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Publié le 23 avril 2017 Mis à jour le 23 avril 2017

Qui sont ceux qui picorent les MOOC ?

Pourquoi beaucoup d'étudiants ne consomment pas toute la formation d'un MOOC?

Les MOOC représentent maintenant une part importante de la formation à distance qui se fait dans le monde. C’était d’ailleurs le but : offrir au plus grand nombre possible des formations majoritairement gratuites pouvant mener, ou pas, à de la certification. Des milliers d’étudiants libres qui veulent acquérir de nouvelles connaissances pour le parcours professionnel, étudiant ou simplement par désir personnel.

Toutefois, il serait naïf de croire que tous suivent les formations en effectuant scrupuleusement chaque étape. Sans présence physique ni contrôle, plus facile de se laisser aller à des raccourcis. Et certains s’en font même une spécialité que de simplement picorer et effectuer le strict minimum pour obtenir une certification. Il y aurait souvent plus de certifiés que de personnes ayant tout accompli dans le cours.

Différents échantillonnages

La question n’a pas fait le sujet d’énormément de recherches et il n’y a donc pas de chiffres précis à l’heure d’écrire ces lignes. Toutefois, Matthieu Cisel qui s’intéresse fortement aux MOOC et publiera les premiers résultats qu’il a obtenus en a fait un portrait intéressant. Il appelle le phénomène de «l’échantillonnage». En tant que tels, certains pourraient dire que des MOOC encouragent cette façon de faire : certaines formations proposent littéralement aux apprenants de consulter les rubriques qui les intéressent. Toutefois, cette approche n’explique pas «l’échantillonnage» dans les MOOC.

Dans un autre papier, Cisel précise les types d’échantillonneurs. Il y aurait les utilitaristes qui font une autoévaluation de leurs besoins de formation, analysent la proposition du MOOC et choisissent les chapitres et travaux qui leur semblent essentiels. L’échantillonnage hédoniste quant à lui, est l’acte de sélectionner dans les cours en fonction surtout de l’intérêt, de ce qui leur tente d'apprendre. Enfin, le dernier pourrait être la cause principale de cette hausse spectaculaire d’échantillonneurs dans les MOOC : les minimalistes. Ces personnes essaient d’avoir rapidement la certification en investissant le moins de temps possible.

La littérature anglo-saxonne a déjà donné un nom à ce type de participant, les « solvers ». C’est-à-dire des personnes qui participent à toutes les activités évaluées, mais ne consulteront que peu, voire pas du tout, les cours et les vidéos offertes dans le MOOC. Certains iront même jusqu’à tricher. Cisel citera, entre autres, une étude de 2015 de la plateforme edX montrant que certains individus utilisaient plusieurs comptes pour tester des réponses et avoir le meilleur résultat avec leur compte principal. Une procédure baptisée CAMEO, acronyme de « copying answers using multiple existences online ». Ceux-ci seraient toutefois marginaux, même auprès des « solvers ».

Le rapport amour-haine à la vidéo

Alors, que faire pour diminuer le nombre de picoreurs de MOOC ? Les solutions ne sont pas simples puisque nous n’avons pas encore un parfait portrait de ces personnes. Déjà, les études ne s’entendent pas sur ce qui passionne les apprenants. Une étude, publiée en 2017 et s’intéressant aux étudiants suivant des cours en ligne d’études supérieures montrait que la vidéo YouTube était l’approche préférée de toutes celles proposées (textes, PowerPoint avec narration et projections d’écrans). Il ne s’agissait donc pas d’un MOOC puisque les étudiants étaient inscrits à l’établissement offrant la formation en ligne. Toutefois, s’ils se disaient intéressés par les vidéos, les textes étaient le format le plus consulté. Les chercheurs ont conclu à une habitude de lecture provenant des années scolaires antérieures.

Mais la question se pose : et si ce n’était pas le fait que le texte oblige à se concentrer beaucoup plus que la vidéo ? Matthieu Cisel en parle en citant des études qui montrent qu’actuellement, si les plateformes de MOOC comptabilisent ceux qui démarrent une lecture vidéo, cela ne prend pas en compte les attitudes de lecture. En effet, ils partent du principe qu'elle se fait intégralement ce qui est totalement faux. Des recherches tendent à prouver que certaines parties de la vidéo sont sautées par les utilisateurs alors que d’autres sont écoutées en boucle. Et puis lorsqu'on regarde le temps d’engagement, on se rend compte que l’écoute réelle est de 6 minutes environ. Ce qui fait mal quand on pense aux investissements mis dans ces productions vidéos.

Alors, que faire ? Après tout, l’échantillonnage montre seulement que, par moment, les formations offertes couvrent des sujets maîtrisés par certains des apprenants. Faudrait-il des tests pré-formation pour proposer aux étudiants un parcours plus spécialisé dans le MOOC ? Par exemple, on pourrait ainsi les guider et leur dire de sauter un nombre de chapitres ou de travaux selon leur niveau de compétence évalué.

Quant à la vidéo, elle est à la fois appréciée, mais l’intérêt s'étiole rapidement. Faut-il alors opter pour de plus petits formats ou saisir une formule plus proche des YouTubeurs vulgarisateurs qui arrivent à passionner un public pour une période de 10, 12 ou 20 minutes? Ne risque-t-on pas de perdre du contenu pédagogique au profit de mécaniques pour captiver l’attention comme l’humour ? Bref, beaucoup de questions et encore peu de réponses pour les développeurs de MOOC qui ne peuvent pas ignorer ceux qui picorent leur travail.

Illustration : Efraimstochter / Pixabay

Références

Cisel, Matthieu. "Quand L’on Picore Dans Un MOOC : Retour Sur La Question De L’échantillonnage." Numériques Pédagogiques. Dernière mise à jour : 9 février 2017. https://numpedago.hypotheses.org/101.

Cisel, Matthieu. "Un Autre Regard Sur L’échantillonnage Observé Dans Les MOOC." Numériques Pédagogiques. Dernière mise à jour : 12 février 2017. https://numpedago.hypotheses.org/103.

"Rejoindre Les étudiants De Cours En Ligne Grâce à Des Formats Alternatifs." CAPRES. Dernière mise à jour : 7 avril 2017. http://www.capres.ca/2017/04/rejoindre-etudiants-de-cours-ligne-grace-a-formats-alternatifs/.

"What Type of MOOC Student Are You?" MOOCS.com. Dernière mise à jour : 19 juin 2014. http://moocs.com/what-type-of-mooc-student-are-you/.


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