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Publié le 04 novembre 2019 Mis à jour le 04 novembre 2019

Cahier des charges pour des réseaux apprenanciels

Des réseaux communicationnels vers des réseaux apprenanciels

Trois réseaux sinon rien

Les réseaux sociaux font partie de nos vies, une littérature abondante s’efforce d’en décrire la topographie, les propriétés, structure, centralité, fonctionnalité, usages, limites, mises en garde etc.

Avec internet, plusieurs types de réseau se développent

  • Les réseaux communicationnels
  • Les réseaux transactionnels
  • Les réseaux apprenanciels

Face aux insuffisances des réseaux favorisant l’apprenance, voici d'abord une nomenclature des réseaux et ensuite une proposition de cahier des charges à destination d’entrepreneurs du net ou de start-up engagés dans la edTech.

Les réseaux communicationnels

Il s’agit des réseaux où priment les échanges et la communication directe entre une variété d’acteurs. Les grands réseaux sociaux Facebook, Linkedin, Instagram, Twitter etc. s’inscrivent dans cette logique d’échange et de production continue de « conversations »

Les réseaux transactionnels

Les réseaux transactionnels sont par définition des réseaux basés sur des transactions. Ils favorisent les échanges de biens et de services et organisent les paiements. Ils forment une interface efficace entre offre et demande, fournisseurs et clients. Aibnb, Uber, Trivago, en sont de bons exemples. Le cœur de ce type de réseau réside dans la force du tiers de confiance proposé.

Ils envisagent de plus en plus leur futur sous la forme de la technologie des blockchains ou chaîne de blocs. La chaîne de blocs est une base de données distribuée (un registre), qui contient une liste toujours croissante de transactions horodatées, cryptées et organisées en blocs, chaque bloc étant lié au précédent pour former une chaîne. Cette technologie basée sur l’idée d’un web décentralisé et infalsifiable joue un rôle de tiers de confiance et vient faire concurrence aux établissements financiers ou administrations traditionnelles qui garantissaient des droits, des accès et de la confidentialité. Les crypto monnaies sont adossées à ce principe organisateur.

Avec cette technologie, on s’aperçoit que le cœur de métier d’un banquier ou d’un assureur réside moins dans la maîtrise de l’argent et son efficacité à le faire prospérer que dans la capacité à garder et diffuser la confiance quoiqu’il se passe. Nombre d’acteurs aimeraient faire de la confiance le moteur de leur croissance. C’est ainsi que le prototype de blockchain publique créé par Ernst & Young a pour intention de permettre aux entreprises d'effectuer des transactions avec un nombre illimité de partenaires dans un réseau ouvert. Il ambitionnerait de préserver la vie privée et les données des participants.

Les réseaux apprenanciels

Il n’existe pas encore de réseau pleinement convaincant dans le coapprentissage. Les difficultés de pérennisation des approches connectivistes (Downes et Siemens, Itypa, CercleAPE), les tentatives d’ubérisation des savoirs (plateforme mettant en lien demandeur de savoir et offreur de savoir), les réseaux d’échanges réciproques des savoirs en ligne (exemple de La Poste), et jusqu’aux MOOC ne sont pas encore pleinement convaincants même si des progrès immenses ont été accomplis. On observe en effet un taux conséquent d’abandon dans les MOOC (plus de 90%) et un épuisement des promoteurs d’approches connectivistes

Pour distinguer ce nouveau type de réseau des réseaux communicationnels ou transactionnels, je propose deux néologismes « réseau apprenanciel » et « intelligence collective numérique ».

Un cahier des charges pour favoriser des réseaux apprenanciels et une intelligence collective numérique devrait s’intéresser à plusieurs dimensions en partant de l’apprenant et de ses pratiques réelles de navigation et non de gestionnaire de réseau et de pratiques de surveillance de contrôle et de rentabilisation des données :

  • Une ergonomie favorisant l’apprenance 
     
    • Choix de menus pour favoriser l’auto-direction des apprentissages
    • Ressources accessibles et réellement pertinentes (recyclage ou ressources déjà en circulation s’abstenir)
    • Appropriation facile et rapide des créations et logiques de groupe et de sous groupes
    • Suivi de progressions ou de navigation du point de vue de l’apprenant, pourquoi pas des cartes ?
       
  • La prise en compte du savoir, vouloir et pouvoir apprendre et de leurs spécificités à distance
     
    • Le savoir est diffus sur le net, il fonctionne en flux et non en stock, un réseau apprenanciel aurait pour caractéristique une traçabilité des flux de savoir
    • Le vouloir est sujet aux difficultés d’ordre attentionnel, un réseau apprenanciel disposerait de qualités pour se centrer ou pour naviguer
    • Le pouvoir dépend des facteurs favorables à l’apprentissage : temps disponible, prérequis mobilisables, appui et environnement favorable
       
  • La prise en compte des capacités d’autoformation effectives et des pratiques réelles de navigation des apprenants

Ce type de réseau apprenanciel devrait favoriser l’émergence de l’ »intelligence collective digitale » dont la définition pourrait être « La capacité collective de s’accorder sur des outils et des protocoles d’interaction en ligne pour agir et apprendre ensemble ». Et elle comprendrait  également des éléments tels que

  • La construction émotionnelle du sentiment d’appartenance
  • Les rituels de consolidation du collectif (comprenant notamment des possibilités de rencontres physiques, la création de langage propre)
  • La possibilité de codécider et de faire évoluer son cadre d’apprentissage, c’est-à-dire la structure même du réseau  

Accès, confiance et relations

L’accès à une variété d’acteurs socialement, physiquement, psychologiquement est un immense point fort des réseaux communicationnels.

La confiance est un des éléments clés de la chaîne de blocs

Mais ces deux formes de réseaux sont insuffisantes pour développer l’apprenance qui combine bien d’autres éléments puisqu’apprendre se caractérise plus comme une transition axée sur un projet d’apprendre plutôt que comme un simple bavardage ou une transaction avec un échange à la clé.

L’interaction d’apprentissage est finalisée, elle poursuit une fin. Bien sûr de la même façon qu’il existe des apprentissages informels tout au large de la vie, il existe aussi un apprentissage informel numérique ou chacun apprend au détour de ses pérégrinations sur le net. Myriam Benabid dans sa thèse distingue 4 modes informels d’apprentissage numérique :

  • diffuser du contenu grâce aux outils tels que les réseaux sociaux;
  • suivre les tendances de son métier ou de son secteur d’activités par des mises à jour ponctuelles et réactives. Cette démarche de veille est opportuniste et ce mode est mobilisé si les circonstances le permettent comme l’utilisation de temps creux, d’attente et de transports;
  • mobiliser toutes les ressources numériques disponibles nécessaires pour atteindre son objectif, par exemple à l’occasion d’une  nouvelle mission qui nécessite de s’autoformer;
  • réagir aux difficultés qui se présentent dans l’exercice de son activité, et utilise sa force d’apprentissage pour le bon besoin, au bon moment.

Les réseaux apprenanciels ,qui restent à imaginer, devront combiner les dispositifs de formation ordonnancés et organisés pour atteindre des objectifs pédagogiques identifiés dans un référentiel mais devront aussi prendre en compte les pratiques réelles des apprenants, diffuses, morcelées, souterraines, anarchiques et informelles.

Pour le concepteur d’un dispositif, le risque d’éluder les pratiques réelles des apprenants est celui de passer à côté de leur disposition à apprendre et de construire des programmes, des consignes, une cathédrale pédagogique vide de fidèles.

Illustration originale : Geralt - Pixabay

Sources

Le Monde Informatique - IBM et Chainyard dévoilent leur réseau blockchain « Trust Your Supplier »
https://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-pourquoi-ernstetyoung-lance-des-blockchains-publiques-73358.html

Edt Tech https://edtechfrance.fr/

Blockchain https://blockchainfrance.net/decouvrir-la-blockchain/c-est-quoi-la-blockchain/

Ernst et Young https://www.ey.com/ca/fr/services/advisory/it/blockchain-in-devops

IMTech Apprentissage informel numérique
https://blogrecherche.wp.imt.fr/2019/05/09/numerique-apprentissage-informel/

Thèse Myriam Benabid - Les modes informels d’apprentissage numérique : le cas des travailleurs du savoir
http://www.theses.fr/2018PSLED010

L’autoformation https://www.cairn.info/l-autoformation--9782130586906-page-117.htm

Savoir stock et savoir flux https://cursus.edu/11255/savoir-stock-et-savoir-flux


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