La motivation se trouve constamment au cœur des réflexions en éducation. Il semble facile de « perdre » les apprenants qui peuvent décrocher quand ils s’ennuient. Forcément, dans ce contexte, enseignants et administrations scolaires essaient de réfléchir à des stratégies de rétention. Le tout sans mettre en péril le sérieux des savoirs et compétences qui doivent être transmis aux étudiants.
Or, s’il existe une pléthore de recherches sur la question motivationnelle, peu s’intéressent aux stratégies pédagogiques adoptées par l’enseignant en classe. Néanmoins, une récente étude de cas faite au Québec pourrait ouvrir davantage la voie à d’autres recherches et modifier l’enseignement universitaire.
L'importance des activités sur la motivation
Les chercheuses Émilie Tremblay-Wragg, Carole Raby et Louise Ménard de l’Université du Québec à Montréal se sont penchées sur ce pan de l’enseignement moins étudié. Elles se sont intéressées à différents modèles de motivation à apprendre et au courant sociocognitif qui accorde une importance particulière au contexte et l’environnement d’apprentissage. Apprendre ne serait pas « inné » et les expériences antérieures d’instruction formeraient un apprenant et pourraient le motiver ou le démotiver selon ce qu’il a vécu.
Parmi les différents modèles de réflexion de ce courant, elles ont entre autres voulu vérifier celui de Viau. Établi en 2014, celui-ci décrit la dynamique motivationnelle par rapport aux activités pédagogiques proposées. L’étudiant aura possiblement trois types de perception à ce qu’un enseignant apporte :
- La valeur de l’activité : l’apprenant doit réaliser ce qui est demandé par l’activité et les efforts cognitifs exigés de sa part;
- Sa compétence : se sentir apte à accomplir la tâche proposée;
- La contrôlabilité : le contrôle de l’étudiant sur le déroulement et les conséquences de l’activité.
En répondant en bonne partie à ces perceptions, la personne fera le choix de s’y engager et de persévérer malgré les difficultés. Cela entraînera en fin de compte l’apprentissage.
Les chercheuses ont donc voulu savoir si ce modèle s’appliquait davantage lorsque les stratégies d’enseignement adoptées sont diverses. Elles ont suivi une classe de 59 étudiants d’un programme d’enseignement préscolaire et primaire. En étudiant durant une session un professeur, elles ont noté les approches et ont interrogé les étudiants par des questionnaires et des entrevues semi-dirigées.
Elles ont choisi cet enseignant puisqu’il utilisait une variété plus grande de stratégies parmi tous les enseignants contactés préalablement, au moins quatorze différentes. Bien sûr, celles plus magistrales se veulent prédominantes (cours, exposés, présentations vidéos) mais d'autres sont présentes et plus interactives comme l’apprentissage par problèmes, le jeu de rôles et des exposés oraux faits par les étudiants. De plus, si certaines se veulent individuelles (travaux pratiques en classe), beaucoup impliquent la communauté de la classe (retours et discussions de groupe).
L'effet de la diversité
Les chercheuses ont cherché à savoir si cette diversité avait un effet positif sur les étudiants. Elles en ont noté plusieurs. D’abord, elle suscite un engagement cognitif bien plus grand chez eux. Ils ont une envie renouvelée de participer en classe, un effet confirmé par le professeur aussi interrogé dans la recherche. Cette pluralité de stratégies permet donc de motiver davantage et de surtout rendre l’apprentissage plus plaisant. Comme le dira une des étudiantes, cela donne un cours moins monotone et répétitif.
Par contre, comme le soulignera l’enseignant aux chercheuses, cette multiplicité dans son cours n’est pas évidente à mettre en place. Elles demandent davantage de planification et d’organisation en plus de coûts importants pour le matériel, entre autres. Sans compter que les administrations universitaires ne favorisent pas toujours l’implantation de cet enseignement plus varié. Il s’agit donc d’un acte de foi de la part du professeur qui doit essayer, malgré les embûches, de proposer ce type de didactique.
Néanmoins, une telle étude de cas pourrait faire bouger les choses. En voyant les résultats positifs résultants d’une approche didactique comme celle-ci, des directions d'établissement pourraient voir d'un autre oeil la variété en enseignement. De plus, les chercheuses aimeraient que soient effectuées d’autres études du genre sur, cette fois, des groupes divers, peut-être moins motivé au départ que celui sondé. Est-ce que la variété améliorerait encore plus leur engagement scolaire? La question reste ouverte à d'autres recherches.
Illustration : World Bank Photo Collection Political Science Professor at University of Ghana, Dr. Evans Aggrey-Darkoh gives a class lecture in Accra, Ghana via photopin (license)
Références
« Résultats | Motivation Et Stratégies Pédagogiques. » CAPRES. Dernière mise à jour : 4 avril 2018. http://www.capres.ca/enseignement-et-apprentissage/pedagogie-strategies-et-moyens-denseignement/resultats-motivation-strategies-pedagogiques/.
Tremblay-Wragg, Émilie, Carole Raby, and Louise Ménard. « En Quoi La Diversité Des Stratégies Pédagogiques Participe-t-elle À La Motivation À Apprendre Des Étudiants ? Étude D’un Cas Particulier. » OpenEdition Journals. Dernière mise à jour : 26 mars 2018. https://journals.openedition.org/ripes/1288.
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