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Publié le 11 octobre 2003 Mis à jour le 11 octobre 2003

E-formation en Afrique : quels besoins ? En a-t-on besoin ?

L’Unesco a achevé la semaine dernière les travaux de son conseil d’Administration. De grandes résolutions ont été prises comme à l’accoutumée. Qui concernent le recul des bornes de l’ignorance dans le monde entier et surtout dans les pays du Sud. On assiste à ces refrains depuis des décennies sans que des actions aient été véritablement couronnées de succès.

Dans la plupart des pays africains au Sud du Sahara, l’organisme a pu constater que le programme

Éducation Pour Tous

, malgré les rapports nationaux favorables, a été un échec puisque des pays comme le Congo, la Guinée ou le Cameroun sont en voie de déscolarisation.

Il est aisé de le confirmer, ainsi que le fait l’Unicef qui atteste que près de 123 millions d’enfants ne vont pas à l’école dans le monde et que la moitié d’entre eux vit dans le sud de l’Afrique. On lira utilement ce rapport en anglais sur Education .

Les solutions envisagées par chaque pays passent maintenant par la formation seulement, et aussi par la formation en ligne étant donné la masse populaire à instruire étant donné aussi la mode.

La cohérence de ces pays est pourtant prise en défaut lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre au plan local ou régional les décisions prises au niveau international ou mondial. On a décrié l’absence de politique nationale de formation à distance. On a dénoncé le manque cruel d’écoles et d’enseignants ; on a déploré la vétusté des infrastructures scolaire ; on a dénoncé l’incommodité des voies de communication et du système de télécommunication. Le partenariat injustifié par lequel la coopération du Nord rendait le Sud exsangue a été fortement hué. Mais rien de tout cela n’a produit de décision favorable à la formation en ligne convoquée par l’Afrique.

Que ce soit à Jomtien, que ce soit lors des rencontres régulières de la Confémen, la Conférence des Ministres francophones de l’Éducation, malgré les appels de l’ADEA pour l’éducation libre, à distance et non formelle, l’impression la plus évidente est que toutes ces assises permettent de vivre dans des hôtels de luxe et de bénéficier des avantages pécuniaires. Les rapports et les décisions croupissent dans les tiroirs en attendant l’année suivante.

Il est peut-être temps de vérifier que, dans les pays qui bénéficient d’aides pour l’insertion de la formation à distance, les subventions concernent effectivement les actions visées : achat de matériels de formation, formation des formateurs, conception des matériels didactiques, conception des cours, sensibilisation, élaboration d’objectifs, etc.

Il n’y a pas de raison que les actions initiées par la coopération canadienne, française, belge ou suisse et par les bâilleurs comme la Banque Mondiale et l’Unesco soient les seules qui fonctionnent surtout en Afrique francophone. La Tunisie, l’Algérie, le Maroc et l’ensemble des pays anglophones ont développé des plates-formes endogènes de formation à distance. Qu’en est-il des autres ?

Les besoins de la e-formation en Afrique francophone sont clairs :

  • éviter les coopérants qui se servent de l’Afrique pour

    faire du CFA

    ;
  • se doter d’une politique nationale de formation à distance ;
  • assurer un partenariat sous-régional et régional
  • proposer des programmes communs et concevoir des activités transversales ralliant l’ensemble des pays de la zone concernée

Il ne faut pas croire que l’absence des Tic est un obstacle à la formation. Sauf si l’objectif prioritaire ne concerne que la e-formation. L’objectif principal en Afrique demeure l’alphabétisation. Pour aller à l’école maternelle, mon petit-fils n’a pas besoin d’e-cartable, de tableau ou d’ardoise électronique. Mon petit-fils n’a pas de salle de classe, il n’a pas de livre, sa salle de classe n’a ni banc, ni fenêtre, ni toit, ni enseignant. Le livre de calcul coûte les

yeux de la tête

. Son prof. n’est pas payé. D’où la grogne au Congo, au Togo, au Cameroun et ailleurs. Avec cela on demande la e-formation ?

La priorité scolaire en Afrique est l’école de base avec du matériel élémentaire. Notre besoin en formation en ligne est utile. Il n’est pas urgent. Parce que la e-formation reste le privilège de rares élèves riches des villes et non le partage commun d’un droit universel. Quel sauvetteur (vendeur à la sauvette), quel agent de bureau, quel chômeur (personne sans emploi et sans ressources) peut prétendre à une e-formation dans nos pays ? Aucun de ces pays n’est en mesure de créer des espaces numériques publics pour l’alphabétisation. Des textes réglementaires existent maintenant partout, mais aucune application à la e-formation n’est connue. Pas de bibliobus , pas de mairie connectée pour les enfants du quartier, etc. J’exagère ? Je ne pense pas. J’en suis même à l’euphémisme.

On aura observé que là où règne la e-formation, c’est l’AUF qui est derrière et qui pousse ; c’est le Résafad qui soutient, c’est la Banque Mondiale, l’Acdi ou l’Unesco qui motivent. Une fois ces bailleurs partis, tout s’effondre.

Les besoins de l’Afrique en e-formation ? Un sujet à renvoyer en deuxième session tant que les acteurs principaux ne mettent pas la main à la pâte.


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