Il s’agit du sujet qui obsède les médias et le grand public, particulièrement depuis la deuxième moitié de 2016. Le mot a même symbolisé cette année. La venue au pouvoir de politiciens populistes comme Donald Trump a en outre un impact majeur sur les fameuses « fausses nouvelles », les « fake news ». Aussi utilisée comme une insulte pour dénoncer un média avec lequel nous ne sommes pas d’accord plus que pour véritablement identifier des articles écrits dans le but de tromper le public.
Si des adultes éduqués et des travailleurs de l'information tombent dans le panneau, imaginez maintenant des enfants qui sont plus crédules encore. D’ailleurs, une étude souvent citée faite par la Stanford Gradute School of Education montrait que les jeunes étaient pratiquement incapables de discerner une bonne d’une fausse nouvelle. Ils font plus confiance à un article sur Facebook dont la provenance a seulement l’air véritable qu’à un autre d'une source authentique. Conséquemment, l’école n’a pas le choix. Elle doit enseigner aux jeunes ce travail d’investigation.
La bataille pour les faits est commencée
En effet, qu’ils le veuillent ou non, les enseignants n’ont pas le choix d’embarquer dans cette guerre à « l’infaux ». Parce que, actuellement, les jeunes adorent les théories de complot et les chaînes YouTube qui leur racontent n’importe quoi. D’autant plus que les adolescents se moquent de la véracité; l’important est que ça soit sensationnel. Heureusement, certains Youtubeurs ont décidé de faire oeuvre utile et d’apporter un peu de raison sur Internet.
C'est dans Internet !
Néanmoins, l’école reste un milieu clé afin de contrer cette tendance à la hausse. Et le travail ne se fait pas que depuis 2016. Déjà des établissements de journalisme, comme celui-ci à New York, travaillent sur le sujet depuis 2007. Toutefois, il faut les conscientiser bien avant les études postsecondaires. Plusieurs pays, y compris les États-Unis, ont compris l’importance de le faire. En Suède, dès juillet 2018, la notion de vérification des faits sera enseignée à partir de l’âge de 10 ans afin de que les petits Suédois cessent de tout gober sur Internet. Le ministère de l’Éducation va même utiliser un célèbre personnage de bande dessinée et de dessin animé, un ourson jaune appelé Bamse, qui devra montrer à ses amis que ce qui est publié sur les réseaux n’est pas toujours vrai ou exact.
En septembre 2017, la Fondation pour le journalisme canadien et CIVIX ont annoncé qu’ils instaureront dès 2018 un programme dit Actufuté afin d’outiller les jeunes face aux fausses nouvelles. Celui-ci devrait être déjà mis en œuvre en 2018 en Ontario où auront lieu des élections provinciales.
Le tout devrait être étendu et prêt pour la campagne électorale nationale à l’automne 2019. Pourquoi cibler ces moments ? Parce que les périodes électorales sont encore plus propices au partage de fausses nouvelles sur les réseaux sociaux. En France, le CLEMI (Centre pour l’éducation aux médias et à l’information) travaille fort afin de contrer le phénomène des « fake news ». Sa brochure 2017-2018 propose d’ailleurs de nombreuses informations et activités à faire dans le cadre de l’éducation aux médias.
Jouer à dénicher et créer de fausses nouvelles
Ces activités du CLEMI ne seront pas superflues face à des professeurs qui ne savent pas nécessairement comment contrer ce phénomène. Parce qu’on a beau leur dire qu’ils peuvent et doivent combattre les « fake news », cela ne reste pas simple. Les élèves ont souvent plus envie de croire les histoires abracadabrantes. Bien sûr, tous essaient de leur apprendre à regarder les sources de ce qu'ils lisent, comprendre qui écrit, s’il y a une notion de biais, s'il s'agit d'une parodie, etc. Or, d’autres activités plus ludiques peuvent aussi servir à leur inculquer comment cela fonctionne.
Par exemple, pourquoi ne pas leur faire rédiger de fausses nouvelles ? Une école de Californie s’est associée avec une dans l’Iowa. Les élèves de cette dernière devaient lire par Skype deux articles réels de journaux et un autre faux composé par eux. Les enfants californiens avaient alors cinq minutes pour faire un peu de recherche et ensuite, affirmer quel article était faux et surtout pourquoi. Les élèves de chaque côté ont réalisé qu’il n’y avait pas besoin d’être sensationnel pour être une fausse nouvelle, que de simples petits changements « crédibles » pouvaient confondre les autres.
Une enseignante du Massachusetts, quant à elle, rappelle à ses étudiants que les nouvelles inventées existent depuis fort longtemps. Par exemple, on attribue à Marie-Antoinette une fameuse phrase qu’elle aurait dite pour parler des gens qui ne pouvaient plus manger de pain : « Qu’ils mangent de la brioche! » Or, cela a été à tort attribué à la reine de France par des pamphlets antimonarchistes. Bref, déjà sans Twitter et réseaux sociaux, les fausses nouvelles pouvaient se propager. Internet n'a seulement que permis une multiplication plus rapide.
Enfin, pour ceux qui veulent ajouter une couche ludique, il y a un serious game uniquement en anglais qui peut être joué gratuitement. Il s’agit de Factitious, un jeu sur navigateur pensé aussi pour les appareils mobiles. Un court article apparaît. Après lecture, il faut décréter s’il est véridique ou faux. Pour s’aider, il est fortement conseillé de révéler la source du texte. Celle-ci permet souvent de discerner le vrai du faux.
Le combat contre les « fake news » est ardu. Il n’est pas évident pour les professeurs de devoir toucher ce sujet sensible. Néanmoins, il n'est pas nécessaire de l'aborder qu'en faisant la morale aux jeunes. Il existe des façons de l’aborder qui soient constructives ou même amusantes et qui leur permettra de comprendre le « comment » et le « pourquoi » de ce type de texte partagé en ligne.
Références
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Rambal, Julie. "Enseigner Les Fake News Aux Enfants, Nouvel Enjeu De L’école - Le Temps." Le Temps. Dernière mise à jour : 25 août 2017. https://www.letemps.ch/societe/2017/08/25/enseigner-fake-news-aux-enfants-nouvel-enjeu-lecole.
"« Médias Et Information, on Apprend ! »." Canopé Direction Territoriale, Académies De Besançon Et De Dijon. Dernière mise à jour : 27 septembre 2017. http://canope.ac-besancon.fr/clemi/?p=2782.
École branchée. "Actufuté : Le Rôle Du Journalisme Pour Faire Face Aux « Fausses Nouvelles »." Carrefour éducation. Dernière mise à jour : 26 septembre 2017. http://carrefour-education.qc.ca/actualite/nouvelles/actufute_le_role_du_journalisme_pour_faire_face_aux_fausses_nouvelles.
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