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Publié le 15 mai 2016 Mis à jour le 15 mai 2016

Le « slacktivisme » peut être porteur de changement

On ne change pas le monde à coup de pétitions en ligne et de gazouillis. Quoique...

Internet a, certes, changé les façons de se renseigner. Maintenant, un petit tour sur un moteur de recherche dès qu’il y a un doute ou qu’une question nous traverse l’esprit. Or, a-t-il eu de l’impact sur notre vie? Pas celle virtuelle qui s’est enrichie de différents réseaux pour interagir entre nous, mais celle réelle. Celle sociale et politique. Depuis décembre 2010, le monde arabe est en plein bouleversement. Ce qu’on a appelé le Printemps arabe (ou «les printemps arabes») a été fortement lié, par certains, à Facebook et Twitter qui auraient accentué la révolte de certaines populations.

Pourtant, dans la même période de temps, des critiques réduisaient le militantisme virtuel à de la paresse, du « slacktivisme ». En effet, il est facile de signer une pétition ou d’aimer une page Facebook dénonçant une situation sans aller manifester ou s’investir dans une organisation. Au point où l’activisme en ligne était presque vu comme en étant un mineur, de seconde zone. Le genre qu’il ne faut surtout pas prendre en modèle. Et pourtant…

Se manifester grâce aux réseaux sociaux

La Conférence de Paris sur les changements climatiques en décembre 2015 devait être accompagnée de manifestations en marge de cette réunion des dirigeants mondiaux. Après l’échec monumental de celle de Copenhague en 2009, les regroupements environnementalistes voulaient à tout prix que celle de 2015 soit plus fructueuse. Pour cela, il fallait envoyer un signal fort. Or, sont arrivés les attentats terroristes du vendredi 13 novembre et avec elles, des dispositions d’état d’urgence dans toute la France qui empêchaient donc les regroupements populaires. Les ONG ont ainsi dû redoubler d’inventivité pour manifester sans le faire

À ce moment, la solution des réseaux sociaux est apparue évidente. Déjà, elles ont permis d’organiser des marches partout dans le monde, des gens qui pouvaient le faire au nom des Français par le mot-clé #March4me (Marchez pour moi). De plus, des habitants de l’Hexagone ont participé à une campagne sur les réseaux sociaux où ils se photographiaient avec une paire de chaussures pour souligner leur appui à la cause. D’autres en ont donné au groupe d’activisme en ligne Avaaz qui a alors, durant le jour, déposé des milliers de souliers pour attirer l’attention sur tous ces Français qui auraient voulu manifester.

En fait, le mouvement écologique qui avait subi le revers de Copenhague a compris que les réseaux sociaux pouvaient permettre une mobilisation plus grande et de rejoindre des citoyens afin qu’ils participent à des événements.

Par exemple, aux États-Unis où les habitants sont en général moins acquis à la cause des changements climatiques, le groupe 350.org a un succès appréciable et a permis de nombreuses manifestations contre, entre autres, le projet de pipeline Keystone. Un peu normal puisque derrière ce groupe se trouve ceux qui ont initié les campements Occupy qui ont retenu l’attention en 2009.

Le récent mouvement Nuit Debout pour contester la réforme de la loi du travail en France a aussi débuté sur les réseaux sociaux. Mediapart explique d’ailleurs dans un long article comment il est né de pétitions qui s’est métamorphosé en un slogan, en des vlogs (blogues vidéos) et en appels à la manifestation.

Marteler le message

Une récente étude montre en fait qu’en matière de sensibilisation et de propagation du message, l’activisme virtuel fait autant voir plus qu’une protestation dans les rues.

Par un bombardement de statuts sur les réseaux sociaux et, surtout, de slogans accrocheurs, les campagnes permettent de susciter de l’intérêt et de mettre le focus sur un sujet. Il arrive aussi, chez un plus petit pourcentage des gens en contact avec ce type de campagne qu’ils soient convaincus par la cause et embarquent dans un militantisme profond. Par exemple, en Tunisie, l’immolation d’un jeune partagé sur les réseaux a fait gronder la colère qui a mené à la destitution du président de l’époque.

Oui, le « slacktivism » est avant tout une question d’image. Ce qui explique une partie du succès est la possibilité de faire des slogans courts. Le « Nous sommes le 99 % » d’Occupy Wall Street en est un bon exemple tout comme le « On vaut mieux que ça » de Nuit Debout. Par contre, ce type d’activisme en est plus un de la forme plus que du fond. Il n’est pas composé de longs textes expliquant les tenants et aboutissants d’une situation.

Du coup, il est vrai qu’il ne sauvera pas de vies et qu’il ne remplacera jamais celui qui va sur le terrain et qui manifeste sa colère. Ce n’est, effectivement, pas simplement en signant une pétition en ligne que les choses changeront.

Or, de totalement balayer le «  slacktivisme » sous prétexte qu’il est plus lâche est contre-productif. Au contraire, le partage, les signatures, les gazouillis et les statuts Facebook permettent de faire perdurer les messages et augmentent plus significativement la possibilité pour une de ces personnes de s’engager dans une cause. L

’activiste paresseux d’hier peut devenir celui actif de demain. Une donnée que ne devraient pas négliger les organisations et mouvements divers.

Illustration : Elijah via Foter.com / CC BY-NC

Références

Alliès, Stéphane, Rachida El Azzouzi, and Dan Israel. "Une Mobilisation Jamais Vue Sur Internet." Mediapart. Dernière mise à jour : 29 février 2016. https://www.mediapart.fr/journal/france/290216/une-mobilisation-jamais-vue-sur-internet?page_article=1.

Assaf, Claude. "Entre Virtualité Et Réalité." L'Orient-Le Jour. Dernière mise à jour : 3 novembre 2015. http://www.lorientlejour.com/article/952736/entre-virtualite-et-realite.html.

Atmani, Mehdi. "Peut-on Militer Derrière son Clavier?" Le Temps. Dernière mise à jour : 27 novembre 2015. http://www.letemps.ch/societe/2015/11/27/on-militer-derriere-clavier.

Bardou, Florian. "Comment Les Outils Numériques Réchauffent La Mobilisation Climatique." Slate.fr. Dernière mise à jour : 30 novembre 2015. http://www.slate.fr/story/110753/mouvement-climatique-mobilise-numerique.

Brandy, Grégor. "Si, Si, Le Slacktivisme Peut Avoir Un Réel Impact." Slate.fr. Dernière mise à jour : 10 décembre 2015. http://www.slate.fr/story/111351/slacktivisme-impact.

Liacas, Tom. "The Social Strategy That is Super-sizing the Climate Movement." Mashable. Dernière mise à jour : 19 juillet 2015. http://mashable.com/2015/07/19/climate-change-social-movement/#0Jej9MXJPZqV.

"Slacktivists Doing More Than Clicking in Support of Causes." Georgetown University. Dernière mise à jour : 28 novembre 2011. http://csic.georgetown.edu/news/1308/slacktivists-doing-more-than-clicking-in-support-of-causes.


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