Évaluer l’apprenance va plus loin qu’évaluer la formation
Incitation à réfléchir sur des pratiques d'évaluation traitant de l'apprenance plutôt que de la seule formation.
Publié le 03 mars 2010 Mis à jour le 03 mars 2010
Le Réseau d'Information sur la Réussite Éducative (RIRE) du Québec a publié récemment sur son site un article de Pierre Potvin, enseignant à l'Université du Québec à Trois-Rivières, intitulé Les pratiques innovantes en éducation.
Cet article fait le point sur ce qui mérite effectivement d'être appelé « Pratiques innovantes », à l'heure où tout le monde éducatif francophone bruisse de termes tels que expérimentation, réforme, modernisation, étude pilote... Autant de termes qui indiquent la volonté de changer les choses.
Changer : effectivement, c'est l'un des objectifs majeurs des pratiques innovantes en éducation. Dans le droit fil de la méthodologie de gestion de projet, l'auteur cite plusieurs sources indiquant qu'une pratique innovante doit toujours aller vers le mieux, et de préférence vers une amélioration de la réussite des élèves. En témoigne ainsi la définition donnée par le Conseil Supérieur de l'Education du Québec : « L’innovation en éducation est un processus délibéré de transformation des pratiques par l’introduction d’une nouveauté curriculaire, pédagogique ou organisationnelle qui fait l’objet d’une dissémination et qui vise l’amélioration durable de la réussite éducative des élèves ou des étudiants ».
Les pratiques innnovantes en éducation concernent les trois principaux groupes d'acteurs de la communauté éducative :
On le voit, l'innovation éducative déborde largement les pratiques pédagogiques des enseignants. Mais, peut-on ajouter, il n'est pas posssible d'installer une pratique innovante dans un domaine sans toucher les autres. Ou alors, on court à l'échec. Ce constat s'applique parfaitement aux « plans numériques » menés au plus haut niveau pour les établissements scolaires : sans pratique pédagogique innovante, la pratique administrative innovante ne sert à rien, ou presque.
L'article aborde ensuite un point capital, celui de la généralisation. Selon l'auteur, le processus d'innovation passe part trois phases :
Car il n'est pas d'innovation sans généralisation. Ce qui convoque dans l'argumentaire de l'auteur la notion de « pratique exemplaire », équivalent de l'expression anglophone « best practice ». Selon P. Potvin, une pratique devient exemplaire lorsqu'elle a été évaluée, « tant au niveau de son processus que de ses effets ». Elle a donc là partie liée avec le monde de la recherche.
Cette évaluation pose souvent problème. Potvin souligne qu'en matière de TICE (qu'il continue de nommer NTICE, ce qui interroge la notion de nouveauté), les technologies évoluent si rapidement qu'il est impossible d'évaluer l'effet de leur usage avec des élèves. Il faut donc se contenter de grandes tendances générales.
C'est donc l'évaluation seule qui garantit l'exemplarité des pratiques, innovantes ou pas. On mentionnera à ce sujet un ancien article de Bruno Devauchelle : Innovantes, bonnes, efficaces... Quelles pratiques ?, qui souligne fort justement que le qualificatif « bonne » relève du jugement plus que de l'évaluation, et que l'efficacité n'est qu'un des critères possibles pour évaluer une pratique.
Potvin termine son article en encourageant les acteurs éducatifs à faire preuve d'initiative, pour cultiver leur esprit créatif et imaginatif, d'où naîtront les pratiques innovantes. Il sait pourtant que l'innovation ne vient pas toujours de la pratique à la base, et que de nombreux enseignants créatifs continuent de s'épuiser seuls, sans aucune chance de voir leur initiative se transformer en innovation intégrée au système.
A l'autre bout de la chaîne, on reproche (encore récemment) aux décideurs et praticiens de l'éducation de ne pas assez utiliser les résultats de la recherche. Lourdeur des habitudes dans les écoles et croyance inconditionnelle dans la valeur exclusive « de la base », égoïsme des chercheurs qui ne pensent guère à l'usage qui pourrait être fait de leurs travaux pourtant largement financés sur fonds publics... Et finalement, le dialogue de sourds.
Comment, alors, passer de la théorie impeccable sur les pratiques innovantes à leur généralisation effective ? Il faut bien du courage politique, de l'envie de faire autrement, et quelques moyens placés là plutôt qu'ailleurs. Il faut des communautés de pratiques enseignantes, dont les membres se soutiennent et se stimulent, ce qui leur permet d'attendre encore un peu la reconnaissance publique. Il faut des accompagnateurs qui encouragent et outillent les équipes qui souhaitent se lancer dans l'aventure. Tout ceci existe. Il suffit de s'en saisir.
Les pratiques innovantes en éducation (version intégrale) par Pierre Potvin, Université du Québec à Trois-Rivières. Réseau d'Information pour la Réussite Educative
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