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Publié le 01 juin 2021 Mis à jour le 02 juin 2021

Difficulté relative des langues

Certaines langues sont-elles plus difficiles que d'autres à apprendre ?

«Tu apprends le chinois, ça doit être très difficile, non ?»

Quel apprenant n’a jamais entendu une telle phrase concernant son choix de langue ? En quel honneur telle ou telle langue serait plus encline à mériter plus d’empathie, voire de sympathie, qu’une autre ? Qu’est-ce qui fait qu’une langue apparaît difficile ou facile à apprendre ?

C’est à ces quelques interrogations que nous tenterons de répondre aujourd’hui, car après tout, n’est-ce pas qu’une question de jugement ? Parler de la difficulté d’une langue ne serait-ce pas relatif ?

Points de comparaison

Peut-on affirmer qu’une langue est plus difficile ou plus facile qu’une autre ? Non, pas vraiment, car tout est une question de relativité. En effet, pour établir une comparaison, il faut avant tout se baser sur une donnée de référence. En ce sens, nous prendrons le français comme base. Aussi serait-il judicieux de se poser la question suivante : quelle langue est facile à apprendre ou difficile à apprendre quand notre langue maternelle est le français ?

On peut parler de facilité quand il s’agit de langues plus ou moins proches de la nôtre, à l’instar de langues latines comme l’espagnol, l’italien, le portugais ou encore le roumain. La notion de relativité est donc intimement liée à celle de comparabilité entre deux langues. On peut même dire qu’il s’agit là de lien « génétique », puisque les langues latines et germaniques ont la même racine que la langue française, à savoir la branche indo-européenne.

Une langue est donc relativement difficile par rapport à une autre du point de vue des différences  qu’on peut établir à différents niveaux, comme le lexique, la syntaxe ou encore la conjugaison, mais aussi le système verbal, la prononciation, le système d’écriture et le système de parenté.

Le système verbal

Par système verbal, en entend simplement conjugaison et grammaire, le fait de former une phrase qui a du sens, avec des verbes. Or, si pour nous, francophones, la formule « sujet-verbe-complément » tombe sous le sens, il n’en va pas de même dans d’autres langues.

Aussi, le Navajo, langue amérindienne des États-Unis, s’avère un vrai cauchemar en ce sens. En effet, outre un septième mode (en plus de l’indicatif, du conditionnel, du subjonctif, de l’impératif, du participe et de l’infinitif), le Navajo possède 23 « aspects et sous-aspects » (un peu comme notre présent progressif « en train de », mais directement intégré à la conjugaison de leurs verbes, dans leur système morphologique verbal), ces derniers suffisant à éclairer le locuteur sur la façon dont les verbes de comportent dans le temps, et donc, annihilant alors tout temps verbal.

Pour un francophone, une langue comme le Navajo, est donc vraiment difficile : outre l’apprentissage des formes des verbes en fonction de ces distinctions, il faut aussi savoir quand et pourquoi les utiliser. Dans le même style problématique du système verbal, on peut aussi évoquer le bulgare et le géorgien, qui sont pourtant deux langues parlées en Europe, mais ô combien loin de la nôtre !

La prononciation

Bon, on ne va pas se voiler la face, les francophones, du moins, les Français, ne sont pas réputés pour la maîtrise de leur accent dans les langues étrangères ! Outre ce fait, deux difficultés apparaissent surtout pour nous, à savoir les langues à clics (comme le taa, parlé en Afrique du Sud) et celles où les consonnes sont nombreuses, comme l’oubykh, qui est une langue caucasienne parlée en Turquie et en Géorgie autrefois (officiellement morte avec son dernier locuteur en 1992), qui se prévalait de pas moins de 84 consonnes, alors que le français n’en comporte que 19 ! Ah, petite précision, cette langue, à l’inverse, n’a que… deux voyelles !

Pour donner un exemple, un locuteur oubykh pouvait prononcer de 16 façons différentes le son « k ».

L’écriture

Même si l’allemand nous semble bien loin du français, nous pouvons quand même le déchiffrer, à défaut de le comprendre, et pour cause, nous pouvons lire ses lettres. Ce qui n’est pas le cas d’autres langues, comme le japonais, le mandarin, l’hindi, le russe, le grec … qui utilisent des caractères graphiques différents, qu’ils soient sous la forme d’idéogrammes ou d’alphabets (cyrillique…).

Là encore, aucune comparaison n’est possible avec notre langue. Au contraire même, parfois, cela rajoute un défi, comme pour le russe, dont certains caractères nous semblent évidents, mais qui se prononcent tout autrement (H se lit N, P se lit R…). Notre cerveau doit alors faire un véritable travail de décodage et de recodage !

Le système de parenté 

Un autre point intéressant à soulever est celui du système de parenté. En effet, si pour nous, dans le système latin en général, les distinctions sont bien claires et précises, il n’en va pas de même dans d’autres langues et cultures, où le mot «famille» s’entend au sens plus large, sans aller dans le détail.

Ainsi, chez les Ashanti (un peuple du Ghana qui parle le twi, 9 millions de locuteurs quand même !), il n’y a pas de distinction entre les frères, les sœurs, les cousins et les cousines, pas plus qu’entre le père, la mère, les oncles et les tantes. Ainsi, pour un Ashanti, sa tante est sa mère aussi et son cousin est son frère aussi. Une grande et belle famille, dites-vous ? Oui, sauf que la difficulté est ailleurs, en ce qui concerne les adelphes de sexe opposé (le frère de ma mère, la sœur de mon père) qui sont eux, bien les « tantes » et « oncles ». Ce n’est pas fini ! Les enfants de ces parents adelphes deviennent ainsi père (le fils de la sœur du père) et tante (la fille de la sœur du père) ! De quoi perdre la tête dans notre logique…


Finalement, tout n’est bien qu’une question de jugement et de relativité, on ne peut pas affirmer que telle ou telle langue est plus sympathique à apprendre qu’une autre. Il n’y a pas vraiment de langue difficile ou facile, il y a juste des langues comparables et génétiquement proches. Mais justement, n’est-ce pas faire preuve d’ouverture que d’essayer à la rencontre de ce qui nous est éloigné ?

Si on a la volonté d’apprendre une langue, on peut le faire, même si ce n’est pas facile !


Sources et illustrations



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