Pour bien apprendre, il faut évoluer dans un milieu stimulant et être bien entouré. Cela semble aller de soi mais n’est pas toujours pris en compte dans la recherche en éducation. Le premier réflexe d’un pédagogue est de se pencher d’abord sur le contenu de l’enseignement et de s’interroger sur la meilleure façon de le présenter pour le rendre plus assimilable. Il s’agit certes d’une tâche essentielle mais pas suffisante. Il est nécessaire de s’intéresser aussi à ce qui entoure l’apprenant. Et se poser quelques questions simples mais fatidiques : cet espace est-il agréable ? Stimulant ? Simplement incitatif ? Est-il dangereux ? On parle ici aussi bien l’espace physique que virtuel. L’idée est en réalité de cerner un espace d’apprentissage personnalisé performant. Voici quelques pistes.
Du tableau à la tablette numérique et…
Tout le monde connait les photos jaunies des classes d’autrefois : élèves immobiles, cadre sévère et professeur qui ne l’est pas moins. Cet environnement n’a plus rien à voir avec la classe d’aujourd’hui débordante de couleurs et de ressources. Avec des élèves qui s’approprient l’espace et imposent leur présence. Les nouvelles technologies ont évidemment joué un rôle dans cette métamorphose. De la mise en réseau à l’installation d’un poste individuel connecté via le net au monde, les tentatives de trouver l’environnement de classe idéal sont nombreuses. Les débuts de l’informatique à l’école ont été marqués par la volonté de créer un espace collaboratif en classe.
En France, l’exemple de cette volonté a longtemps été le nanoréseau, dispositif fermé qui ne résistera donc pas longtemps à la fulgurante évolution des technologies et à l’irruption d’Internet. Nous sommes aujourd’hui très éloignés de cette époque. Les outils techniques, dans leur extrême diversité, ont appris à communiquer entre eux. La compatibilité est devenue le maitre-mot de la technologie contemporaine. De la même façon, grâce au sans-fil, les données se propagent sans même avoir besoin de câbles. Avec l’apparition dernièrement des tablettes numériques, c’est l’outil même de traitement des données qui a tendance à se dématérialiser en embarquant dans un espace de plus en plus réduit clavier, souris et autres périphériques audiovisuels.
…de la classe à l’environnement d’apprentissage personnel
La frontière entre la classe et d’autres espaces pour apprendre s’estompe. Le professeur n’est plus l’unique origine du savoir. Ni même, parfois, la plus prolifique. Alors, il est logique, et rentable, de repenser l’environnement de travail ou d’apprentissage dans le sens d’une plus grande ouverture sur la réalité extérieure. Aujourd’hui, les élèves sont connectés en permanence. Ils guettent tout changement dans la sphère de leurs intérêts, c'est-à-dire le plus souvent en musique, technologie numérique ou sport. Deux défis se posent à nous :
- Comment tirer profit cette extraordinaire capacité de veille pour les intéresser aux mathématiques ou à la philosophie ?
- Comment les intéresser dans la durée et éviter qu’ils ne soient tentés de surfer sur des sites attractifs mais… improductifs ?
L’une des pistes est de les accompagner dans la construction de leur propre univers des savoirs. En effet, le meilleur moyen d’impliquer les jeunes est de leur permettre d’édifier eux-mêmes leur espace de travail numérique, un peu à la manière dont ils personnalisent leur espace de vie. Voilà une voie possible d’aménagement d’unenvironnement d’apprentissage personnel.
De nombreux exemples d’espaces numériques d’apprentissage existent comme celui-ci dédié à l’enseignement des sciences au primaire, développé par l’Université de Genève.
Les murs de la classe ne sont plus des frontières étanches tant s’en faut. La volonté est aussi d’apprendre de chez soi. On crée alors, comme avec cet exemple marocain, des espaces numériques d’apprentissage en ligne. Cette mobilité entre différents espaces où l’on apprend - école, rue, maison, bibliothèque, etc. – est devenue une des caractéristiques essentielles de l’enseignement d’aujourd’hui. Les technologies actuelles permettent facilement d’arriver à cette ubiquité mais, question importante, comment éviter la dispersion ? Ou même l’égarement ? Les enseignants s’efforcent d’encadrer les pratiques en conseillant des sites à visiter et des contenus à explorer mais sans parfois avoir eux-mêmes la compétence requise pour évaluer ces contenus ! Voilà uneapproche axée sur les objectifs qui donne à réfléchir utilement sur la question.
Au final, l’équilibre à trouver entre liberté et guidance, autonomie de l’apprentissage et tutorat n’est pas des plus simples à réaliser. L’enseignant moderne doit faire face à la rude concurrence du web, océan d’attirantes mais parfois dangereuses sirènes ludiques. Il lui faudra innover pour pouvoir s’immerger avec ses élèves tout en conservant à portée de main une bouée salutaire. A lui aussi de capter leur attention juste le temps nécessaire pour leur inculquer les savoirs nécessaires à leur survie.
Photo : Alf Storm, Flickr, licence CC.
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