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Publié le 12 janvier 2020 Mis à jour le 12 janvier 2020

Comment coopérer ? Caresses et technologies

Coopérer pour les individus, les organisations et les territoires.

Dissonances

Dissonance est un ensemble de chambre qui se passe de chef d’orchestre. Il n’y a pas de chef d’orchestre mais ce sont les musiciens qui s’accordent sur des partitions pour donner une couleur à l’œuvre. La métaphore ressassée du chef d’orchestre-leader prend l’eau avec une vision si horizontale de la compréhension d’une symphonie.

Le génial porteur de la vision en cède un peu au clarinettiste, violoniste ou saxophoniste qui assume un leadership tournant. Ce que nous dit cette métaphore musicale, c’est que si coopérer est affaire de synchronisation, les façons de créer une ambiance collective change.

Sur les territoires il est possible de discerner trois niveaux de coopération au sens de Desjeux (2004). Les exemples à suivre illustrent 3 façons de coopérer pour les individus (micro-social), les organisations (méso-social) et les territoires (macro-social).

Le niveau micro
l’Institut des territoires – Anne Beauregard

La coopération est à la mode, mais attention à l’injonction à la coopération, et au vocabulaire en vogue holacratie ou sociocratie. On mutualise des compétences, des savoirs faire, mais c’est différent de la coopération. La mutualisation ne développe pas forcément la coopération entre les personnes.

L’exemple de l’Institut du territoire est initié par un couple, un homme-une femme premier maillon de la coopération. Anne Beauregard l’une des cofondatrices de l’institut définit la coopération comme « être coopérateur d’une œuvre commune ».

Cela passe par partager le stylo pour écrire un projet. De manière centrale la vision générale est commune mais l’objectif singulier n’est pas forcément commun. On peut coconstruire si on partage les objectifs, mais l’œuvre commune dépasse les objectifs de chacun. Le processus de la coopération est implicite, il se produit « entre les plis ». La coopération entre personnes est première à la mutualisation. C’est quelque chose de joyeux.

Dans l’idée de « l’observatoire de l’implicite » que développe l’Institut du territoire, il s’agit de sortir de sa zone de confort pour coopérer au-delà d’un temps de formation créatif. Il s’agit de se mettre en chemin, au sens propre du terme, de digérer puis de réutiliser les nouvelles approches coopératives découvertes par les pérégrinations.

Le cheminement de personnes différentes intègre la pensée complexe d’Edgard Morin :

« en mélangeant on crée du système on prend en compte le complexe (complexus), ce qui est tissé ensemble ».

La coopération est l’expression sociale de la complexité. On ne peut plus faire l’économie de faire des liens. Ce sont des singularités qui s’expriment dans le collectif qui est toujours inscrit dans un territoire matrice de l’action. Le territoire est multidimensionnel c’est un milieu. L’Institut des territoires coopératifs cherche à mailler le « je » le « nous » et le « dans » pour comprendre l’implicite de la coopération sur les territoires.

En traversant un territoire en équipe, il s’agit de réhabiliter des temps longs, d’aller à la rencontre de ceux qui savent : « c’est celui qui fait qui sait ». Si on ne prend pas le temps on est incapable de repérer l’implicite de la coopération. Il faut repérer l’implicite de la personne, du collectif et du territoire qui se crée avec lenteur. Il faut identifier les récursions pour comprendre ce qui nous échappe.

La récursion c’est la boucle génératrice et régénératrice. Comprendre les boucles c’est toucher la compréhension humaine ce que vit autrui dans une situation, identifier les signaux faibles compréhensions intellectuelles et humaines. Les fondateurs de l’Institut des territoires se vivent comme des praticiens chercheurs partant s’appuyant sur une approche phénoménologique, en entrant en coopération avec les personnes. Ils se positionnent comme chercheurs qui aident les personnes à s’auto-observer elles-mêmes.

L’itinérance se fait à pied et rend disponible à l’écoute des personnes rencontrées à l’occasion de traversées de territoires de 300 à 400 kilomètres. Ce temps de rencontre avec des habitants permet d’observer ses implicites de coopération. L’itinérance est une expérience fort différente d’une prestation de diagnostic ou de conseil. Il n’y a pas de rapport d’itinérance mais corédaction avec les participants.

C’est une logique de recherche action. L’itinérance aide à passer de la vision d’un administré à la rencontre d’habitants. En résumé la maturité coopérative ne se prescrit pas mais se vit. L’apprentissage se fait sur un chemin.

Caminante, no hay  camino (Toi qui marche, il n'existe pas de chemin).
Antonio Machado

Le niveau méso
Liberty living lab – Thomas Cottinet

Pour Thomas Cottinet du Liberty Living Lab, la coopération c’est un écosystème et il s’agit de la seule voie pour relever les défis de société et de politique publique avec un esprit entrepreneurial. Le Liberty Living Lab est un espace d’invention de nouvelles façons de concevoir des projets. Toute l’idée est de mélanger des thématiques, des publics, des disciplines, des méthodes, des énergies etc. au service du bien commun

  • Réflexion technologique : Learn and joy – civic techs open source politics – open data  - tech for good (Entrepreneuriat technologie d’intérêt général).

  • Coopération : académique – corporate et acteurs publics – principe d’hybridation et fertilisation croisée de centre d’intérêts.

  • Recours au design, à la technologie et aux sciences humaines. La façon de faire vivre l’expérience est déterminante, elle nécessite de la préparation soigneuse.

  • Réflexion technologique : Learn and joy – civic techs open source politics – open data - tech for good (Entrepreneuriat technologie d’intérêt général).

  • Coopération : académique – corporate et acteurs publics – principe d’hybridation et fertilisation croisée de centre d’intérêts.

  • Recours au design, à la technologie et aux sciences humaines. La façon de faire vivre l’expérience est déterminante, elle nécessite de la préparation soigneuse.

Le Liberty Living Lab crée et accueille une effervescence d’ateliers de transformation. Le Living lab est un terrain d’expérimentation. Il offre des moments d’apprendre à faire de la politique et du management autrement. Il promeut des méthodes permettant d’accélérer la coopération. Il s’inscrit dans une dynamique et un label « entreprise à mission ».

Les entreprises à mission répondent à une triple pression

  • Les lois et attentes des collectivités,
  • Les attentes très fortes des consommateurs vers plus d’intérêt général
  • Les entreprises qui peinent à fidéliser leurs talents et attendent plus d’intérêt général

Le coopératif déborde du monde public avec les AMAP, l’habitat associatif et une démultiplication d’initiatives privées. Ces nouveaux entrants esquivent les marchés publics et la commande publique et les logiques politiques pour répondre à des enjeux sociétaux non satisfaits.

L’idée est de faire émerger de nouveaux services sur les territoires et parfois d’aider à la production de « collectivités plateformes ». Le travail de coconstruction avec les cadres et les habitants secoue les habitudes de la commande publique et la règle qui veut que l’on commande par avance et dans le détail la prestation à réaliser.

Le niveau macro
DG Ville de Mulhouse Jean-Luc Imbert

Le niveau macro est celui du territoire. C’est un espace de légitimité politique ou se nouent et se dénouent les grands enjeux sociaux économiques et environnementaux. L’exemple de la redynamisation des friches industrielles de Mulhouse, une ville de 300 000 habitants proche de la frontière suisse et Allemagne très dynamique, très stimulée par ses voisins, montre la dynamique de coopération au niveau macro.

Jean Luc Imbert en est le Directeur Général des Services (DGS), pour lui le métier de DGS évolue de la fonction de gestionnaire à celle de développeur. Il sera amené à représenter le sens de l’action. Au niveau macro la coopération se produit entre les institutions. La coopération entre les institutions c’est être capable de se mettre d’accord entre communes (ici toutes les communes en proximité des friches industrielles) dans des collectivités, procédures contractuelles, stratégies qui doivent concilier les intérêts.

La mutualisation est un aspect facilitateur de la coopération. Elle consiste à un partage de méthodes de travail pour créer du consensus autour de politiques publiques. Le moteur de la coopération c’est la qualité de la relation de l’individu avant même la tenue de sa fonction. On met du co partout et cela facilite les choses, coworking, colunching etc. mais la relation à l’autre prime.

Dans l’exemple de la rénovation des friches industrielles de la ville de Mulhouse l’enjeu c’est le maintient d’une population industrielle dans le bassin d’emploi, soit 6 000 salariés dans les années 70 à 76 salariés fin 2000 puis 3000 attendus en 2020. Cette reprise d’emploi s’est produite par l’engagement de 5 entrepreneurs locaux qui se sont emparés de la 4eme révolution numérique et se sont efforcés de créer une dynamique entrepreneuriale.

Les acteurs publics locaux soutiennent la dynamique par la création d’un écosystème d’acteurs, par exemple l’accueil d’une école 42 destinée à fournir des développeurs performants. L’investissement public favorise la coopération mais celui-ci est aussi discuté au sein d’un comité de pilotage du projet intégrant les chefs d’entreprises, président d’université, élus et cadres territoriaux avec de l’envie partagée de donner une nouvelle vie à un site

En parallèle la ville a créé un service de la participation citoyenne avec 8 agents pour associer les citoyens pour traiter des aménagements de la ville à la place de conseil de quartier. Les collaborateurs vont sur site et demandent l’avis des habitants « comment avez-vous envie de vous sentir dans cet espace public ? ».

L’idée est d’aller à la rencontre des gens et de collecter de souhaits et d’idées. La réponse permet d’éviter les lacunes d’une société du zapping ou l’on passe d’un sujet à l’autre. L’expérience de l’aménagement de Mulhouse c’est qu’il est possible de trouver des solutions en coconstruisant mais on ne connait pas par avance là où on va aller. C’est en coopérant que l’effet boule de neige se crée. C’est en copilotant que les effets se produisent. La logique échappe au déterminisme. Le stade final est inconnu par avance.

Pour réussir à coopérer, il faut résister au poids des habitudes, savoir remettre en question le pouvoir et accueillir d’autres avis. Il faut aussi réussir à modéliser de nouvelles pratiques.

Sources

Intercoop https://instercoop.fr/

Dissonances https://www.telerama.fr/musique/sans-chef-et-sans-reproches-des-dissonances-a-l-unisson,138582.php

Liberty living lab https://www.liberte.paris/

Observatoire de l’implicite https://instercoop.fr/presentation-de-lobservatoire-de-limplicite/

Wikipédia Living lab https://fr.wikipedia.org/wiki/Living_lab

Toupie – Dictionnaire - Holocratie http://www.toupie.org/Dictionnaire/Holacratie.htm

Sociocratie http://www.sociocratie.net/

Wikipédia – Edgard Morin https://fr.wikipedia.org/wiki/Edgar_Morin

Entreprises à mission - https://www.entreprisesamission.com/

CEREMA Collectivité plateforme https://smart-city.cerema.fr/comprendre-smart-city/formes-contractuelles-smart-city

Ecole 42 https://www.42.fr/42-lance-42-network-son-reseau-international-de-20-campus-partenaires/


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