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Publié le 24 février 2019 Mis à jour le 24 février 2019

Quadrants pédagogiques : pour réfléchir à l'avenir de la classe -1/3

L'avenir est-il entre les mains des managers et décideurs de l'éducation ?

Aujourd’hui, les élèves changent et les écoles se cherchent de nouveaux modèles. Le Professeur Elmore de l’Université d’Harvard donne depuis plusieurs années un cours en ligne, un MOOC appelé “Leaders of Learning”.

Ce cours a pour objectif de distinguer les 4 principales façons d’apprendre et donc d’enseigner dans notre société occidentale actuelle, que ce soit en classe ou dans des communautés diverses et variées. Cet état des lieux de ce début du 21ème siècle donne une vision à 360° de nos façons de faire, qu’elles soient traditionnelles, émergentes ou non structurées.

4 façons d’inculquer les savoirs

Elles vont servir de modèles aux apprenants. Dans beaucoup de cas, ce sera peut-être le modèle unique qu’ils utiliseront. Elles vont formater les apprenants à leur vie future. Et, selon le modèle choisi, parfait pour certains, pourra créer chez d’autres une forme de rejet qui les mènera éventuellement à un décrochage en classe. Le modèle enseigné va structurer leur façon de gérer ou d’appréhender le monde qui, par extension, va s’étendre à leur façon de manager ou d‘être managé, ou voire dans certains cas, de n’être jamais manageable.

C’est pourquoi aujourd’hui les écoles et leurs décisionnaires sont quasi forcés de réfléchir aux nouveaux modèles de société à venir et quels seront les besoins réels en matière de processus de management pour adapter leurs enseignements afin que les professionnels apprenants correspondent à l’offre du marché de l’emploi de demain. Nous vivons une aire disruptive qui comporte plusieurs mutations. Mais les mutations ne se focalisent que sur le contenu; la forme de l’apprentissage est tout aussi fondamentale pour réussir ce défi.

Les processus changent. Les besoins, les motivations et les façons de faire des nouvelles générations sont de plus en plus décalées par rapport aux façons classiques de faire des anciens. Nous sommes au milieu d’une disruption et l’école ou en tout cas les managers de l’éducation doivent faire des choix justes afin que les changements soient négociés dans le positif, en gardant en tête qu'il auront peut-être un effet à long terme. Avec le 16ème siècle est arrivée la normalisation qui a mené plusieurs siècles plus tard à la notion d’égalité, avec le 21ème siècle, nous allons vers l’individualisation qui a pour horizon celle de l’équité.

“Le cadre des modes d’apprentissage est organisé autour de deux axes.

L'axe horizontal qui part du hiérarchique vers le décentralisé. Et l'axe vertical qui part de l’individuel vers le collectif”.

Cours “Leaders of Learning” par le Professeur Richard Elmore de l’université d’Harvard
https://www.edx.org/course/leaders-of-learning-1

“Lorsque nous disons hiérarchique, nous voulons dire que la connaissance est organisé en flux d'apprentissage du sommet vers la base. L’information est séquentielle ou dite linéaire. Chaque séquence est particulière et est bien définie dans le processus d’apprentissage. Nous y apprenons de façon individuelle une chose à la fois, l’une après l’autre et de façon simplifiée (sortie de son contexte et souvent de son usage, elle peut-être qualifiée d’intellectuelle ou théorique) et chaque connaissance est validée au fur et à mesure de l’apprentissage.

Comment faire alors lorsque nous voulons apprendre des blocs de connaissances ?
Là, nous pouvons utiliser la méthode qui se trouve à l’autre extrémité de cet axe, qui s’appelle la méthode dite distribuée. Cette connaissance-là est multiple car elle gère de multiples connaissances à la fois, mais aussi car elle est utilisée par et pour plusieurs personnes en même temps. La valeur de cette typologie de connaissances est déterminée par son utilisation réelle et par les champs du possible des gens qui vont y avoir accès. C’est l’apprenant, par ces premiers choix, qui va en déterminer la valeur et la nature de la connaissance : de ce qui est intéressant et ce qui doit être appris.

Lorsque nous parlons d’individuel, nous voulons dire par unité primaire d’apprentissage qui correspond à une personne - la personne seule. Cet apprentissage-là est une activité purement individuelle et personnelle. Et cela n'arrive que lorsque des individus sont engagés dans un apprentissage direct.

Lorsque nous disons collectif, nous entendons que l’apprentissage est principalement une activité sociale. Autrement dit, les gens se rapportent les uns aux autres autour de choses qu'ils ont en intérêt commun. Et c’est cette relation, ou cette interaction sociale, qui aide et encourage apprentissage”.

Transcription de la synthèse de cours par Virginie Guignard Legros -
Cours “Leaders of Learning” par le Professeur Richard Elmore de l’université d’Harvard -
https://www.edx.org/course/leaders-of-learning-1

Nous avons donc là, deux axes et deux extrémités à partir desquels se définissent les 4 quadrants. Le premier, celui du hiérarchique individuel, c’est notre modèle scolaire traditionnel. Celui enseigné dans peut-être 90% des écoles de la planète pour les apprentissages initiaux comme lire, écrire, compter qui sont des apprentissages précis car non interprétables et ne pouvant être soumis à aucune latitude de choix individuels. Ils doivent s’acquérir cerveau par cerveau. À l’inverse les apprentissages sociaux collectifs sont typiques de ceux par exemple de la cour de récréation. Ce sont des savoirs pratiques, utiles, itératifs et sociaux.

Quels genre de pédagogies pour quels genre de structuration de l'individu et du groupe ?

"Le premier type de management pédagogique est le modèle hiérarchique individuel qui a une structure chronologique.

On y apprend de la base vers le compliqué selon une structure par tranche d’âge. Il y a des attentes de niveaux d’acquisition des savoirs selon les âges, selon les sujets dans lesquelles chaque apprenant est responsable de ses résultats scolaire. C’est un système compétitif individuel qui tend vers l’idée d’un sommet à atteindre.

Ce modèle correspond à la façon classique de transmettre les savoirs. Le professeur est le vecteur qui va transmettre “la connaissance”, comme on l’observe dans le processus de “gimwali” et ses élèves sont des disciples engagés dans une course au premier de la classe.

Le second est le modèle collectif hiérarchique de la connaissance.

Les élèves y démontrent leurs capacités en avançant séquentiellement à travers différents niveaux de contenu. Ils sont différenciés en fonction de leur rendement scolaire. La différence avec le modèle individuel compétitif est qu’il est une activité centrée sur le collectif. L’apprentissage y est communautaire et a pour but de développer la conscience civique et le dévouement. L’objet d’attention n’est plus là de nature compétitive mais basée sur la relation à l’autre. Tout comme le “Kula” est centré sur le comportement de l’autre.

 

 

L’autre quadrant collectif est dit en anglais “distributed”, traduit par le terme décentralisé.

Il suppose que les gens peuvent apprendre en dehors des hiérarchies, en créant des réseaux d'intérêt commun. C'est un type d'apprentissage auto-organisé. Ces réseaux sont composés de personnes qui ont divers degrés d'expertise et de connaissances. Selon les intérêts des participants, ils se nourrissent mutuellement de la compréhension et des différences générés par la communauté coopérante. C’est un enchevêtrement complexe de relations basées sur le respect mutuel que l’on peut rapprocher du “giri” japonais ou de l’intelligence collective.

La dernière typologie est de nature individuelle décentralisée selon des choix personnels.

C'est la poursuite de la connaissance pour son propre bien ou pour sa valeur pour l‘apprenant qui choisit et exerce un contrôle sur son apprentissage. Il est fortement basé sur les dispositions et qualités de l’apprenant individuel. Ce n'est souvent pas médiatisé par quelqu'un qui s'appelle un enseignant. Il nécessite de créer des supports de cours créatifs, alternatifs, nouvelles et innovantes. C’est la liberté qui est le leitmotiv de ce cadran, l’absence de contrainte, de hiérarchie. Le soi dans la connaissance universelle que l’on peut associer à l’altruisme transmis par Matthieu Ricard et ses pairs.”

Source : Le don et le contre don : mouvement de civilisation au Japon
Virginie Guignard Legros
https://cursus.edu/11320/le-don-et-le-contre-don-mouvement-de-civilisation-au-japon

 

Pour obtenir des gens collaboratifs, il faut leur inculquer des modèles collaboratifs. Les mettre dans un groupe en prenant soin et en faisant attention à l'autre comme au sein d'une équipe de basket ball est un pas, mais ce n'est plus toujours suffisant. Le monde dans lequel nous sommes entrés est digital, collaboratif et interlié.

Rester en arrière des innovations dans le cadre de l'école, c'est pégorer l'avenir de notre société en formant des jeunes et moins jeunes dans une stabilité théorique inéluctablement inadaptée plutôt que dans le monde de l'agilité.

 

Suite : Créer l'avenir des professionnels et sociétés de demain

Source image : Pixabay Prawny


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