Les MOOCs sont les lieux de rencontre entre des apprenants d’origines, de cultures, de contextes et de langues maternelles variées.
Quelquefois les gens se croisent sur des forums, font des exercices ou des projets ensemble et d’autre fois ils n’ont aucune interaction entre eux. Pour expliquer ces différentes attitudes, deux points essentiels peuvent être pris en compte. Le premier touche à la structure du MOOC et à ses objectifs. Le deuxième est en lien avec l’étudiant, ses origines, son contexte et son attitude culturelle.
Un MOOC ou un “Massive Open Online Course” est un espace de connexion virtuel pour des centaines, voire des milliers de personnes à travers la planète. On en distingue plusieurs déclinaisons pour en comprendre la logique :
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le MOOC formatif : c’est le MOOC classique qui est un clone virtuel de la classe universitaire, avec un forum de discussion. Il est appelé xMOOC
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le MOOC informatif : Il ne forme pas à un savoir penser ou faire ou un savoir-être. Il donne des informations souvent essentielles sur un sujet précis. Il n’a pas encore d’acronyme. Nous l’appelerons infMOOC
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Le MOOC connectiviste : c’est un MOOC atypique qui a pour objectif d’enrichir les apprentissages et les bases de connaissances par les apprenants eux-mêmes. Il est appelé cMOOC
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Le MOOC lab : c’est un parcours dans un MOOC qui permet à des étudiants de se former en équipe pour répondre à un exercice ou à un projet. Nous pouvons nommer le concept labMOOC en attendant un acronyme officiel.
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Le iMOOC : l’”Inquiry-based Learning” se base sur une démarche d'enquête et de résolution de problèmes dont les résultats viennent étoffer la base de données existantes.
Après, il existe d’autres typologies, qui ne sont des variantes sur d’autres critères, comme les SPOCs (“Small Private Online Course”) tournés vers les groupes privés ou les COOC (“Corporate Open Online Course”) créés par ou pour des entreprises privées.
Le plus interactif d'entre eux est le cMOOC, qui a un fonctionnement communautaire. Les seconds au classement sont le LabMOOC et le iMOOC par équipe. Le troisième le xMOOC et le dernier qui est le moins collaboratif est le infMOOC.
Bien entendu, il existe des formules mixtes de MOOC dont le classement est à relativiser, selon la motivation de leur équipe d’encadrement à les rendre interactifs. Souvent cette collaboration est visible par l’émulation ou par des forums. Des équipes savent faire vivre un forum et d’autres non. Cette donnée peut brouiller la vision des choses et rendre des structures de MOOCs quelquefois plus conviviales et collaboratives et d’autres moins vivantes qu’elles ne le sont habituellement.
Ainsi dans les xMOOC, LabMOOC, iMOOC et cMOOC, les interactions sont plus ou moins grandes aussi en fonction de leurs usagers apprenants qui souvent viennent d’horizons différents. Ils peuvent avoir des langues maternelles différentes, mais ils utilisent la plupart du temps un langage d’apprentissage commun avec diverses fluidités, sans que cela ait un réel impact dans leurs relations.
Le problème par exemple du français en Afrique francophone face aux langues locales est que dans certains pays africains, le français reste la langue de référence alors que dans d’autres c’est la langue à oublier selon des ethnies et histoires locales. Cela peut avoir un impact sur le choix des MOOCs, non pas qu’il y en ait pléthore dans les langues locales, mais cet état de fait bénéficie aux MOOCs anglophones qui leur sont alors préférés.
Le plus grand frein à la collaboration est principalement lié aux différences culturelles et contextuelles.
Par exemple celui des rythmes de vie : une équipe multiculturelle composée d’Africains de l’ouest et de Suisses, leur gestion très différente des heures peut générer des incompréhensions. Hormis l’heure de décalage des fuseaux horaires, les différences culturelles en matière de ponctualité peuvent générer de sacrées incompréhensions, voire des conflits. Par exemple certains Africains ont une ponctualité à l’heure près alors que les Suisses sont ponctuels à la minute. Il peut y avoir aussi des incompréhensions dues à des attitudes : les occidentaux se regardent naturellement dans les yeux et d’autres ne regardent surtout pas les gens dans les yeux. Les premiers vont interpréter cette attitude pour de la fuite ou du dégoût, alors que ce n’est souvent qu’une marque de respect.
Le Chinois et l’Occidental peuvent aussi connaître des incompréhensions face aux marques de respect. Le Chinois utilise le concept de copie comme un signe de respect ou pour montrer qu’il a compris un concept dans une relation d’élève à enseignant chinoise classique. Cette façon de faire peut créer des perturbations, dans ce cas non plus entre les élèves, mais entre l’élève et l’équipe encadrante. Imaginez un élève qui dans son exercice final reprend des pans entiers de votre cours, alors que vous lui demandez vous de créer autre chose que la transcription de l’enseignement lui-même, et voire même que vous utilisez un logiciel pour repérer les plagiats. Cette situation corrspond à un choc des cultures et aussi des habitudes pédagogiques dans un sens comme dans l'autre.
Certains contextes peuvent aussi être dissonants ou peu propices à des travaux de groupes. Des équipes projet peuvent perdre des équipiers par méconnaissances de leurs habitudes religieuses par exemple. Le cas le plus classique est la programmation des réunions à des heures incompatibles avec le Ramadan. Nous pouvons soulever aussi le problème des contextes techniques et économiques. Il arrive que certaines personnes n’aient pas les moyens d’avoir une connexion permanente sur internet. Les raisons peuvent être multiples. Ca peut être l’usage du réseau en dehors des heures de travail soit dans un cybercafé, soit à son travail dans des heures limitées, soit quelques heures par semaines à cause des coûts importants des télécommunications.
Il existe encore beaucoup d’inégalité pour accéder au réseau internet. Les connexions sont quelques fois aléatoires, le réseau peut être fluctuant. Tous les pays n’ont pas une couverture identique. On notera même que quelquefois les connexions avec la France soient moins bonnes que celles avec certains pays émergents. Il arrive de voir régulièrement des étudiants passer la frontière du pays voisin pour se connecter à leurs formations. Et nous saluons au passage, aussi un cas plus dramatiques et courageux, celui d’un étudiant dont les connexions internet furent coupées dans le cadre d’une situation de guerre et qui passait plusieurs fois par semaine la frontière pour assister à sa formation en équipe.
On remarquera le cas de ressortissants de pays moins ouverts que d’autres aux autres cultures, à la mixité, aux étrangers qui ont plus de mal en tant qu’individus à s’intégrer dans les équipes. Non pas parce qu’ils n’en n’ont pas les capacités, mais plutôt par manque d’habitude de la différence et par manque de connaissance des clefs de compréhension des autres cultures. La tolérance à l’étranger, à la différence est un apprentissage de la vie à part entière.
La mixité des équipes est un atout pour les encadrants des MOOCs que si elle est bien comprise par tous. Il peut être utile d’avoir dans son équipe un spécialiste des diversités culturelles afin de prévenir des situations d’incompréhension et d’ouvrir les yeux de chacun à la connaissance vers l’autre.
Source
Expérience de coordination du GdP-Lab du MOOC GdP de Rémi Bachelet de 2015 à 2017
Image : Pixabay par StartupStockPhotos
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