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Publié le 21 mai 2018 Mis à jour le 21 mai 2018

À la recherche du bon dosage d'examens

Depuis 2017, le Québec cherche en dehors de ses frontières une façon d'évaluer les élèves qui requiert moins d'examens

Pour beaucoup de gens, les évaluations sont le socle sur lequel repose la scolarité. Pour ceux-ci, ce sont les examens qui révèlent le degré de compréhension d’un apprenant par rapport à une discipline, quelle qu’elle soit. Et pour l’État et les établissements de formation supérieurs, il s’agit d’un indicateur majeur d'accès à une année de scolarité supplémentaire. Or, quel est le bon dosage d’évaluations? La question s’est posée au Québec à la fin de l’année scolaire 2016-2017.

En effet, le ministre de l’Éducation du Québec réfléchissait publiquement à la possibilité de diminuer le nombre d’examens ministériels afin d’offrir plus de temps d’enseignement. La réflexion était déjà poussée par un syndicat d’enseignants, la FAE (Fédération autonome de l’enseignement).

Une surcharge d'examens

Le Québec fait passer cinq examens aux élèves du primaire (en 4e et 6e année) et six à ceux du niveau secondaire (durant les deux dernières années). Le problème, comme le dénonce la FAE, est que ces examens sont souvent beaucoup trop longs. Celui de mathématiques en 6e année du primaire s’étend sur cinq jours. Et parfois, ils ne prennent parfois pas en compte ce qui est enseigné. Par exemple, celui de mathématiques de secondaire quatre en juin 2017 a été un de ceux où il y a eu le plus d’échecs : près de 29 % comparé au 6,3 % de juin 2016. L’examen contenait la résolution d’une situation de conjecture, un thème au programme rarement enseigné car cela ne figurait jamais dans les épreuves ministérielles. De plus, les apprenants n'avaient pas le temps de compléter l'épreuve.

Lorsqu’il se compare aux autres provinces canadiennes, le Québec est l’endroit qui propose le plus d’examens ministériels autant au primaire qu’au secondaire. Le double par rapport à l’Ontario et la Colombie-Britannique. Alors que le débat s’est amorcé en 2017, la question reste : le Québec doit-il imiter d’autres pays dans le monde?

Les modèles français et coréens

Par exemple, le modèle français du baccalauréat peut-il être viable? Possible, cependant le bac est une période très stressante pour les élèves français qui doivent en une semaine compléter neuf à dix épreuves. Ce n’est peut-être pas la solution idéale. Et que dire de la Corée du Sud? Ce pays asiatique pour qui la réussite scolaire est primordiale vit, chaque mois de novembre, le suneug.

Des centaines de milliers de lycéens doivent réussir cet examen pour entrer à l’université. De 8h30 à 17h40, incluant repas et pauses, il leur faut répondre à des questionnaires à choix multiples sur le coréen, l’anglais, une autre langue étrangère, les mathématiques et un sujet entre la sociologie, l’enseignement technique ou les sciences. Le pays laisse alors place aux lycéens : les travailleurs doivent entrer une heure plus tard pour laisser la voie libre au transport des jeunes, les chantiers de construction sont suspendus pour la journée et même le trafic aérien est retardé durant la période des examens de langue pour qu’ils puissent écouter les extraits sonores.

Cela veut donc dire que les étudiants n’ont qu’à vivre une seule épreuve globale durant leur parcours scolaire. Cependant, cela équivaut presque à une épreuve olympique. Il faut être en forme et prêt pour cette journée précisément et espérer obtenir au moins 450 points sur 500. D’ailleurs, des parents vont prier des mois à l’avance afin que leurs enfants réussissent leur suneung. Il arrive aussi de voir des élèves en pleurs quitter leurs parents, gangrénés par la peur d’échouer. Ceux qui subissent un échec ont plus de chance de faire une dépression ou de commettre un suicide. Bref, l’approche coréenne se trouve tout aussi exigeante à sa façon.

Évaluer autrement

Et si la solution passait par d’autres méthodes d’évaluation? Prenons l’exemple finlandais. Ce pays qui continue de figurer au top des classements des systèmes d’éducation a décidé il y a quelques années de faire une réforme de l’enseignement. D’ailleurs, celle-ci avait fait un si grand bruit que le pays a dû répondre à des questions et commentaires soulevés par cette nouvelle approche. Parmi celles-ci, une concernait les examens. Ceux-ci, contrairement aux rumeurs, n’ont pas disparu, mais ils n’ont plus du tout la même importance. En fait, le système finlandais décide de faire un suivi plus proche de chaque élève. Les examens ne sont pas les seules formes d’évaluation. L’enfant est aussi impliqué dans son évaluation. Une idée qui fait son chemin hors du pays scandinave.

D’ailleurs, la Colombie-Britannique a adopté cette approche d’auto-évaluation de la maternelle à la fin du primaire. Cela ne remplace pas l’évaluation du professeur mais d’un complément qui s’ajoute à la note finale. Ils doivent noter leurs points forts, leurs faiblesses et comment peuvent-ils améliorer ces dernières? Ils sont même conviés à développer un portfolio numérique qui permet un suivi et aussi comme base d’exercice d’écriture. Évidemment, les parents sont encore dubitatifs dface à la méthode, croyant que leurs enfants ne s’accorderont que du positif. Or, les expériences actuelles tendent à montrer, selon le personnel scolaire britanno-colombien, que la plupart d’entre eux sont forts juste pour s’évaluer. Une façon, comme en Finlande, de responsabiliser les élèves dans leur apprentissage.

D’ailleurs, cette méthode finlandaise intéresse certaines écoles alternatives au Québec. Il est toutefois loin de la coupe aux lèvres avant que le Ministère de l’Éducation québécois accepte d’intégrer une telle philosophie d’enseignement à travers toute la province. Néanmoins, le débat ouvert en 2017 par les enseignants et le ministre laisse espérer que le Québec pourrait repenser son dosage d’examens ministériels et leur conception afin d'offrir une évaluation juste des élèves.

Illustration : pedrik Writing in red via photopin (license)

Références

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Dion-Viens, Daphnée. « Des Profs Veulent Réduire Le Nombre D’examens. » Le Journal De Montréal. Dernière mise à jour : 30 mai 2017. http://www.journaldemontreal.com/2017/05/30/des-profs-veulent-reduire-le-nombre-dexamens.

Dion-Viens, Daphnée. « Des élèves Qui S’évaluent Par Eux-mêmes. » Le Journal De Québec. Dernière mise à jour : 10 juin 2017. http://www.journaldequebec.com/2017/06/10/des-eleves-qui-sevaluent-par-eux-memes.

Dion-Viens, Daphnée. « Examen De Quatrième Secondaire : Taux D’échec 4 Fois Plus élevé En Math. » Le Journal De Québec. Dernière mise à jour : 2 février 2018. http://www.journaldequebec.com/2018/02/02/examen-de-quatrieme-secondaire-taux-dechec-4-fois-plus-eleve-en-math.

Gagnon, Jean-François. « L’école En Mode Finlandais. » La Tribune. Dernière mise à jour : 17 février 2018. https://www.latribune.ca/actualites/estrie-et-regions/lecole-en-mode-finlandais-ba26fa5ce32f433fbc1928d1a6cb600f.

Lehtniemi, Ninni. « La Vérité Sur L’école Finlandaise. » VoicilaFINLANDE. Dernière mise à jour en juillet 2016. https://finland.fi/fr/vie-amp-societe/la-verite-sur-lecole-finlandaise/.

Mesmer, Philippe. « Le Jour Du Bac, La Corée Du Sud Arrête De Respirer. » Le Monde.fr. Dernière mise à jour : 1er décembre 2016. http://www.lemonde.fr/m-moyen-format/article/2016/11/29/le-jour-du-bac-la-coree-du-sud-arrete-de-respirer_5040166_4497271.html.

Noël, Dave, Marie-Michèle Sioui, and Marco Fortier. « Moins D’examens, Plus De Temps D’enseignement? » Le Devoir. Dernière mise à jour : 7 juin 2017. https://www.ledevoir.com/societe/education/500582/les-liberaux-bloquent-une-demande-d-enquete-sur-les-notes-gonflees.

Roux, Gérald. « C’est Comment Ailleurs ? Le “suneung” En Corée Du Sud. » Franceinfo. Dernière mise à jour : 15 juin 2017. https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/c-est-comment-ailleurs/c-est-comment-ailleurs-le-suneung-en-coree-du-sud_2217608.html.


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