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Publié le 17 février 2019 Mis à jour le 17 février 2019

Une machine biologique à apprendre, jusque dans ses tissus...

Quand l'homme s'adapte avec ses virus et ses bactéries

Un problème, une solution

La vie ce sont des acides aminés de quelques atomes que l'on trouve même dans l'espace par exemple à l’occasion de l’exploration de la comète Tchourioumov par la sonde Rosetta.  La terre compte 4,5 milliards d'années d’existence et la vie 3,5 milliards d'années.  Le premier milliard d'année était invivable. La vie serait apparue dans la chimie des océans sous la forme de protéine ou d’ARN (plus instable que l’ADN à la base des virus plus anciens).

La caractéristique de la vie c’est sa capacité à former soi-même un corps autonome à partir de sa propre substance. L'autonomie est une des caractéristiques du vivant comme sa capacité à se perpétuer. Pour cela il existe deux grandes stratégies de reproduction et d'adaptation du vivant. La reproduction sexuée par laquelle la génération suivante est une modification des anciennes. La reproduction permet d'évoluer. La variabilité permet une certaine adaptation. Le mélange produit de la diversité. Mais il y a un coût à payer pour les erreurs. Une autre stratégie est la reproduction asexuée (clonage). Ces méthodes de reproduction sont aussi des méthodes d’apprentissage du vivant pour s’adapter au milieu et y puiser des nutriments.

Homo sapiens : il apprend

L'Homme est la meilleure solution à son principal problème: l'homme. L'homme est en train de détruire la nature.  Il oublie qu'il est aussi la nature. Il doit sans cesse s'adapter à sa nature versatile, capricieuse, instable et trop peu consciente.

L'homme est une machine biologique à apprendre à de nombreux égards. Il ne représente que 0,01% de la biodiversité pourtant, il pèse sans commune mesure de ce qu’il représente sur l'environnement. Dans les circonstances de fragilisation des écosystèmes naturels, son pouvoir d'apprendre pourrait lui être bien utile. Il se niche dans le moindre pli de son corps.

L’ADN qui le compose est à la base de toute forme de vie. C'est un support d'information avec ses 3 milliards de lettres. Avec 4 puissance 100 combinaisons, l’homme atteint une complexité plus grande que toutes les possibilités d'une galaxie voire de l'univers en entier. Toute forme de vie est une championne. Le vivant s'adapte en évoluant et va aux meilleures possibilités pour assurer sa perpétuation. L'évolution est efficace pour créer du vivant. Elle explore de manière aléatoire mais de façon très efficace les meilleures formes. Elle trouve naturellement des optimums. Elle a du mal à dévoluer (régresser vers une forme moins évoluée pour reprendre une voie).

Dans cet amas de cellule, les réactions chimiques au sein du cerveau pourraient bien être en train de muter. Mais, c'est bien plus que de la chimie car la nature humaine est aussi labile que les composants biologiques qui nous composent tels que les hormones, les bactéries, les virus, et jusqu'à nos circuits neuronaux.

Jouer sur les hormones

La friction avec notre environnement nous enseigne. Des neurotransmetteurs et des hormones changent nos humeurs. La dopamine serait-elle en quantité plus grande dans notre corps que la testostérone? Nos consommations d’écrans nous changent.

Et si à force de jouer à des jeux en ligne violents mais qui distribuent des récompenses le cerveau générait plus d'hormones de plaisir? Et si ces hormones du plaisir donnaient plus d'envie de ressentir du plaisir et détournaient de l'agressivité? Je progresse de tableau de jeu en tableau de jeu, j'accumule des trésors et des points d'expérience, de la confiance en moi et des gratifications. Où nous conduit cette série positive? Quelles étaient les hormones dominantes dans les cerveaux de nos ancêtres préhistoriques? Quelles seront celles qui domineront dans le futur?

L'évolution de ces composants chimiques de nos corps dira peut-être nos humeurs et façons futures de penser avec plus de douceur sociale espère-t-on. Peut-on tracer des courbes qui nous orientent vers les évolutions chimiques de notre corps à venir? Plus d'adrénaline moins de sérotonine, et de noradrénaline plus d'ocytocine, quelle courbe va l'emporter? Comment ces hormones vont-elles peser sur notre intériorité? Comment nous permettront-elles d’apprendre ?

Nous mutons avec nos bactéries

De la même manière les bactéries qui grouillent en nous et sur nous sont certainement bien différentes aujourd'hui qu'hier.  Il y a plus de bactéries dans notre bouche (10 milliards) que d'êtres humains sur la planète (7 milliards). Cet ensemble de bactéries est un macrobiome. Pour un corps humain c’est l’équivalent de 3 kilos. Les bactéries fonctionnent par clonage. Les cellules filles sont identiques aux cellules mères. Une bactérie qui se divise en 20 toutes les 20 minutes produit plus d'individus que tous les êtres humains sur la planète. Les ADN de bactéries font exprès de produire des erreurs pour explorer toutes les possibilités du vivant. 10% d'erreur permettent aussi la sporulation pour disséminer plus de bactéries et résister au stress. C'est un code aléatoire, un bruit dans le vivant qui permet de  changer le gène et de s'adapter par exemple à des antibiotiques.

La « théorie de la reine rouge » imaginée par Lewis Carroll fait dire au personnage « Il faut évoluer plus vite que son concurrent et pas seulement à sa vitesse. Sinon plus j'avance, plus je dois aller vite ». Dans le vivant, il y a un enjeu de vitesse. Une réplication trop parfaite empêche l'évolution.

Quelles influences ces bactéries mutantes ont-elles sur nos pensées? Qui a-t-il de commun entre les bactéries que l'on trouve dans notre flore intestinale actuelle et celle que l'on pouvait trouver il y a 10,000 ans? Que se passerait-il si un homme préhistorique était exposé aux bactéries d'un européen urbain? Et réciproquement? Les systèmes immunitaires fonctionnent-ils de la même façon? Notre alimentation enrichie dans le même temps nous renforce et nous affaiblit à force d'être aseptisée.

Nos virus et nos systèmes immunitaires

Le placenta est un tissu qui fait passer les nutriments de la mère vers l’enfant mais pas le système immunitaire. Un virus a infecté l'ancêtre des mammifères et a permis de ne pas détruire l’embryon corps étranger dans le ventre de la femme. Il a laissé une part en lui qui est une contamination virale. 8% de notre génome ADN est d'origine virale.  Comment définir ce qu'est le soi et le non soi quand une part du vivant nous est étrangère et apprend à s’adapter pour son compte propre?

Nos corps et notre usage corporel du monde

Si vous vous asseyez sur une place de l'amphithéâtre de la Sorbonne vous vous sentirez à l'étroit et vous ne saurez peut-être pas où poser vos coudes et où allonger vos jambes. Et pour cause les morphologies contemporaines se sont développées. Le fait que la taille humaine soit proportionnellement plus grande et que les corps soient plus lourds que les premiers humains entraine aussi son lot de mutations.

Le sol parait plus bas, les sollicitations du corps transforment la forme des os, des tendons et des muscles qui s'allongent. Dans le même temps les efforts musculaires sont moins exigés par la vie moderne et ses facilités
(voiture, ascenseur, escalateur, etc.). La mécanisation de nombreuses tâches oriente nos systèmes sensorimoteurs vers d'autres sensibilités. Le temps que le cerveau ne passe pas à coordonner nos muscles est occupé à des préoccupations d'interfaçage et de communication.

Nous avons le temps de penser à de nouvelles choses ou pour certains d’accéder à plus de loisirs pour s'amuser, dormir ou ruminer. Les conditions sociales de notre monde modifient nos façons de nous projeter et d’apprendre.

Nos réseaux neuronaux et nos interfaçages internes et externes

Il reste enfin les circulations nerveuses. 14 milliards de neurones qui peuvent produire un million de milliard d'octets.  Les neurones sont les cellules les plus longues du corps humain certains peuvent mesurer 1 mètre (s'étendant parfois très loin du corps principal).

Le deuxième cerveau est un plexus nerveux (zone nerveuse dense) dans l'intestin. 10% des messages qui parviennent au cerveau passent par l’intestin. 80% de ces messages concernent la régulation interne. La vue est l’un des principaux sens d’un être humain pour appréhender le monde. Quid des adaptations au monde quand des heures de connexion déforment nos vues (50% de myopes dans les pays occidentaux), modifient les liens entre neurones. Nous voyons un monde plus brouillé. Notre câblage neuronal sur-stimulé par les signaux lumineux mute également. Une meilleure connaissance du cerveau explorant la complexité des multiples liens donne lieu à l’explosion des neurosciences.

Apprentissage cellulaire, apprentissage environnemental

En apparence nos corps, leurs squelettes, leurs tissus, leurs morphologies et leurs organes se situent dans le prolongement de nos lointains ancêtres préhistoriques mais les circulations, les tissus mous, les bactéries et virus qui les composent ont évolué sous la pression du milieu et des usages sociaux.  Sans même parler de l'idée de s'augmenter soi-même pour rattraper la performance des machines créés, le corps humain connaît sa propre dynamique.

La trajectoire actuelle de son adaptation au monde est toujours incertaine, en particulier à un moment où les humains ne cessent de façonner une nature pour leur seul usage. Le fait numérique ses écrans, ce sentiment continu d'interaction, la sollicitation permanente du cerveau, l'usage immodéré des algorithmes et d'une puissance de calcul finissent par s'immiscer au cœur même de notre machine d'apprentissage et pourraient bien influer le développement même de nos cellules.

Cela est un espoir d’adaptation aux conditions de la vie pour l’espèce humaine, tellement la nourriture, l’air, les sols, la biodiversité sont affectés par nos actes et se modifient.

Illustration : Geralt - Pixabay

Sources

Wikipédia – vie - https://fr.wikipedia.org/wiki/Vie

L’homme pése 0,01% du vivant sur la terre et il en est le plus grand destructeur
http://www.up-magazine.info/index.php/planete/biodiversite/7805-l-homme-pese-0-01-du-vivant-sur-terre-et-il-en-est-le-plus-grand-destructeur

Futura sciences. ADN https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-adn-87/

Thot Cursus – Les hormones en jeu pour apprendre
https://cursus.edu/11163/les-hormones-en-jeu-pour-apprendre

Le web pédagogique L’hypothèse de la reine rouge
http://lewebpedagogique.com/brefjailuleblogduprofdesvt/2014/11/16/evolution-lhypothese-de-la-reine-rouge-van-valen-1972/

Santé médecine. Le journal des femmes – Le plexus nerveux
https://sante-medecine.journaldesfemmes.fr/faq/37489-plexus-nerveux-definition

CNRS La comète de Rosetta contient des ingrédients de la vie
http://www.insu.cnrs.fr/node/5833

Wikipédia - bactérie - https://fr.wikipedia.org/wiki/Bact%C3%A9rie


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