Les interventions bénéfiques en formation

«J'ai aimé votre article sur les interventions dommageables en formation et je serai preneur d'une suite sur les interventions bénéfiques».

1. Intervenir pour faire grandir la relation et le savoir
   
   

   L'intention de l'intervenant lorsqu'elle est centrée sur l'idée de faire grandir la relation et le savoir crée un climat qui attise la curiosité. Créer un cadre où l'intention est d'apprendre ensemble augmente la possibilité d'appui mutuel. Par exemple pourquoi dans les formations en ligne ne pas proposer de répondre à deux ou en équipe à des QCM ? Y répondre seul ne divise-t-il pas et ne sépare-t-il pas des apprenants isolés devant leurs écrans en renforçant une forme de compétition interindividuelle ? Réfléchir en équipe pousse à travailler l'altérité qui nous assouplit au monde et nous le rend plus compréhensible.
   
   
   
2. L'intervention de pair à pair
   
   
   Le dicton affirme que "L'amour est comme le savoir plus on le partage plus il grandit"
   L'idée de la pairagogie est une augmentation mutuelle. Je t'apprends et tu m'apprends. Non content de favoriser l'exploration de ses ressources personnelles, il s'agit de stimuler celles des autres. Les partenaires en interagissant gagnent un sentiment d'efficacité collective. L'intervenant et son savoir ne sont plus en surplomb mais en soutien de cette rencontre. L'intervention bénéfique consiste à créer les conditions d'ouverture d'une rencontre, dans un cadre physique inspirant ou sur une plateforme fluide et facilitante.
   
   
   
3. Écouter l'autre et ses besoins, l'empathie plutôt que la sympathie
   
   
   Les émotions contenues et réfrénées empêchent un lien profond avec les autres. Une expansion trop prononcée gène l'interlocuteur. La juste distance émotionnelle à autrui autorise un lien plus puissant. Mais l'intervenant a intérêt à viser l'empathie plutôt que la sympathie. Comprendre l'émotion de l'autre sans fondre dedans permet de mieux saisir ses besoins et d'en tenir compte, que ceux-ci portent sur le sens, les affects ou la cognition dans un apprentissage.
   
   À l'inverse exprimer seulement une sympathie peut s'avérer superficiel dans une intervention dont l'objet est la médiation au savoir. "Je vous ai compris. Je vous aime bien. Mais je reste étranger à votre situation". Pourquoi pas un cours d’empathie comme au Danemark ?
   
   
   
4. Contrôle, ouverture et inclusion
   
   
   En arrivant dans un groupe, les individus auraient besoin de contrôle, d'ouverture et d'inclusion. Une intervention bénéfique consiste à satisfaire ces besoins pour être bien dans le groupe. Le contrôle c'est l'installation d'une sécurité relationnelle. Il s'agit de donner prise à l'apprenant sur un processus qui le concerne voire qui vise sa transformation. Règles et objectifs sont à négocier ensemble (pensons à la façon dont les plateformes d'apprentissage permettent cela). Un apprenant garde une part d'auto direction de sa trajectoire. Il est plus qu'un espace de stockage. L'ouverture est la création d'un espace d'acceptation d'idées nouvelles ou différentes. L'intervention autorise et stimule l'expression singulière. L'inclusion est un principe d'organisation d'égale dignité de participation.
   
   
   
5. Créer un cadre dont l'autre peut se saisir
   
   
   L'intervention crée un cadre intelligible pour les participants. Si elle est en ligne elle cherche la meilleure ergonomie. Si elle est en face à face, elle tire parti de la présence physique de la qualité du lieu et de l'enchaînement des temps pour créer un surplus de sens et d'envie d'implication. Dans les deux cas elle favorise la participation, le dialogue et l'investigation à partir de là où en est l'apprenant et non pas de là où est sensé conduire un programme prédéfini ou une I.A sensée nous aider.
   
   
   
6. Développer le triptyque protection, permission, puissance
   
   
   Lenhardt Vincent, fondateur de l’une des premières écoles de coaching en France, évoque le triptyque « protection, permission et puissance ». Une intervention bénéfique est un coup de marteau. Elle vise juste. Elle est précise. Elle ne meurtrit pas les doigts. Elle va à l'essentiel.
   
   C'est une protection car elle évite les impasses et les impossibilités de faire, les faux conseils irréalisables ou les mises en danger de soi. C'est une permission car elle rappelle qu'en chaque apprenant est un gisement de ressources à stimuler. C'est une puissance d'agir car le questionnement et la mise en mouvement dévoilent un potentiel pour se construire, de révéler et s'épanouir.
   
   
   
7. Intégrer des routines relationnelles
   
   
   Si l'on enlève le traitement des courriels et les réunions à nombre de travailleurs actuels, ils ne font pas grand-chose de leur journée. Rien ne nourrit leur monde intérieur alors même qu'une multitude d'aléas et d'événements viennent perturber ce qu'ils avaient à faire de leur journée. Se poser dans une salle de formation peut alors s'avérer une étrange expérience de vide où chacun cherche à retrouver un minimum d'excitation en allant fureter sur son téléphone portable.
   
   Accueillir un groupe de participants, faire un modeste tour de table, ou un tour d'écrans (en cas de temps à distance) apparaît désuet à certains voire une insupportable perte de temps alors que déposer les valises (dire ce qui nous alourdit le cœur) ou laisser s'envoler les ballons (partager des émotions positives) permet de mettre en vibrations un groupe. La routine du tour de table ou de prise de température garde tout son intérêt.
   
   
   
8. Respecter les énergies d'un individu, d'un groupe, en adaptant les interactions
   
   
   Apprendre de son propre corps à capter les signaux de fatigue, de plaisir, d'énergie aide à sentir ces états chez les autres. Une fois ces signaux faibles capté chez soi l'intervenant sera mieux à même même d'en sentir la présence dans un groupe. Il perçoit la respiration, le sens des blancs et des silences. L'onde vibratoire dans laquelle il apprend à se situer détermine le moment précis de son intervention ou de son abstention d'action.
   
   Être au diapason de l'énergie d'un groupe pour mieux résonner avec lui participe de l'art subtil de l'intervenant. Les flux d'informations en ligne, leur intensité, leur espacement, leur nature sont aussi à apprivoiser pour faire de la distance une amie plutôt qu'une absence.
   
   
   
9. Pratiquer la communication non violente
   
   
   La communication non violente est une pratique mise au point pour établir le dialogue y compris dans les situations les plus délicates tout en se préservant soi-même et en faisant valoir son point de vue. Il s'agit donc de faire preuve d'assertivité et de délicatesse.
   
   
   
10. Répondre aux demandes profondes
    
    
    Une intervention bénéfique répond aux demandes profondes. Mais il n'est pas si facile de capter la réalité de telles demandes. Il y a parfois des demandes faites par convention sociale, des non demandes, des demandes cachées, bref un ensemble de situations où l'apprenant joue un rôle ne sait précisément où se situer, parfois même lorsque des interactions en ligne sont organisées, il s'avère difficile de révéler son ignorance dans la manipulation d'outils que d'autres manient avec aisance. Une maïeutique délicate aidera à creuser une problématique qui ne parvient pas à s'exprimer.
    
    Gageons que les pratiques proposées aident les intervenants à enrichir leurs pratiques