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Publié le 25 septembre 2016 Mis à jour le 25 septembre 2016

Intégrer la technologie à l'école : un exercice d'équilibriste

Y a-t-il trop de technologies en classe ou ne s'agit-il que de mauvaises intégrations de celles-ci?

Le numérique en classe semble une chose acquise et qui va de soi. Après tout, ces jeunes générations qui sont nées avec Internet à portée de la main devraient voir du bon œil l’usage de technologies à l’école, non? Si, en général, il y a effectivement un enthousiasme à l’utilisation de TICE par les élèves, il peut aussi y avoir une fatigue.

Scepticisme jeunesse

Ce très intéressant billet de François Jourde qu’il a écrit durant l’été 2016 explique comment il se retrouve par moment avec des critiques. Il lui serait reproché un temps trop élevé passé sur l’usage du numérique au détriment, selon l’avis des apprenants, de la matière apprise. Perception juste ou conservatisme plus profond qu’on ne le croit des élèves?

Il s’agit d’un des premiers points de Jourde pour expliquer cette « fatigue techno » chez les jeunes. En fait, nos petites têtes préféreraient le confort du cours magistral et la sécurité de se faire dicter la matière que d’avoir à user de technologies et expérimenter pour apprendre.

D’ailleurs, nous avions traité de ce scepticisme et ce quasi-rejet des serious games. Une donnée qui semblait étrange puisque cette génération joue sur tous les supports possibles. Comment ne pourrait-elle pas vouloir s’amuser avec des jeux similaires en classe?

Un vieux débat toujours vivant

En fait, toute cette incrédulité face aux technologies pourrait leur être transmis par leurs aînés. Après tout, encore aujourd'hui, des avis de penseurs en éducation remettent fréquemment en cause l’usage de TICE et leur mauvaise intégration. Par exemple, cet auteur et éducateur américain se pose de sérieuses questions sur l’approche technologique actuelle qui mettrait l’accent sur les appareils et pas sur l’apprentissage. Il affirmera qu’il n’y a pas une application pour tout et que des modèles d’école sans technos en Corée du Sud, en Finlande et en Pologne montrent des résultats académiques aussi bons, voire supérieurs, à ceux usant régulièrement l’informatique.

Certains enseignants remettent même en doute l’usage de TIC à toutes les sauces. Par exemple, est-ce qu’un cours de philosophie a réellement besoin d’ordinateurs et d’informations quand il s’agit d’abord et avant tout de discussions et d’approches d’analyses de la vie? Même une chroniqueuse du New York Times s’intéressait à la question, montrant qu’en fait l’accès à des ordinateurs en classe et à la maison pour les élèves de la fin du primaire et début du secondaire menait à une diminution des notes. En effet, ils étaient souvent distraits par l’ordinateur et particulièrement les élèves venant de milieux socio-économiques plus pauvres. Pourquoi? Plus branchés à la petite télévision familiale, l’outil informatique était alors automatique associé au loisir.

Voilà des arguments régulièrement utilisés pour ceux qui voudraient d’une école avec peu de technologies (low tech). Cette page compare d’ailleurs les affirmations des technophiles et ceux qui n’en désirent pas. Toutefois, le problème n’est-il pas autre que la « méchante technologie source de distraction »?

Lacune de compétences numériques et mauvais usages des TICE

Pour Jourde, il y a aussi la faiblesse de la formation numérique et l’incompréhension des élèves de l’importance des compétences aux TICE qui mène à leur fatigue et leurs plaintes. En effet, il admettra que les plages d’usage des technologies prolongé dans une période est souvent lié aux explications qu’il a à donner et qui prennent un temps fou. Et ce, même sur des applications très simples. Il y a donc des lacunes plus importantes des apprenants par rapport aux technologies. Ce qui expliquerait l’impression que l’objectif n’est en fait concentré que sur elles.

Évidemment, il y a des usages parfois douteux des technologies. Jourde admet volontiers en faire de temps à autre et certains pédagogues américains l’ont noté. Par exemple, des achats massifs de technologies par des écoles qui n’ont aucune idée de ce qu’ils vont en faire. Nous pourrions citer l’acquisition des tableaux blancs au Québec qui n’était accompagné d’aucune volonté pédagogique autre… sinon que d'avoir l'air branché. En fait, cela ramène la question des TIC en classe au modèle d’acceptation de la technologie. C’est-à-dire qu'il doit y avoir de la part des gens une haute perception de l’utilité et de facilité d’utilisation.

Qu’on ne se méprenne pas, ce n’est pas l’ordinateur ou la tablette qui motive le jeune, mais l’activité qui y est liée. Il est donc nécessaire de concevoir des approches didactiques pertinentes avec les TICE et surtout, elles doivent être simples. Le bon vieux KISS (Keep It Simple, Stupid) semble s’appliquer aussi dans l’approche technologique de la pédagogie.

Le numérique en classe ne s’intègre peut-être pas si facilement qu’on pourrait le croire. Il peut être source de distraction et parfois, les élèves peuvent trouver que la mécanique prend le pas sur la didactique. L’enseignant doit donc leur montrer l’utilité des compétences numériques pour le futur et leur proposer des activités pertinentes usant de la technologie. Quant aux établissements, l’achat et l’usage de machines doivent se faire en fonction des besoins pédagogiques réels.

Illustration : the other Martin Taylor via Foter.com / CC BY

Références

Abendschein, Dan. "How Much Tech in the Classroom is Too Much?" Marketplace. Dernière mise à jour : 6 juin 2014. http://www.marketplace.org/2014/06/06/education/learning-curve/how-much-tech-classroom-too-much.

"Classroom Technology: Too Much or Not Enough?" Smith Files. Dernière mise à jour : 20 octobre 2014. https://smithsystem.com/smithfiles/2014/10/20/classroom-technology-much-enough/.

Johnson, Ben. "Too Much Technology and Not Enough Learning?" Edutopia. Dernière mise à jour : 14 mars 2014. http://www.edutopia.org/blog/too-much-tech-not-enough-learning-ben-johnson.

Jourde, François. "Bien doser le numérique : de la fatigue à l’enthousiasme." Site de François jourde. Dernière mise à jour : 17 juillet 2016. https://profjourde.wordpress.com/2016/07/17/doser-le-numerique/.

Keeler, Alice. "OSAMR Model - When Tech Makes It Worse." Teacher Tech. Dernière mise à jour : 15 mars 2015. http://alicekeeler.com/2015/03/15/osamr-model-when-tech-makes-it-worse/.

"Modèle D'acceptation De La Technologie." EduTech Wiki. Dernière mise à jour : 4 octobre 2006. http://edutechwiki.unige.ch/fr/Mod%C3%A8le_d'acceptation_de_la_technologie.

Pinker, Susan. "Can Students Have Too Much Tech?" The New York Times. Dernière mise à jour : 30 janvier 2015. http://www.nytimes.com/2015/01/30/opinion/can-students-have-too-much-tech.html?_r=0.


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