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Publié le 29 septembre 2009 Mis à jour le 01 février 2024

Trouver le moteur du besoin de collaboration

Outils performants mais pauvreté des usages

L'Ecole, l'Université et l'Entreprise parlent beaucoup de « collaboration » mais on ne sait trop ce que ce mot recouvre dans chacun de ces espaces. L'abondance de discours sur les outils de plus en plus performants cache souvent  la pauvreté des usages. Tous les modes d'emploi enthousiastes ne changeront pas la question de fond : pourquoi avoir besoin de collaborer ?

Lorsqu'on veut permettre aux gens de se parler, on imagine pour eux des espaces accueillants et confortables : c'est ce que font en principe les bistros, les bonnes bibliothèques et certaines entreprises « innovantes ». C'est ce que beaucoup de designers d'intranet, de responsables d'ingénierie pédagogiques tentent de recréer en ligne à travers des plates-formes qui se veulent de plus en plus conviviales et souples. La qualité des infrastructures n'est donc pas vraiment en cause, du moins pour les organisations qui désirent faciliter la collaboration et qui s'en sont donné les moyens.

Les résistances au travail collaboratif sont réelles et l'arrivée du numérique ne fait ici que révéler les blocages : échanger des informations essentielles en vue d'un projet commun avec efficacité est une étape supplémentaire que ne franchissent pas bon nombre d'organisations, faute de culture du partage d'une part, et d'un élémentaire besoin des individus d'autre part.

La présentation de Anthony Poncier pour Eco-Lab, « Savoir et travail partagé pour l'entreprise » est à cet égard très édifiante :

Pour réussir à travailler avec les autres, il faut des capacités à trouver la ou les personnes dont on a besoin, il faut aussi des aptitudes à faire valoir ce qu'on peut apporter aux autres, mais surtout il faut en avoir envie !

Pour collaborer, en avoir envie... et ne pas se faire sanctionner

Comme il le dit très bien, « L’héritage managérial du XXe siècle s’oppose au collaboratif » : faire émerger le collaboratif dans une organisation passe par la mise en place d'un contrat et n'est donc pas « naturel ». Une fois le processus enclenché, cette culture du travail en commun exige des moyens techniques, humains et financiers pour être pérenne.

Les technologies font évoluer les organisations de ce point de vue mais pas aussi vite qu'on le prétend : passer du mail au partage sur des espaces communs n'est pas si fréquent par exemple et la route est longue jusqu'aux wikis et aux blogs.

On retiendra un certain nombre de règles issues de ce que Anthony Poncier appelle « Les lois incontournables du collaboratif » qui peuvent nous aider dans la formation : 

  • Le travail collaboratif repose sur le volontariat et ne peut être une obligation;
  • On partage ses connaissances quand on sait que ce travail est reconnu et apprécié par les autres collaborateurs;
  • Il ne s’agit pas de « juste échanger », mais d’avoir la bonne information au bon moment;
  • Les outils (wiki, blog, forum, rss) ont chacun un rôle, mais ce sont leurs usages qui sont déterminants.

Les pratiques de collaboration existent avant les outils

Une autre expérience éclaire cette question des origines de la motivation, celle de professionnels du design d'espaces de collaboration.

Sur le blog de la Fing, on peut lire un article, « L'ingéniérie sociale à l'heure des réseaux sociaux » qui donne la parole à Michael Johnson, responsable de la conception des outils internes de Pixar et à Gentry Underwood d’Ideo, une entreprise de gestion de connaissances et de réseaux sociaux.
Ici tout est « parfait » : on est en Californie, énergie, enthousiasme malgré la crise, créativité, jeunesse, monde de l'animation et du cinéma, entreprises qui font de l'innovation leur raison d'être. Le modèle de management est fondamentalement différent :

« Chez Pixar, la culture d’entreprise entretient une relation d’égalité entre les gens de la création et ceux de la technique. La réalisation d’un film en images de synthèse est fondamentalement collaborative. Elle nécessite une culture critique constructive, pour faire évoluer tous les éléments d’un film, trouver les bonnes idées, faire les changements qui s’imposent au bon moment. Les studios sont véritablement dirigés par les réalisateurs et le réalisateur doit communiquer le film qu’il a dans la tête à l’ensemble des collaborateurs. »

  • Premier point : la collaboration est ici intrinsèque, il n'y a aucun moyen de faire autrement.
  • Deuxième point : les outils ne font que se couler dans les flux des usages les plus massifs.
  • Dernier élément : la récompense (par le recrutement, l’évolution de carrière).

"Prendre la voie la plus utilisée : c’est-à-dire qu’il faut intégrer les flux de travail existants afin de profiter des endroits où les résistances sont les moins grandes. Si on peut donner de nombreuses options aux utilisateurs, il faut surtout utiliser les valeurs par défaut des systèmes à votre avantage, comme par exemple utiliser les e-mails pour apporter à tous les employés les nouveautés des blogs de chacun. “Peu importe la façon dont vos outils sont conçus, vous ne pouvez pas demander aux gens de sortir de leur manière de les utiliser.”

Si on compare les deux approches, on constatera que le volontariat n'est pas une option mais une obligation dans une culture plus créative. Dans le domaine de la formation, cela impliquerait des contenus adaptés à une telle donne.

Si on ne laisse d'autre choix que de coopérer, encore faut-il donner des armes pacifiques. Enseigner, ce serait aussi dans ce cas aider à développer des compétences d'écoute, d'esprit critique, de mise en contexte, des capacités à entrer en relation avec les autres, à comprendre les différences culturelles dans la façon de travailler en groupe, comme l'a envisagé le remarquable programme FILIPE à destination des étudiants étrangers "obligés" d'apprendre le français.

Travail collectif en groupe projet

 


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