Avant l’apprentissage par l’erreur c’était comme ça
La méthode essai-erreur est une méthode systématique de résolution de problème. Il s’agit de réaliser autant de tests que nécessaire et d’ajuster la tentative jusqu’à ce que la solution émerge. Édison n’a pas inventé l’ampoule en une seule fois, mais après 1 200 tentatives et en utilisant 6 000 échantillons de végétaux. Après tous ces essais une lumière a surgi.
C’est par une maladresse que madame Tatin a inventé la tarte du même nom et les gourmands ne s’en plaignent pas. De même Alexander Fleming a découvert la pénicilline en retrouvant des moisissures dans ses boites de Petri de retour de vacances. Cela a été possible car ces inventeurs ont été attentifs à la finalité de leur tâche. Ils ont accepté l’erreur et l’ont transformé. L’erreur est «apprenante» quand on se donne la peine de comprendre ce qui se passe.
L’accélération du cycle essai-erreur s’inscrit comme une stratégie de développement organisationnel qui systématise des retours d’expérience à partir des tentatives avortées ou réussies. La stratégie habituelle des organisations est de créer un maximum de procédures pour minimiser les erreurs.
Parfois même les organisations refusent d’évoquer les difficultés car elles remettraient en cause des décisions ou seraient des mises en cause personnelle de dirigeants.
Une mine d'erreurs à prospecter
Le sociologue Morel dans les « Décisions Absurdes » explique comment l’armée de l’air américaine a fait chuter les incidents puis les accidents dans ses programmes de vols. C’est en demandant à chaque pilote de déclarer ses erreurs, ses difficultés, ses méformes (de façon anonyme), qu’une base de données a permis d’inspirer les équipes en charge de la conception des appareils et de l’ergonomie des plans de vol. Il était alors possible de créer des formations ou des dispositifs de prévention limitant des incidents et erreurs prévisibles. L’approche s’est ensuite étendue à toute l’aviation civile.
L’accélération du cycle essai-erreur transforme une organisation bureaucratique en organisation apprenante car elle regarde avec bienveillance ses dysfonctionnements et les corrige en douceur plutôt que de rechercher des coupables et de distiller la peur de mal faire. Saviez-vous que c’est en se trompant dans les dosages de colle que le «post-it» a été inventé ?
Reconnaître ce qui est
Le management peut s’inspirer de la pédagogie. Le droit à l’erreur est une norme pédagogique voulant que chaque personne ayant commis une erreur de bonne foi ne soit pas sanctionnée. En pédagogie l’erreur est apprenante à la condition d’avoir un travail réflexif à son sujet. Pour Isabelle Barth, l’erreur n’est pas une faute morale, c’est en se confrontant à ses erreurs que l’on apprend. Chaque fois que l’on agit on réussit ou on rate, dans tous les cas on apprend si on prend de la distance. A cette condition l’erreur est apprenante.
Certaines organisations plus avancées vont jusqu’à la célébration des échecs. Cette célébration vise à identifier des personnes qui ont appris de leurs échecs et sont en capacité d’en témoigner. Cela suppose beaucoup de bienveillance de la part des participants qui reçoivent les témoignages des autres comme des cadeaux. Les dirigeants doivent être les principaux porteurs de cette culture d'entreprise. Parfois ces entreprises avancées organisent même des séminaires de célébration des échecs. À cette occasion les peurs de mal faire sont mises de côté seuls comptent les apprentissages individuels et collectifs et les nouvelles opportunités décelées.
Avec le pouvoir numérique l’apprentissage par l’erreur c’est comme ça
La puissance de calcul offerte par les ordinateurs offre la possibilité de démultiplier les boucles d’apprentissage, d'enregistrer des cheminements et de retracer des informations, de revenir sur des moments clés, de les observer finement et d’opérer des corrections. Il est possible d’évoquer un apprentissage adaptatif quand la puissance de calcul est utilisée pour répondre aux besoins individualisés des apprenants. Cet apprentissage adaptatif serait aussi ancien que les travaux sur l’intelligence artificielle que l’on peut faire remonter aux années 70. Plusieurs déclinaisons d’un appui numérique sont repérables.
Disposer de base d’exercices et refaire un exercice autant de fois que souhaitée
L’un des succès des plateformes comme celle de la Khan Academy est la possibilité de pouvoir réaliser des exercices autant de fois que nécessaire pour maîtriser une tâche et cela à son rythme. L’erreur est alors une simple étape d’un parcours d’apprentissage qui ne renvoie pas de jugement négatif à celui qui l’a commise. Mathenpoche, ortholud, jerevise, anglaiscours sont autant de bases d’exercices utilisables.
Utiliser les environnements en réalité virtuelle
On se souvient des séances d’autoscopie, où l’on se filmait en action et où l’on pouvait revoir des séquences pour corriger un geste. Désormais les environnements virtuels permettent à peu de frais d’apprendre à conduire des voitures (Vrroom), de faire des opérations délicates dans des usines (Optics Valley), de se préparer à des gestes lors d’incendie, ou d’accouchement. On peut revoir les séances d’entrainement dans les environnements virtuels et appréhender ses protocoles et réactions. La réalité virtuelle est un atout pour faire des erreurs à moindre frais.
Disposer de modèles statistiques avec les données massives
Les données massives peuvent être utilisés pour disposer et créer des modèles prédictifs d’usages de services ou des comportements humains. Un peu à la façon des prévisions météo qui anticiperaient les réactions des masses nuageuses. Les MOOC et les masses de données laissées par les participants permettent de générer des learning-analytics permettant d’optimiser le parcours des apprenants, repérer des décrocheurs potentiels et aller au-devant de leurs besoins.
Disposer d’un système tutoriel intelligent
Un système tutoriel intelligent permet d’apprendre de ses erreurs. Derrière cette expression la TELUQ classe les micro-mondes, les jeux sérieux et les simulations. Ce type d’apprentissage est particulièrement pertinent pour les connaissances procédurales, où il s’agit de maîtriser des informations. Ces systèmes disposent de bases de connaissances et de moteurs d’inférence qui permettent l’analyse des réactions d’un apprenant et personnalisent le contenu de l’apprentissage et la progression proposée. Ils sont particulièrement efficaces quand ils offrent de nombreuses rétroactions et des renforcements positifs.
Crowd testing
Le crowdtesting est une technique utilisée par les start-ups issue des courants de l’innovation ouverte utilisant la diffusion sur les réseaux sociaux de solutions-prototypes à une masse d’individus avant même la version définitive. Les réactions rapides des usagers potentiels autorisent des corrections au fur et à mesure de la mise au point du produit ou service. La notion d’erreur de conception initiale est complétement gommée car elle est intégrée dans le processus de conception.
Conclusion
L’apprentissage par et avec l’erreur reste un choix des organisations. Certains dirigeants perçoivent le bénéfice d’erreurs au sein de leur entreprise et ils s’efforcent de les guetter non pour les sanctionner mais pour identifier quand elles sont porteuses de nouvelles façons de fonctionner et d'autant d'améliorations potentielles. Cette disposition à l’égard de l’erreur est à mille lieux des apprentissages scolaires et de la normalisation des comportements formant des générations de bons élèves obsédés par la mémorisation des recettes mais parfois complétement atones en matière d’innovation, d'adaptation et de créativité.
Source :
Wikipédia- Méthode essai erreur - https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thode_essai-erreur
Comment innover ? Séquence 7 Accélération du cycle essai-erreurs Idéation et design thinking
http://4cristol.over-blog.com/2013/11/chapitre-2-comment-innover-s%C3%A9quence-7-acc%C3%A9l%C3%A9ration-du-cycle-essai-erreurs-id%C3%A9ation-et-design-thinking.html
FrenchWeb - Droit à l’erreur et célébration des échecs - Aude Sibuet
https://www.frenchweb.fr/droit-a-lerreur-et-celebration-des-echecs/299857
Christian Morel - Les décisions absurdes
https://www.decitre.fr/livres/les-decisions-absurdes-9782070457663.html
La célébration des échecs - Entrevue avec Patrick Baudouin directeur de l'innovation pédagogique à Kedge Business School
https://www.youtube.com/watch?v=Qnk_9cP3oP0
Watzlawick Faites vous-même votre malheur
https://fr.wikipedia.org/wiki/Faites_vous-m%C3%AAme_votre_malheur
Watzlawick Comment réussir à échouer
https://www.decitre.fr/livres/comment-reussir-a-echouer-9782757841815.html
Wikipédia - Le droit à l’erreur
https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_%C3%A0_l%27erreur
L'ampoule électrique : Histoire D'une Invention - Gralon
https://www.gralon.net/articles/materiel-et-consommables/materiels-industriels/article-l-ampoule-electrique---histoire-d-une-invention-4031.htm
La découverte de la pénicilline
https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9couverte_de_la_p%C3%A9nicilline
Découverte de la tarte tatin
http://www.serendipite-strategique.com/exemples_3/tarte_tatin.html
Isabelle Barth – Comment apprendre de ses erreurs
https://www.youtube.com/watch?v=mRBrOuexmnI
TELUQ - Système tutoriel intelligent
http://wiki.teluq.ca/ted6210/index.php/Syst%C3%A8me_tutoriel_intelligent
Presse citron – Expérience d’une plate forme de crowtesting d’un nouveau genre - Cyril-Bladier
https://www.presse-citron.net/experience-une-plateforme-de-crowdtesting-dun-nouveau-genre/
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