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Publié le 28 novembre 2017 Mis à jour le 28 novembre 2017

Qui est M. MOOC ?

Retour sur l'accompagnement du MOOC la classe inversée à l'ère du numérique

Avatar de Monsieur MOOC

M. Mooc, qui êtes-vous ? Êtes-vous un Bot comme on peut en rencontrer beaucoup sur twitter ?

M. MOOC : C’est vrai qu’à première vue, Monsieur MOOC est partout et quasiment tout le temps. Sur Fun Mooc, la plateforme qui héberge le MOOC classe inversée depuis maintenant 3 ans, sur Twitter à travers son compte de veille @monsieur_mooc et surtout sur Viaéduc, réseau social des enseignants pour accompagner les participants au MOOC…

Cette omniprésence - difficile à concevoir pour un être humain aux capacités cognitives ordinaires (en tout cas seul) - est le résultat d’une goût immodéré pour l’innovation, d’un amour incommensurable de l’animation de communautés, de valeurs éthiques fortes comme le partage, la collaboration et l’entraide personnalisée … des valeurs profondément humanistes en somme. Je suis un tout formé d’unités et de personnalités diverses, un poil schizophrène mais je crois que c’est ce qui plait aux participants.

J’aime me définir comme un concept, oui, un concept humaniste.

En quoi est-ce le reflet d’un collectif et de penser l’éducation de demain ?

M.M : Ce concept humaniste se traduit dans la complémentarité des approches et de styles d’écritures que chacun et chacune développe au travers de Monsieur MOOC. Cette diversité au service d’un collectif transparaît sur les différents supports d’existence de celui-ci. Certains y voient un avatar d’une personnalité mais il est en fait le reflet d’une pluri-personnalité. Mais Monsieur MOOC ne souffre pas encore d’un trouble dissociatif de l’identité!

Le fait que différents auteurs se fondent dans le concept de Monsieur MOOC ne signifie pas qu’ils s'effacent ; mais que chacun construit un espace d’expression propre, libre dans le cadre et les valeurs portées par Monsieur MOOC. Il n’exclut pas les débats ou les contradictions mais il essaie de les intégrer au mieux dans la vie des réseaux sociaux.

Qui se cache derrière M. MOOC ?

M.M : Un collectif de professionnels Réseau Canopé Nouvelle-Aquitaine qui oeuvre dans l’ombre et souhaite garder l’anonymat. Une équipe de professionnels aux compétences et qualités multiples : gestion de projet, communication, innovation, formation, gestion de l’information, documentation, design pédagogique, …. mais surtout c’est un ensemble d’individualités engagées dans un projet mouvant et qui, chaque année, nous apporte son lot de surprises et de rebondissements.

Nous ne sommes pas tous enseignants et nos profils sont variés. Adaptabilité, créativité, réactivité et écoute sont essentielles…

En quoi est-ce le témoignage de votre engagement pédagogique et professionnel ?

M.M : Monsieur MOOC croit dans le travail collaboratif partagé selon des tranches d’animations, de structurations des échanges avec des apprenants et de belles rencontres, pas toujours parties sous les meilleures hospices.

On se souvient d’un enseignant étranger qui n’arrivait pas, pour la troisième fois à s’inscrire à Viaéduc ; il était assez remonté. Lorsqu’enfin, il fut délivré, il a adressé à Monsieur MOOC le plus beau bouquet de fleurs virtuelles de toute sa courte vie.

De fait, l’engagement est avant tout une histoire de relation à autrui, de l’empathie que nous pouvons avoir et que nous essayons de diffuser.

C’est drôle cette manière de parler de M. MOOC comme d’une véritable personne.

M.M : Mais c’est une véritable personne virtuelle, collective qui a son réseau de relations au travers des échanges avec les apprenants du MOOC mais pas que. Monsieur MOOC, c’est aussi une histoire de flux d'échanges qui fonde son identité :



Votre collectif a-t-il évolué au cours du temps ? En quoi cela nourrit votre dynamique ?

M.M : L’équipe en elle-même a déjà été renouvelée en partie depuis 2015 (on a presque le turn-over d’une start-up en fait !). Seuls quelques piliers, à la genèse de la formation, sont encore présents. Nous accueillons chaque année de nouveaux éléments en interne quand certains nous quittent pour d’autres horizons professionnels. C’est aussi un de nos axes de travail : le transfert de compétences en back office pour la multiplication des savoir-faire et le renouvellement des missions de nos membres.

Faire un MOOC c’est avoir une bonne idée, une vision pédagogique clarifiée, un planning serré du déroulé sur 6 semaines, des partenaires motivés mais surtout une équipe sur laquelle s’appuyer avec confiance pour sa pluralité et son engagement... Et c’est aussi pour cela que Monsieur MOOC n’est ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre.

Un MOOC, c’est la liberté d’apprendre, de prendre, de le faire en transversal ? En quoi votre état d’esprit se rapproche du droit des lecteurs ?

M.M : Ah, les dix droits des lecteurs de Daniel Pennac ! C’est un sujet éminemment central même si cela n’a pas encore totalement pénétré les représentations sociétales autour des MOOC. En effet, l’évaluation d’un tel dispositif se résume au fameux taux de complétion. Qui est arrivé au bout des 5 ou 6 semaines de formation ? Qui a réussi son attestation ?

On lit bien trop souvent le succès d’un MOOC au prisme de ce pourcentage qui ne reflète pas les dynamiques en jeu : les apprenants ont la liberté de ne pas finir, de butiner des informations au gré des semaines, de dialoguer, de s’opposer, de construire ensemble...Est-ce que, pour autant, les apprenants n’ont rien appris ?

Cette liberté, ces droits des lecteurs, on tente régulièrement de les intégrer en leur proposant des semaines thématiques, mais progressives qui restent autonomes. L’idée de leur proposer de réaliser un projet pédagogique de manière participative dans le parcours Initiation va dans ce sens.

Cet état d’esprit transparaît également dans les démarches de suivi du MOOC : certains sceptiques plus ou moins forcenés de la classe inversée s'inscrivent pourtant à ce MOOC, le suivent et le commentent. Certaines de leurs remarques nous permettent aussi d'avancer de manière critique sur les choix que nous avons fait, tant sur le contenu que sur la forme.

On sait que M.Mooc est un être collectif bienveillant, humaniste, on connaît le taux d’abandon dans ce type de dispositif. M. Mooc est-il un moyen de soutenir les participants qui pourraient décrocher ?

M.M : Exactement ! Si nous reprenons les critiques souvent avancées dans ce type de dispositif (manque de médiation et de retour de la figure enseignante, émulation de groupe inexistante…), il est certain qu’une formation à distance ne sera jamais équivalente en terme de rapports humains à une formation en présentiel. Très bien. Mais comment faire pour se saisir de cette opportunité que sont les MOOC notamment en terme de formation continue ? Est-on réellement certain qu’un apprenant est forcément plus passif devant son écran qu’en cours magistral descendant dans un amphi surpeuplé ?

Nous essayons, depuis 2015, de développer dans le MOOC Classe inversée un accompagnement de qualité des participants via de multiples canaux de communication (Twitter, Viaéduc, FUN…), dans un souci de réactivité permanente. Il s’agit bien d’animation d'une communauté, une partie souvent oubliée dans la gestion des MOOC car chronophage et engageante pour l’équipe pédagogique en back office, mais qui garantit une forte valeur ajoutée aux apprentissages proposés.

Au-delà de cette animation de communauté, nous cherchons à développer les interactions entre pairs à travers des projets collaboratifs sur le parcours Initiation, pour que chacun puisse créer son propre réseau d’inverseurs pendant le MOOC mais surtout au-delà.

Et enfin, cerise sur le gâteau, les enseignants inverseurs présents dans les captations du MOOC nous rejoignent chaque année dans Viaéduc. Après quelques semaines de prise en main, les participants peuvent compter sur leur expertise et leur bienveillance dans le développement de leurs projets collaboratifs. Monsieur MOOC tient ici à les remercier encore pour cet investissement et pour leur enthousiasme renouvelé.

Certains continuent à jouer leur rôle de mentors après le MOOC et échangent régulièrement avec nos anciens participants.

Le décrochage est souvent le fruit d’une mauvaise perception de l’échec, à la manière de Charles Pépin, valorisez-vous l’échec comme un moyen de réussir ? Ne serait-ce pas un moyen de changer le regard de l’enseignant sur l’évaluation ?

M.M : La place de l’échec se situe à deux échelles différentes, d’une part sur le discours dans le MOOC sur la thématique spécifique de la classe inversée, d’autre part sur le décrochage des apprenants dans le MOOC.

Dans ce MOOC, nous essayons de partir aussi des pratiques enseignantes, qui est une matière vivante avec des tâtonnements, des échecs et des réussites. Il ne s’agit pas de montrer que les classes inversées sont nécessairement des solutions à des problèmes de classe. Ce sont des pratiques, non un modèle, ou pire, un dogme. L’échec participe du processus de conception à condition, comme le rappelle Charles Pépin, qu’il soit vertueux et c’est là où l’accompagnement prend tout son sens.

Le décrochage des apprenants du MOOC est souvent un argument pour montrer l’échec de ce type de formation : “les MOOC feraient pschitt”. Cependant les critères d'évaluation évoluent et le taux de complétion n’est qu’une variable.

Dans le dernier numéro de la revue Distances et médiations des savoirs, Marc Trestini et Richard Cabassut notent bien que la motivation des apprenants sur un MOOC est multiple et ne consiste pas nécessairement à finir (et donc réussir) la formation. Bon nombre s’inscrivent pour glaner, sélectionner, butiner ce qui leur paraît le plus intéressant pour leurs propres pratiques.

Que souhaitez-vous développer comme geste professionnel, n’y-a-t-il pas de l’empowerment des enseignants et des formateurs dans votre philosophie de travail ?

M.M : Si, certainement. Elle renvoie à la question de la liberté pédagogique de l'enseignant. Il reste celui qui propose les pratiques qui lui semblent les mieux adaptées à la progression de ses élèves, de sa classe. Choix individuel, choix collaboratif selon les niveaux scolaires et le degré d’implication des équipes pédagogiques.

Mais cette liberté pédagogique relève de choix, qui s’appuient sur une connaissance des dispositifs mais aussi dans la confiance en soi, de l’envie, de la conviction. Et ces éléments, ce sont certainement dans les échanges (physiques ou virtuels), dans le partage, qu’ils se construisent. En cela les enseignants, par le biais de ce type de formations, développent une forme d’empowerment qui renforce les choix pédagogiques effectués. Ces choix, qui relèvent d’une stratégie pédagogique, constituent un geste professionnel que ce type de formation vient sécuriser, rendre efficient dans le processus de conception de séquences pédagogiques.


Cette interview a été particulière, nous l’avons construite à distance, à l’aide d’un document en partage, du téléphone, de direct message et par visioconférence. Je peux même avouer que je ne savais pas toujours qui me répondait derrière votre avatar. C’est assez déstabilisant car cela m’a obligé à réfléchir sur ma propre posture de blogueur. Pensez-vous que cette manière de travailler, le choix de créer un personnage, témoigne de la pédagogie et du monde de demain ?

M.M : La question est double : d’une part, sur les méthodes de travail à distance et d’autre part sur la constitution d’un personnel virtuel polyphonique. Sur les méthodes de travail à distance, il me semble que les collectifs ont, depuis une bonne dizaine d’année, entériné l’idée de ce type de travail collaboratif et à distance, comme a pu le montrer la thèse d’Isabelle Quentin sur les fonctionnements et trajectoires des réseaux en ligne d’enseignants.

Sur la question du personnage Monsieur MOOC (qui excède la figure de l’avatar) et de la pluralité des personnes qui interviennent en son nom, nous avons pris le contre-pied des reproches très souvent justifiés des personnes qui se cachent derrière un pseudo ou un avatar pour discourir de manière peu respectueuse. Et si finalement, Monsieur MOOC assumait la pluralité de ses voix, en toute transparence ? Ce n’est pas une manière de se dissimuler mais bien d’affirmer la posture pluricéphale.

L’objectif est bien de clarifier et simplifier les relations entre l’équipe du MOOC et les usagers de la formation. On souhaite éviter la cacophonie des échanges qui participe de l’infobésité actuelle.

Enfin, créer un personnage permet de lui créer une histoire collective, un storytelling interactif ce qui permet d’accessoiriser Monsieur MOOC, en fonction des saisons des formations (chapeau, lunettes…).

Nous n’avons pas encore poussé cette scénarisation vers les humeurs de Monsieur MOOC, ses aventures...Mais nous y réfléchissons pour créer du lien plus avant, tout au long de l’année, autour des ressources sur la classe inversée.

Quel bilan tirez-vous de cette édition du MOOC et de l’expérience en général ?

M.M : C’est avant tout une histoire de vie commune : à plusieurs dans un même costume, avec des milliers dans les relations tissées. Il y a une forme d’exigence directe à renseigner les apprenants dans la mesure où ils sont à deux pas de nous, derrière leurs terminaux. Si, parfois, les échanges virtuels peuvent être d’une certaine froideur, dans un cadre comme celui-ci, la partition s’écrit à plusieurs voix de manière quasi instantanée.

La difficulté reste le fait de pouvoir répondre et échanger avec un nombre croissant de personnes présent sur le MOOC (6 500 inscrits la première année, 9 100 l’année passée, 9 900 cette année).

Il se pose la question du cycle du MOOC, comment renouveler les contenus et les modalités d’apprentissages et d’échanges pour susciter l’envie auprès des collègues ?

Thot Cursus est un média francophone, qu’est-ce qu’il y a de la francophonie dans votre projet ?

M.M : La francophonie est un élément central dans la réflexion sur les MOOC comme sur les classes inversées. Pourquoi ? Les MOOC offrent des possibilités importantes au travers de son acronyme : cours massifs, ouverts et en ligne. Les besoins en formation dans les pays francophones ont explosé notamment dans les universités africaines. Le travail sur les MOOC est en plein développement.

M. Mooc, comment rêvez-vous l'École de demain ?

M.M : Monsieur MOOC est un personnage qui s’ancre dans l'école d'aujourd'hui et, certainement qu’un jour, Monsieur MOOC ne sera plus de ce monde. Alors il peut toujours rêver à une école qui continue à porter les valeurs d’égalité, d’accès à la connaissance, où tous les partenaires se font confiance.

Le travail collaboratif autour de Monsieur MOOC reflète aussi ces valeurs, que l’on porte aussi au travers du réseau Canopé.

Illustration de Monsieur MOOC, Reseau Canopé

Sources

M. Mooc, twitter

La classe inversée à l'ère du numérique, Session 3, Plateforme FUN, Réseau Canopé, session 2017.
https://www.fun-mooc.fr/courses/Canope/80001S03/session03/about

MOOC Classe inversée à l’ère du numérique, Réseau Canopé, 2017
https://www.reseau-canope.fr/notice/mooc-classe-inversee-a-lere-du-numerique.html


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