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Publié le 10 décembre 2018 Mis à jour le 10 décembre 2018

Un accent ? Quel accent ?

Prendre ou ne pas prendre l'accent, telle est la question !

« On voit bien que vous êtes Française, vous avez un petit accent »

Voilà mon premier contact avec le Québec, en 1996, où pour moi c’était EUX qui avaient de l’accent, pas moi !

Vous l’aurez deviné, nous parlerons aujourd’hui d’accent. Mais d’où vient-il, cet accent ? Est-ce un phénomène physique ou linguistique ? Le prend-on, l’emprunte-t-on ou est-il inné ? Enfin, la grande question : prendre ou ne pas prendre l’accent ?

L’accent, phénomène physique ou linguistique ?

Selon Wikipedia, 

« L'accent est une particularité de diction d'un locuteur dans une langue donnée. Il est propre à une région ou un milieu social et peut se caractériser par des modifications du débit, de la prononciation, de l'intonation, de la prosodie en général. L'accent en linguistique implique d'une manière remarquable le lexique, ainsi que des renforcements ou des altérations grammaticales et phonétiques. Il permet de différencier des mots, des phrases et des textes.»

Pour nous autres, francophones, quand nous parlons « d’accent », nous pensons à deux choses : au locuteur natif de langue française qui parle français avec un accent de sa région d’origine (par exemple, l’accent québécois, l’accent de la Réunion ou l’accent du sud de la France) et au locuteur étranger qui parle français comme langue seconde ou étrangère. Ici, l’accent est donc de nature linguistique.

L’accent peut également être un phénomène physique par la fluxion de son caractère phonétique : avec une hauteur plus ou moins élevée (c’est le cas du latin avant le changement de son système vocalique), on parle alors d’accent phonétique ou de hauteur ; ou avec une intensité vocale augmentée, on parle alors d’accent tonique ou d’intensité.

Bien évidemment, il y a aussi les accents graphiques, dits diacritiques, qui rassemblent les accents écrits comme l’accent circonflexe, aigu, grave…

Pas vu, pas pris, pris, pendu !

Le romancier français Michel Zamacois (1866-1955) disait 

« Emporter avec soi son accent familier, C'est emporter un peu sa terre à ses souliers ; Avoir l'accent, enfin, c'est chaque fois qu'on cause, parler de son pays en parlant d'autre chose. » 

D’où vient l’accent ? On nait avec ! Comment ça j’ai un accent ? Mais oui ! Mais c’est normal, vous ne faites que répéter ce que vous avez entendu avec vos parents, grands-parents et personnes de votre entourage… et on ne s’en rend pas compte, avant d’être confronté à quelqu’un d’un autre endroit…

Par exemple, je suis née à l’île de la Réunion, avec un accent plutôt chantant, j’ai vécu en Normandie, où l’accent est plutôt dur et rural, puis dans le sud de la France, où l’accent est encore plus chantant, et enfin au Québec où l’accent (mais aussi le vocabulaire) ressemble bien plus à celui de la Normandie et pourtant… à chacun de mes déracinements géographiques, le simple fait d’ouvrir la bouche faisait bien comprendre à mes interlocuteurs que je n’étais pas du coin ! Et pourtant, en assez peu de temps, j’ai pu acquérir des expressions et des sonorités typiquement de la région au point que celles-ci, prononcées par moi-même, choquaient mes amis locaux, pas en négatif certes, mais plutôt : bizarre pour quelqu’un qui n’est pas d’ici de l’entendre parler comme moi ! Petite illustration de ma pensée :

  • En Normandie : « ah ben, v’la au’t chose ! »
  • Au Québec : « T’en veux-tu, toué ? »
  • Dans le sud de la France : « oh, mazette ! »

Le tout prononcé avec l’accent parfait du coin, je précise ! C’est sûr qu’à force d’entendre ces expressions avec le bon ton, on finit par les retenir et à les ressortir sans même nous en rendre compte !

L’accent s’acquerrait donc… oui et non… là encore, je parle en connaissance de cause car outre ces quelques expressions, j’avoue ne pas avoir d’accent québécois quand je parle et je rajouterai même qu’à chacun de mes retours de France, une amie québécoise ne manque pas de me rappeler « on voit que tu étais en France, tu as repris l’accent français » ! Cela voudrait donc dire qu’au Québec mon accent est « moins » français ? Et pourtant, il n’y a pas une fois où je ne me fais pas repérer, donc où est la vérité ?? Étant délocalisé, prenons-nous plus ou moins involontairement une certaine accentuation que nous reperdons une fois de retour dans notre lieu d’origine ? 

Cela fait plus de 13 ans que j’y habite et pourtant, je prends toujours un délicieux plaisir à lire ces « leçons de prononciation », à l’instar de «l’accent québécois en 5 étapes faciles» car, franchement, je ne les comprends pas toutes (je n’ai jamais entendu ni vécu les étapes 3 – ajout du S entre TU et TI- et 4 – ajout du Z entre DI et DU- proposées sur ce site)… les aurais-je donc inconsciemment déjà acquises et assimilées ?!

Pas d'imitation

On peut dire que «l'accent du pays où l'on est né demeure dans l'esprit et dans le cœur, comme dans le langage» (François de La Rochefoucauld, écrivain, moraliste et mémorialiste français du XVIIIe siècle).

Selon Henri Boyer, sociolinguiste français, « Si l’accent relève bien de la variation sociolinguistique, il relève surtout d’une évaluation de cette variation. ». En effet, quiconque possède un accent sera consciemment ou non à l’origine d’une évaluation par un auditoire : en termes de naturel (l’accent est-il authentique / forcé), d’affiliation (fait-il/elle partie des nôtres ?) et de légitimité (a-t-il/elle le droit d’afficher un tel accent ?). 

Devons-nous prendre l’accent du lieu où nous sommes ? Si votre devise est « à Rome, faisons comme les Romains », allez-y ! Le tout est de rester naturel et de se sentir bien. Jouer le jeu, se forcer, imiter, ce n’est pas toujours une bonne idée. Vouloir s'intégrer, appartenir à un groupe socioculturel, c'est bien, mais finalement, la spontanéité, il n’y a que ça de vrai !

Sources 

Illustrations

 


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