La dynamique éditoriale s’appuie bien évidemment sur ces outils fournis par le wiki, mais repose également sur quelques principes clés, édictés dès l’origine, qui conditionnent les échanges :
- Wikipédia est une encyclopédie;
- le respect des règles de savoir vivre dans le processus de rédaction collective (Wikiquette) ;
- le respect du copyright et la licence libre GNU GFDL (general free documentation licence) ;
- la neutralité de point de vue (neutral point of view ou NPOV).
Le rôle des pages de discussionParmi ces outils, les «talk pages» semblent occuper une place privilégiée. Alors que Stvilia et al. (2005) analysent les critères de qualité discutés par les participants dans ces pages, Emigh et Herring (2005) montrent que les échanges qui s’y tiennent sont fortement marqués par le respect de la neutralité de point de vue (NPOV) et participent pleinement à cette tension vers l’«horizon encyclopédique» (Levrel, 2005).
Selon Viégas et al. (2007), les pages de discussion jouent un rôle qui va bien au-delà de la résolution des conflits d’édition mise en évidence dans leurs précédents travaux (2004), contribuant plus globalement à la dynamisation et à la gestion de l’activité d’édition.
- 50% des messages postés sur ces pages correspondent clairement à une explicitation des mises à jour effectuées ou des améliorations à apporter : elles servent donc à la fois à coordonner et à planifier l’activité.
- 10% s’apparentent davantage à des demandes d’information de la part de contributeurs qui pointent les faiblesses de tel ou tel article sans véritable intention éditoriale.
- 8% font référence aux règles et conventions officiellement entérinées par la communauté, assumant alors une fonction pédagogique régulatrice.
Ceux qui fréquentent Wikipédia- 90% des utilisateurs sont des clandestins : ils lisent, observent mais ne contribuent pas
- 9% sont des contributeurs occasionnels, dont les priorités sont extérieures à la communauté
- 1% sont des contributeurs actifs, responsables de la grande majorité des contributions et démontrant pour certains un phénomène d’addiction.
On montre que les utilisateurs qui apportent le contenu ne sont pas des contributeurs actifs, et pour une proportion non négligeable, ne se donnent même pas la peine de créer un identifiant. Ils sont intervenus en moyenne sur une dizaine d’articles, généralement liés à une même thématique.
Se profile alors le modèle suivant, dont la similitude avec l’édition traditionnelle est évidente : un «outsider» édite l’article pour ajouter du texte, puis les «insiders» interviennent à plusieurs reprises pour faire des modifications mineures, reformater l’article ou bien l’affecter à une catégorie, une liste, etc. : actions que seules les personnes impliquées dans le projet peuvent accomplir.
Alors que les «outsiders» fournissent le contenu, les «insiders» comptabilisent la majorité des révisions.
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