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Publié le 22 novembre 2010 Mis à jour le 22 novembre 2010

Les paradigmes des nouvelles cités numériques

La thématique des villes numériques suscite un engouement incroyable auprès des élus comme des citoyens. L’idée, très séduisante il est vrai, n’est cependant pas née de nulle part. L’histoire peut être ici un précieux recours pour éviter erreurs et désillusions. Voici quelques explications.

L’histoire peut jouer ce rôle en premier lieu parce qu’elle véhicule l’idée toute simple mais féconde d’une fascination récurrente des hommes pour la notion de cité idéale. Les exemples sont nombreux et on pense à la république platonicienne ou à l’Abbaye de Thélème imaginée par François Rabelais, et qui continue à inspirer nos historiens et pédagogues.

Dans la réalité, les cités idéales ont d’abord renvoyé à des projets urbanistiques. Des lieux ont été "construits" autour d’une utopie parfois revendiquée de l’esthétisme et du bien-vivre. Avec au bout du compte, comme souvent lorsqu’il s’agit d’utopies, des échecs plus ou moins retentissants. De Brasilia aux villes nouvelles ceinturant les agglomérations traditionnelles, les exemples sont là aussi légion. 

La cité numérique n’est-elle pas exposée aux mêmes risques de désillusion ? Sans doute. Avec un bémol cependant : l’histoire encore nous enseigne que lorsqu’un espace est pensé selon des critères précis, il a toutes les chances de devenir ce lieu de partage et de production de sens dont rêvent les hommes.

Repères et maillons de la chaine du savoir

Dans la longue tradition des cités idéales, il y a bien sûr l’exemple emblématique de Beit Al-Hikma (littéralement Maison de la sagesse) créée à Bagdad autour de 830 par le calife Al-Mamoun. Espace de production et d’échange des connaissances, Beit Al-Hikma a pendant des décennies abrité les travaux de savants aussi illustres qu’Al-Khawarizmi auquel nous devons l’algorithmique, Al-Kindi qui a fait faire des avancées décisives à l’arithmétique ou encore Hunayn Ibn Ishaq, maitre traducteur et précurseur de la médecine moderne.

La modernité de cette cité du savoir est d’avoir été conçue dans une perspective de réseautage, plusieurs "maisons de la sagesse" ayant vu le jour aux quatre coins de l’empire.

Le maillage des territoires d’un pays est aujourd’hui une réalité de plus en plus incontournable. Economie numérique oblige, les régions se dotent d’infrastructures sophistiquées, entre réseaux de fibres optiques et systèmes d’information géographique (SIG). Des guides permettent aux édiles locaux de tenter de se retrouver dans ce monde virtuel qui leur est parfois encore étranger.

Des rapports détaillés, tel que celui-ci, permettent aussi de faire le point sur les innombrables solutions techniques de raccordement et de transmission des données existantes. Voire. L’avantage de la ville numérique est qu’on peut la visualiser avant même qu’elle naisse ! Voici une plateforme d’outils dédiés à cela.

Créer une ville numérique suppose aussi de créer des espaces d’accessibilité au net comme ces réseaux de cyber bases qui sont autant de lieux où le citoyen peut trouver et même déposer des ressources dès lors en partage. Le maillage du territoire permet ainsi de combler les "trous" numériques, ces taches blanches des opérateurs numériques. Et de réduire par là même la fracture numérique entre zones riches et zones pauvres en ressources du cyberspace.

Mais l’autre caractéristique de Beit Al-Hikma peut-être est d’être un lieu apprenant où le résident enseigne, produit et transmet la connaissance, perçue dès lors comme une richesse en partage.

Ville apprenante, une voie vers le développement

L’idée de base de tout projet d’édification d’une cité numérique devrait être cette ambition de doter nos espaces urbains d’une richesse culturelle, ce supplément d’âme qui leur fait parfois cruellement défaut. Autrefois, les cités rayonnaient par leurs centres d’enseignement ou leurs bibliothèques. Bagdad donc mais aussi Fès et Cordoue, Oxford et Bologne. Ces villes attiraient les plus grands penseurs comme aujourd’hui les grands clubs attirent les stars du ballon.

L’enjeu de la numérisation est précisément à ce niveau : savoir user des nouvelles technologies de l'information pour rendre les cités attractives aux hommes d’affaires comme aux mécènes ou aux hommes des lettres et sciences. Il s’agit d’apprendre pour être compétitifs dans la lutte mondialisée que subissent les territoires, parfois avant même les pays. Alors les villes apprenantes pourraient bien devenir, selon les termes de l’Observatoire de l’OCDE, « la nouvelle recette de développement. »

La problématique de ces villes du savoir au regard des défis de la mondialisation est donc de fait une préoccupation très présente auprès de nombreux chercheurs. Elle est posée dans nombre de colloques mais évoquée aussi dans cette une riche exposition qui se tient actuellement sur Versailles, lieu de démonstration des innovations scientifiques.

On le voit, sur ce sujet comme sur beaucoup d’autres, une lecture intelligente du passé, inscrit en l’occurrence ici dans le patrimoine, nous donne la clef des projets du futur. Ce continuum n’est-il pas en définitive le plus bel hommage qu’on puisse rendre au génie des savants encyclopédiques d’autrefois ?

 


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