Les étudiants dits «persistants» s’inscrivent plusieurs fois en première année d’université. Soit ils changent de filière, soit ils redoublent, soit ils errent tout simplement d’une faculté à l’autre. Ils forment plus de 20 % des inscrits. 5 % en sont à leur troisième inscription ou plus !
Bien sur la plupart de ces étudiants changent de branche en raison d’une réorientation professionnelle ou de difficultés académiques, mais un certain nombre ne suivent aucune logique et semblent plutôt s’accommoder du statut d’étudiant universitaire, sans pour autant s’investir dans leurs études.
Malgré tous les obstacles administratifs créées pour décourager cette attitude, plusieurs parviennent à respecter les critères tout en évitant de perdre les avantages de l’expérience universitaire : socialisation, possibilité de poursuivre plusieurs vies en parallèle, possibilité de «maturer» à l’abri des responsabilités économiques courantes, etc.
Une autre façon de voir l’université
Véritables cauchemars des administrations, ces étudiants demeurent discrets et questionnent les vues purement pédagogiques de l’université. Pour ces étudiants, un échec scolaire ne signifie pas nécessairement un échec dans la vie personnelle ou sociale.
Vincent Enrico, Docteur en Sciences de l’Education et auteur de l’article «Les étudiants persistants: ceux qui prolongent leurs études en les désinvestissant», souligne que :
«la massification de l'enseignement supérieur a conduit à l'arrivée de "nouveaux étudiants", dont, par exemple, les "malgré nous » de l'enseignement supérieur ». (…) L'opposition entre réussite et échec a conduit certains étudiants à se situer dans un entre-deux.
L’université peut aussi être considéré comme un milieu de vie, comme un environnement social riche offrant des expériences variées, dont la fréquentation peut être étirée sans autre raison. Dans bien des cas, la motivation de la fréquentation universitaire se situe dans une autre logique que le diplôme, la réussite ou l’acquisition de connaissances.
Pour ces gens, hors-norme, les normes et standards ne signifient pas grand chose; réussis ou échoués, les cours ne changent rien à leur condition. Quand on se cherche, personne d’autre que soi peut répondre à ses propres questions.
Et si, pour l’université, il s’agissait de la première condition à mettre en place avec ces gens ?
Illustration : Valery Sidelnykov - ShutterStock
Référence
Les étudiants persistants: ceux qui prolongent leurs études en les désinvestissant.
Enrico Vincent - Fractal : Revista de psicologia, 2010, 22 (2)
https://hal-unilim.archives-ouvertes.fr/hal-01188406
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