Jeu vidéo et FLE : qu'en pensent les étudiants?

Pour apprendre une langue il y a évidemment la voie formelle avec un professeur qui donne un cours et des voies plus informelles d’apprentissage. Des personnes curieuses pourront se lancer dans le visionnement de séries ou de vidéos pour entendre comment les personnes prononcent les mots du langage en apprentissage.

D’autres liront des livres ou des journaux en ligne afin de comprendre la syntaxe et apprendre à déchiffrer par soi-même des bouts de texte ou des phrases et paragraphes entiers. Pourtant, il y a un autre média souvent oublié dans l’apprentissage : le jeu vidéo.

Apprendre le vocabulaire pour jouer

Parlez-en à la génération des Y qui ont connu les premières consoles de jeux vidéo. Cette époque était bien loin de la nôtre et où tous les titres publiés comprennent de nombreuses traductions. Particulièrement dans les années de la NES (Nintendo Entertainment System), tout était en anglais. Ainsi, il fallait apprendre. D’abord, par instinct. Les enfants finissaient par saisir que « start » voulait dire démarrer quand une partie commençait après l’avoir sélectionné.

Puis, d’autres mots se rajoutaient en cours de partie. Ce jeune homme raconte, entre autres, comment un jeu comme Castlevania II qui comprenait beaucoup de dialogues nécessaires à la poursuite de l’aventure lui a permis d’apprendre de l’anglais avant même de commencer à l’école. Il lui fallait, certes, consulter des dictionnaires de traduction régulièrement, mais il a fini par retenir des termes bien en avance sur son niveau scolaire comme « object », « inventory », « cemetery », etc. D’autant plus que le jeu permet d’exercer la lecture, mais aussi l’écoute avec l’arrivée des cinématiques à la fin des années 90 et la PlayStation, entre autres.

Conséquemment, certains chercheurs s’intéressent à l’usage de cette approche par le jeu. Parce que celle-ci peut autant être formelle qu’informelle. En effet, il est aussi possible qu’un apprenant se forme dans une langue fortuitement en jouant à un jeu uniquement dans une langue étrangère tout comme il peut le faire en s’adonnant à une partie d’un jeu proposé par un enseignant.

« Commencez »

Ainsi, deux chercheurs ont voulu savoir comment des étudiants apprenant le français comme langue étrangère intégraient cette approche ludique. L’étude a été menée par Gilles Brougère de l’Université Paris 13 et Haydée Silva de l’Universidad Nacional Autónoma de México.

Ils ont envoyé des questionnaires à 300 personnes en FLE entre le mois de novembre 2015 et mars 2016. Ils devaient répondre à 37 questions sur leur maîtrise du français. Les répondants avaient entre 17 et 68 ans, mais les deux tiers appartenaient à la tranche des 20-29 ans.

La majorité d’entre eux étaient Mexicains (66 %), mais en tout, 39 nationalités différentes étaient représentées. Alors, leur apprentissage informel était-il appréciable ?

Pour beaucoup, il semble important de continuer au-delà des cours. Écouter de la musique ou des émissions était l’activité la plus populaire (84 %), suivi de la lecture de documents en ligne (79 %) et de regarder des films, séries télévisées ou vidéos avec des sous-titres autres que le français (70 %). Le jeu vidéo, quant à lui, est beaucoup plus bas. Il est utilisé seulement par le tiers des étudiants, ce qui est quand même pour les chercheurs un chiffre honorable.

Le jeu, oui... s'il est conseillé par le professeur

Car oui, ils se servent du jeu. Or, il provient généralement de l’apprentissage formel. Il s’agit souvent de jeux proposés par l’enseignant pour plus de la moitié d’entre eux. Et quand on leur demande les titres de jeu, reviennent des titres comme Duolingo, Mémorama ou des jeux de grammaire qui sont avant tout destinés à des fins pédagogiques. Bien qu’il y ait quelques jeux vidéo commerciaux et sur consoles citées (Assassin’s Creed, Age of Empires, BioShock ou FIFA), cela reste très marginal par rapport à des expériences ludiques mobiles et pédagogiques.

Pourtant, un pourcentage important d'apprenants considèrent que la pratique de jeux améliore leur français. Ils sont près de 62 % à le confirmer. Toutefois, les chercheurs notent les 21 % qui affirment le contraire et un 17 % qui ne sait pas si cela de réels effets sur leur apprentissage. Les secteurs où les étudiants sentent le plus de progrès en jouant sont dans le vocabulaire, la lecture, la compréhension orale, l’oral en général et la confiance dans la capacité d’utiliser la langue.

Le niveau du joueur

Ainsi, les chercheurs soulignent plusieurs conclusions. Tout d’abord, l’étude a été faite sur des étudiants universitaires où la formation par le jeu est moins une évidence. Il serait intéressant de voir les pratiques dans des niveaux scolaires inférieurs.

De plus, l’attitude des étudiants envers le jeu pour apprendre une langue semble vraiment déterminée, même inconsciemment, par le professeur. Ainsi, les jeux pédagogiques leur paraissent plus pertinents que ceux commerciaux à leurs yeux. Et encore, cela dépend du profil.

Les non-joueurs adorent ces jeux ludiques alors que ceux qui jouent fréquemment les apprécient moins. Le jeu peut apporter des connaissances linguistiques, mais d’une manière totalement différente que par l’approche plus formelle. Les chercheurs veulent d’ailleurs aller plus loin sur le sujet et on souhaite bien lire cette recherche qualitative afin de voir comment le jeu vidéo peut s’intégrer dans une initiative d’apprentissage linguistique.

Illustration : Wikilogia التحسيب البشري Human Computation via photopin (license)

Références

"Le Jeu En Classe De Langue » Le Jeu Entre Situations Formelles Et Informelles D’apprentissage Des Langues étrangères." LeWebPédagogique. Dernière mise à jour : 2 avril 2017. http://lewebpedagogique.com/jeulangue/2017/04/02/le-jeu-entre-situations-formelles-et-informelles-dapprentissage-des-langues-etrangeres-2/.

Ponce, Jean-Yves. "Comment J'ai Appris L'anglais Dans Les Jeux Vidéo Et Comment Vous Pouvez En Faire Autant." Potion De Vie. Dernière mise à jour : 16 mars 2012. http://www.potiondevie.fr/comment-apprendre-anglais-jeux-video/.

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