L'apprentissage précoce des langues
Apprendre les langues dès le plus jeune âge, un mythe ou une réalité ? Quelle utilité, quelles pratiques, quels usages ?
Publié le 12 janvier 2021 Mis à jour le 12 janvier 2021
Les organisations peinent à faire ressortir le cœur de leurs savoir-faire cachés, de leurs architectures invisibles, des processus relationnels implicites qui font naître la confiance, des symbioses et synergies subtiles qui en font la spécificité.
Bien souvent elles restent accrochées à des visions comptables et quantitatives
ou s’efforcent, par des référentiels, à désigner et reconnaître des phénomènes
difficilement mesurables. Elles poursuivent une visée patrimoniale d’accumulation
de biens, d’actifs incorporels et peinent souvent à capter « l’essentiel
invisible pour les yeux » car « on ne voit bien qu’avec le cœur ».
La réalité sensible de l’organisation, ses réactions émotionnelles à ce qui l’affecte
disparait trop souvent dans des tableaux de bord et des indicateurs sous forme
de jauges quantifiées qui montent et qui descendent.
Ce faisant l’organisation est vue comme une description statique alors même que le quotidien nous fait vivre dans des réalités organiques, changeantes, systémiques et imprévisibles. Les tableaux de bord et les statistiques fuient de tous les côtés. Les contenants ne savent maintenir des cadres organisationnels étanches avec le vivant qui sans cesse déborde et s’ingénie à chercher son chemin dans la description rigide.
Le seul récit
bien ordonné du dirigeant ou de la direction de la communication achoppe aux
milles histoires individuelles qui s’éprouvent. Le grand et unique récit de l’entreprise
détenu par une autorité exclusive est écouté avec retenue par des collaborateurs
qui en ont vu d’autres. Est-ce la fin du « grand récit » annoncée
par Lyotard dans « La condition post-moderne » ? Les récits du
quotidien créent une autre dynamique :
« On y narre la formation de héros positifs ou négatifs qui doivent accomplir des performances dans le cadre de compétences sociales. Ensuite, ces récits admettent une pluralité de jeux de langage et de formes de savoir. Enfin, ces histoires se racontent avec des règles bien précises qui signent le caractère quasi sacré de leur transmission.
Dès les premiers mots, il s’agit d’affirmer des règles pragmatiques : les histoires débutent avec des phrases comme “Voici l’histoire de… telle que je l’ai toujours entendue. Je vais vous la raconter à mon tour, écoutez-la”. (Vulbeau 2006)
« La nécessité du
changement », « l’impact de la crise », « le changement c’est
maintenant », « avant c’était le changement, maintenant c’est la
transition » sont autant d’injonctions qui glissent de plus en plus sur
les plumes de collaborateurs imperméables aux discours. Et si une idée neuve était de capter
l’énergie de petits récits.
Si la méfiance a grandi où si les mots de quelques-uns, aussi légitimes et charismatiques soient-ils, embarquent plus difficilement les équipes, il s’agit de fabriquer le récit à plusieurs. Une approche de change-management vise l'association des acteurs concernés à la construction de leur propre réalité. Il s’agit de coller un peu plus à l’idée selon laquelle « les individus adorent changer mais pas qu’on les change de force ».
Leur proposer de coconstruire le cadre de leur action, de choisir leurs outils, leurs méthodes, d’être des auteurs de leur travail comme ils sont les auteurs de leur vie, est une approche puissante qui mise sur la motivation intrinsèque plutôt que seulement sur la contrainte ou les paroles sirupeuses des grands cabinets de conseil.
Une approche possible,
modeste et parmi d’autres, est de participer à la création de l’histoire en
train de se vivre et pas seulement d’en être un figurant. L’idée de réaliser un
« webdocumentaire », donnant la parole et le point de vue des acteurs,
participe de cette habilitation (empowerment pour nos amis anglophiles) des équipes
ou des projets. La participation à un documentaire permet d’agir sur de
nombreux leviers qui aident à percevoir les solutions plutôt que de miser sur
le seul dépassement des obstacles et des résistances :
Ces enjeux se dessinent
ensemble au fur et à mesure de la conception du webdocumentaire.
Un tel webdocumentaire se
situe aux confins de la recherche et de l’expérimentation, du change
management, de la mobilisation des équipes et de l’explicitation de ce que
chacun est en train de vivre. Plusieurs étayages théoriques justifient une telle
démarche.
La théorie ancrée : La création d’un webdocumentaire à visée d’accompagnement de mouvements organisationnels (transformation, changement, transition, métamorphose etc.) s’appuie sur les dire d’acteurs, leurs subjectivités, leur ressentis; c’est en mâchant progressivement le réel en élaborant un synopsis, une histoire qui fait sens, c’est dans les allers et retours entre professionnels engagés et auteurs du webdocumentaire que s’élabore progressivement un « modèle d’action » et la façon de l’implémenter.
Il se construit chemin faisant sans plan préalable et étapes à franchir. En cela,
il est proche du vivant qui aspire à réaliser son meilleur potentiel. C’est l’image
de la forêt qui pousse sans architecte et dont le système se régule
progressivement pour la meilleure coexistence des espèces végétales.
La dimension socioconstructiviste :
la réalité est une construction sociale, elle n’est pas le paysage bien
organisé d’un seul, mais le partage des cadres de références de chacun. Le webdocumentaire
qui se construit par itération entre auteur et participants acteurs opère par
friction, régulation entre désir esthétique, volonté de faire passer son message,
d’exprimer une singularité. C’est un carrefour où se négocie les sens et le
récit commun. Un temps de cristallisation de pratiques et d’élaboration de
traces.
La qualité esthétique d’une
œuvre : en tant qu’être humain, nous sommes touchés par des
esthétiques, des partis pris de beauté qui renvoient et s’ancrent à notre
culture, nous lient ainsi avec des collectifs plus grands que nous. La
perspective esthétique construit des liens avec la société ou en tout qu’à une partie, à laquelle on a envie de s’attacher ou de ressembler. L’esthétique
du documentaire est bien l’affaire de son auteur et sa force est de ressentir
ce qui lui est offert dans les paroles, les gestes, les ambiances, les
personnages.
La narration et l’expression des récits de vie : cette dimension va chercher dans les tripes des personnages, leur fragilité, leur cohérence intérieure, leur envie d’exister, leur essence profonde.
Quand l’auteur parvient à faire sortir le protagoniste
du jeu de rôle de l’armure
historico narrative, quand il parvient à percer la carapace, il touche un
moment de vérité qui fait bondir le récit visuel de la commande de
communication institutionnelle pour tendre vers l’intime. Il exacerbe la
puissance des récits de vie (Pineau,
Dominicé 2003), pour fédérer un récit collectif. Les émotions sont
alors exacerbées la tendresse, les doutes, les peurs sont augmentées. Le récit
commun a probablement une fonction thérapeutique.
Le portage institutionnel
d’un webdocumentaire est un point clé, une grande liberté est
concédée à l’auteur, pour qu’il ait le temps d’établir la confiance et la
qualité relationnelle indispensable à la
réalisation d’une vision qui s’enracine et qui porte les sens.
Le choix du documentariste :
celui-ci/celle-ci n’est pas seulement un preneur d’images, mais surtout un
sociologue, une ethnologue, un amoureux de l’humain capable de se mettre à son
service pour le comprendre et le sublimer. Il est un chercheur des sens.
Le budget :
la question économique est bien sûr présente. Il est possible de créer d’excellent
webdocumentaire avec un téléphone portable mais la qualité sans faille de l’image
et du son demande un réel investissement dans du matériel de qualité. Les
grandes entreprises sont à même de financer, de plus petites organisations ou associations peuvent jouer avec une logique de financement participatif.
Le temps long d’installer
une narration : construire des relations de
qualité pour que les partenaires du webdocumentaire forment un écosystème d’interactions
dont vont émerger de nouvelles réalités, de nouveaux potentiels d’interprétation
communs du monde
Le décor :
il mobilise le geni loci, c’est-à-dire l’intelligence des lieux et
exacerbe la puissance des sentiments et des implicites.
Le webdocumentaire participe d’une « métamorphose des organisations de l’intérieur par le vivant » pour reprendre l’expression du sociologue Alain de Vulpian. Dans cette perspective, il participe d’une recherche action, d’une recherche humaine, d’un outil d’approfondissement au croisement des récits individuels et collectifs. C’est en cela que l’aventure permet d’apprendre ensemble et dans l’action de se dire.
DEFI POLICE-POPULATION : message in a bottle de Agence Catalpa sur Vimeo.
https://www.solfrance.org/recherche-action
Sources
Dominicé, P. (2003). L'histoire de vie comme processus de formation. Editions L'Harmattan.
Dominicé, P. & Pineau, G. (2017). Chapitre 17. Les histoires de vie en
formation. Dans : , P. Carré & P. Caspar (Dir), Traité des sciences et des techniques de la Formation: 4ème édition (pp. 347-363). Paris: Dunod. https://www.cairn.info/traite-des-sciences-et-des-techniques-de-la-format--9782100765430-page-347.htm
Jacques Pain – La théorie ancrée
http://www.jacques-pain.fr/jacques-pain/Rech_Methodo_La_theorie_ancree.html
UQAC – socioconstructivisme - http://www.uqac.ca/pminier/act1/socioco.htm
L’essentiel est invisible pour les yeux
https://nospensees.fr/on-ne-voit-bien-quavec-coeur-lessentiel-invisible-yeux/
Vulbeau, A. (2006). ... en contrepoint - Grands récits et petites
histoires. Informations sociales, 135(7), 65-66.
https://doi.org/10.3917/inso.135.0065
Overblog - Cristol Denis – La métamorphose des
organisations de l’intérieur par le vivant
http://4cristol.over-blog.com/article-la-metamorphose-des-organisations-de-l-interieur-par-le-vivant-107310707.html
Caillé, P. (2001). De
l’intérêt de pouvoir bien se raconter–L’histoire et le récit de l’histoire dans
la relation thérapeutique. Générations, 24, 56-60.
http://www.spip.systemique.eu/IMG/article_PDF/article_a224.pdf
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