On peut ne pas être d’accord sur les moyens qu’il a utilisés, mais un fait demeure : le Che a pris responsabilité et parti contre des états de faits inacceptables, d’où la citation.
En formation à distance nous avons une responsabilité, celle d’amener l’éducation là où les gens en ont besoin. L’inacceptable, en éducation, c’est qu’il y ait des milliards de gens -- pas des millions, des milliards -- qui soient toujours analphabètes. Et d’autres milliards pour qui l’éducation s’arrêtera trop tôt pour qu’ils puissent prétendre à une quelconque prise sur le monde ou à une capacité d’action d’envergure.
Chercher de l’eau, moudre le grain, vendre à l’étal... : voilà les horizons sous leurs yeux.
Amener l’éducation là où les gens en ont besoin
Nous proposons actuellement une formation à distance médiatisée par les nouvelles technologies qui, dans la majeure partie du monde, n’a rien à voir avec les besoins réels.
Il n’en tient pourtant qu’à nous d’adapter nos approches à la réalité : plusieurs initiatives d’envergure ( 1 )( 2 ) pour implanter des centres d’accès à la technologie au niveau local sont actuellement en cours. Mieux encore, on considère même, dans certaines régions, le développement de contenus correspondants aux besoins exprimés par la population. Ces actions constituent déjà un niveau intermédiaire dans la prise de contrôle des nouvelles technologies.
Technologiquement, nous le savons, presque tout est possible. L’impossible à exiger est donc ailleurs.
Le modèle de l’Escuela radiophonica Santa Maria [1] nous en donne une idée : plus de 60 000 étudiants formés annuellement à distance avec un budget de quelques centaines de milliers de dollars. Pas d’ordinateurs prévus tant que les communautés locales ne pourront en assumer l’opération ou l’entretien. Le téléphone abordable et accessible dans chaque communauté sera déjà un grand progrès.
La-bas on a compris. On a compris que l’on a beau installer des pompes à eau à moteur, si on n’a pas les sous pour payer l’essence, le mécanicien ou l’entretien, on va régresser au puits et au seau à la première panne. Les ordinateurs sont des technologies aussi sophistiquées.
Exigeons des technologies assumables, simples et fonctionnelles. Travaillons à ce que LES TECHNOLOGIES SOIENT PRISES EN CHARGE LOCALEMENT ET RAPIDEMENT. Toute «solution» technologique qui ne rencontre pas ces critères devrait être impitoyablement écartée tant que la possibilité et les conditions pour l’assumer ne seront pas présentes. Ainsi pourrons-nous nous attaquer aux vrais problèmes et cesser de croire à la toute puissance magique de la technologie.
Au Québec, dans les quartiers défavorisés des villes, on a admis qu’il était quasi impossible d’enseigner à des élèves qui ont faim. On leur offre maintenant l’équivalent d’un petit-déjeuner à leur arrivée à l’école. Il est vrai qu’il y a alors moins d’argent pour les ordinateurs, mais les enfants sont présents et peuvent ainsi apprendre quelque chose.
Oui, soyons réalistes, exigeons l’impossible : exigeons des programmes de financement et d’aide à l’éducation à distance qui considèrent la prise en charge des technologies dans leurs critères de subvention. Exigeons des produits assumables localement. Exigeons des solutions qui correspondent aux besoins des gens.
Soyons réalistes : nous savons que nous contenter de moins ou d’autres choses mènera au chaos. L’impossible est uniquement dans nos esprits et dans nos attitudes. Exigeons l’impossible et obtenons-le.
Denys LamontagneRédacteur en chef
[1] Réf.:
An alternative pattern of Basic Education
: Radio Santa Maria, Robert White, UNESCO, Paris
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