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Publié le 16 septembre 2019 Mis à jour le 16 septembre 2019

Un prof robot pour sauver une langue autochtone

Quand la robotique vient au secours d'une langue en péril

« Le Progrès : trop robot pour être vrai ! »

Cette citation pleine d’humour nous vient d’un poète français, Jacques Prévert (1900-1977), rendu célèbre grâce à son langage familier et à ses jeux sur les mots. Si à son époque parler de robotique relevait du futur, d’un monde où les nouvelles technologies que nous connaissons aujourd’hui n'étaient tout juste qu'imaginées, il n’en apparait pas moins que la société d’alors  doutait déjà de son utilité et pourtant… plusieurs décennies après, la robotique fait partie intégrante de nos vies. Elle est partout et contribue même à nous aider dans nos apprentissages.

C’est par exemple le cas d’un nouveau projet, baptisé Pink (Rose en français), qui propose d’enseigner une langue autochtone, menacée de disparition prochaine, avec pour objectif de tenter justement de la préserver et de la pérenniser.  Comment ?  Venez avec nous à la rencontre de Pink !

Le projet Pink

À l’origine, en 2015, il s’agit d’un projet pensé par une association d’écoles indépendantes d’Australie Méridionale (Association of Independent Schools of South Australia - AISSA), en collaboration avec l’Université du Queensland. Son sujet ? « Humanoid Robot Research Project », ou en français, « Projet de recherche sur les robots humanoïdes » avec pour objectifs particuliers : 

  • L’effet des robots humanoïdes sur l'apprentissage des élèves,
  • L’intégration des robots dans le programme australien
  • Les approches pédagogiques qui améliorent et prolongent l'apprentissage des élèves
  • Le style de leadership qui favorise l'intégration des technologies émergentes dans la pratique pédagogique

Si tout cela semble très intéressant, cela le devint encore plus lors de l’année suivante, en 2016, quand commence un partenariat avec la Maitland Lutherian School (située à environ 2h d’Adelaide, chef-lieu de cet état australien), qui a la particularité d’être localisée dans la péninsule de Yorke, le territoire historique des Narungga, un peuple aborigène.

Mais pourquoi cette collaboration improbable entre des chercheurs en robotique et une petite communauté autochtone ?

Revitalisation

On parle souvent de langues en voie de disparition et justement, le Narungga, parlé par le peuple aborigène du même nom, n’échappe pas à cette règle. En effet, selon des statistiques de 2016, cette langue ne serait plus parlée que par 27 personnes et l’objectif de l’AISSA est d’explorer comment le Narungga, qui est une « langue endormie » d’un des plus anciens peuples vivants du monde, pourrait être revitalisé avec l’aide des nouvelles technologies, et plus spécialement, de la robotique avec un robot humanoïde. La finalité de ce projet est de partager la connaissance de la culture et de la langue Narungga avec les enfants et les enseignants de cette communauté, afin de donner une chance au Narungga de perdurer, comme il le fait déjà depuis des siècles.

Pour rendre viable ce projet, l’équipe de l’AISSA, avec le soutien du directeur de l’école, a rencontré la dernière locutrice à parler couramment le Narungga, Tania Wanganeen, elle-même appartenant à ce peuple aborigène méridional.

Par la suite, les données recueillies permettront la transmission de cette culture et de sa langue.

Robotique

Assisté de jeunes élèves de l’école, Peter, le responsable de ce projet, a élaboré un programme, utilisé dans le processus d’enseignement et d’apprentissage de la petite école de Maitland, afin de prendre part à la prise de conscience du respect et de la compréhension et de la culture et de la langue Narungga et cela, par le biais de diverses matières scolaires.

Pink, le petit robot humanoïde a intégré toutes ces données et peut, par exemple, évoluer dans un labyrinthe représentant les différentes régions de l’Australie tout en les nommant avec leurs noms en langue Narungga.

Tous les élèves de l’école ont été mobilisés à ce grand projet pédagogique. Si les assistants en programmation étaient de 3e année, les plus jeunes (1eet 2e années) ont également mis la main à la pâte en s’occupant de la reconnaissance visuelle de Pink en créant des images d’animaux du pays afin que Pink les reconnaisse et prononce leur nom en Narungga.

À cela s’ajoute la reconnaissance faciale, qui permet à Pink de reconnaître chacun des jeunes visages des écoliers et de les saluer en langue aborigène. Ainsi, saluera-t-il, par exemple, la petite Ameerah avec : « Nigh Ameerrah knuckle ja » ou«je vois Ameerah ». Même la prononciation n’a pas été laissée au hasard. Au début, Pink a dû recevoir plusieurs leçons de phonétique pour améliorer sa prononciation, comprenez par là qu’on lui a intégré différentes combinaisons phonétiques afin d’arriver à la bonne !

Avec Pink à la rescousse, et surtout avec des personnes désireuses de voir continuer des langues d’exister, les langues en voie de disparition pourraient connaître une nouvelle vie, voire une résurrection. Bon nombre de locuteurs – ou descendants, ou encore de simples passionnés ! - de langues anciennes ou autochtones ont démontré leur envie de les voir  survivre et ont tenté de continuer à les enseigner par le biais des nouvelles technologies, des applications pour téléphone intelligent ou de sites Internet spécialisés, voire de robots, comme c’est le cas en Australie.

Il est à noter que le projet Pink a obtenu une reconnaissance nationale de L’ACARA - Australian Curriculum, Assessment and Reporting Authority (autorité statutaire indépendante chargée de l’élaboration d’un curriculum national, d’un programme national d’évaluation et d’un programme national de collecte de données et de production de rapports favorisant l’apprentissage des étudiants australiens) en tant qu'un des huit exemples à travers le pays de la façon dont les technologies numériques pourraient être intégrées dans l'apprentissage par les élèves du primaire de la langue et de la culture des propriétaires traditionnels de la terre : le peuple Narungga.

Longue vie aux langues et à celles et ceux qui se battent pour elles, hommes ou robots !

Sources et illustrations 


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